Le pays de Canaan : la Terre Sainte

 

La Bible décrit la Terre Sainte comme un pays où coulent le lait et le miel. Cette fertilité presque miraculeuse relève de l’exagération orientale   : la fertilité est davantage le fruit de l’effort des hommes qui ont permis, à l’époque actuelle, d’adapter en Israël des cultures qui n’étaient pas traditionnelles. La Terre Sainte est ainsi appelée à cause des événements qui s’y sont déroulés depuis Abraham jusqu’à la naissance de l’Eglise. Il convient alors à chacun de connaître les lieux importants de cette terre et les grands événements qui sont autant d'étapes du plan de Dieu sur le monde et sur son peuple, afin d'enrichir sa foi.

Quand on parle de Terre Sainte, il faut entendre la région située entre la Méditerranée à l’ouest, le Jourdain à l’est, le Liban au nord, et le désert du Neguev au sud. C’est dans ce tout petit pays que se sont déroulés les grands événements de l’histoire biblique, c’est là que se trouvent les hauts lieux de l’histoire du peuple d’Israël. Les frontières du territoire d’Israël ont varié au fil des temps, mais le territoire ainsi délimité correspond à la terre de Canaan, que la Bible appelle la terre d’Israël, cette terre que Dieu avait promis de donner à son peuple, cette terre que son peuple a conquise   : Terre promise, terre conquise   !

La beauté de cette terre provient de la diversité de ses régions naturelles et de ses climats. Il est possible de comprendre la légende exploitée encore facilement de nos jours par les Israéliens   : lorsque Dieu créa le monde, il fit un modèle en miniature, et ce modèle, c’est la terre d’Israël... Le même jour, il est facile de faire du ski sur les pistes au mont Hermon, de se baigner dans les eaux limpides du lac de Tibériade et de se dorer au soleil sur les bords de la Méditerranée...

Laissons d’abord l’historien juif, Flavius Josèphe, nous décrire ce pays qui n’a guère changé depuis le premier siècle de l’ère chrétienne, époque où il rédigeait son oeuvre   :

Il y a deux Galilées, l’une se nomme la haute, l’autre la basse, et toutes deux sont environnées de la Phénicie et de la Syrie. Elles sont bornées du côté de l’occident par la ville de Ptolémaïs, par son territoire, et par le mont Carmel, possédé autrefois par les Galiléens et qui l’est maintenant par les Tyriens. Près de ce mont est la ville de Gamala, nommée la ville des chevaliers, parce que le roi Hérode y envoyait habiter ceux qu’il licenciait. Du côté du midi, elles ont pour frontières Samarie et Scytopolis jusqu’au fleuve du Jourdain. Du côté de l’orient, leurs limites sont Hyppen, Gadaris et la Gaulanite, qui sont aussi celles du royaume d’Agrippa, et du côté du septentrion, elles se terminent à Tyr et à ses confins.

La longueur de la Basse Galilée s’étend depuis Tibériade jusqu’à Zabulon, dont Ptolémaïs est proche, du côté de la mer, et sa largeur depuis le bourg de Xaloth, assis sur le grand champ, jusqu’à Bersabé. Là commence aussi la largeur de la haute Galilée jusqu’au village de Baca qui la sépare d’avec les terres des Syriens, sa longueur s’étend depuis Thella, village proche du Jourdain, jusqu’à Méroth.

Quoique des deux provinces soient environnées de tant de diverses nations, elles leur ont néanmoins résisté dans toutes leurs guerres, parce qu’outre qu’elles sont très peuplées, leurs habitants sont fort vaillants et fort instruits, dès leur enfance, aux exercices de la guerre. Les terres y sont si fertiles et si bien plantées de toutes sortes d’arbres, que leur abondance invitant à les cultiver ceux-là même qui ont le moins d’inclination pour l’agriculture, il n’y en a point d’inutiles. Il n’y a pas seulement quantité de bourgs et de villages, il y a aussi un grand nombre de villes si peuplées que la moindre a plus de quinze mille habitants. Bien que l’étendue de la Galilée ne soit pas aussi grande que le pays qui est au-delà du Jourdain, elle ne lui cède point en force, parce qu’elle est, comme je viens de le dire, toute cultivée et très fertile, au lieu qu’une grande partie de cet autre pays est sèche, désert et incapable de produire des fruits propres à nourrir les hommes. Il y a néanmoins des endroits dont la terre est si excellente qu’il n’y a point de plantes qu’elle ne puisse nourrir, et l’on y voit en abondance des vignes, des oliviers et des palmiers, parce que les torrents qui tombent des montagnes l’arrosent et que des sources qui coulent sans cesse la rafraîchissent durant les grandes ardeurs de l’été. Ce pays s’étend en longueur depuis Macheron jusqu’à Pella, et en largeur depuis Philadelphe jusqu’au Jourdain. Pella le termine du côté du septentrion, le Jourdain du côté de l’occident, le pays des Moabites du côté du midi, et l’Arabie, Sibonitide, Philadelphe et Gérasa du côté de l’orient.

Le pays qui dépend de Samarie et qui est situé entre la Judée et la Galilée commence au village de Ginéa et finit dans la toparchie de l'Acrabante. Il ne diffère en rien de celui de la Judée, car l'un et l'autre sont montueux et ont de riches campagnes. Les terres en sont très bonnes, faciles à cultiver et produisent quantités de fruits tant francs que sauvages, parce qu'étant naturellement sèches, elles ne manquent point de pluie pour les humecter. Les eaux y sont les meilleures du monde, les pâturages si excellents que l'on ne voit en nulle part du lait en plus grande abondance   ; et ce qui surpasse tout le reste et fait qu'on ne peut trop surestimer ces deux provinces, c'est l'incroyable quantité d'hommes dont elles sont peuplées. Elles se terminent toutes deux au village d'Anvath, autrement nommé Borcéos.

La Judée se termine aussi à ce même village du côté du septentrion. Sa longueur du côté du midi s’étend jusqu’à un village d’Arabie nommé Jardan, et sa largeur depuis le fleuve du Jourdain jusqu’à Joppé. Jérusalem, placée au milieu, en est le centre. Et ce beau pays a encore cet avantage, qu’allant jusqu’à Ptolémaïs, la mer ne contribue pas moins que la terre à le rendre aussi délicieux qu’il est fertile. Il est divisé en onze parts dont la ville de Jérusalem est la première et comme la reine et le chef de tout le reste. Les dix autres parts ont été distribuées en autant de toparchies qui sont Gophna, Acrabatane, Tamné, Lydda, Emmaüs, Pella, l’Idumée, Engaddi, Hérodion et Jéricho. Jamnia et Joppé, qui ont juridiction sur les régions voisines ne sont point comprises dans ce que je viens de dire, non plus que la Gamalite, la Gaulanite, la Bathanée et la Trachonite, qui font partie du royaume d’Agrippa. Ce pays, qui est habité par les Syriens et les Juifs mêlés ensemble, s’étend en largeur depuis le mont Liban et les sources du Jourdain jusqu’au lac de Tibériade, et en longueur depuis le village d’Arphac jusqu’à Juliade.

Voilà ce que j’ai cru devoir dire de la Judée et des provinces voisines, le plus brièvement que j’ai pu.

Le géographe actuel distinguerait d’une autre manière les régions naturelles de la Terre Sainte.

La Galilée est un ensemble montagneux s’élevant graduellement jusqu’à 1200 mètres dans le nord. La plaine d’Esdrelon ou d’Yisréel, au sud de ce petit ensemble montagneux, a la forme d’un triangle de 25 kilomètres de côté, cette plaine est très fertile. A l’ouest également se trouve une plaine longue de 35 kilomètres et large de 5 à 10 kilomètres, en bordure de mer depuis le nord du pays jusqu’au mont Carmel.

Une chaîne montagneuse traverse de pays du nord-ouest au sud. C’est la chaîne du mont Carmel qui s’étend sur 25 kilomètres de long et 8 de large, son altitude moyenne est de 500 mètres. Son nom lui vient de l’hébreu : Karem El, la vigne de Dieu. Par sa végétation, abondante pour la région, elle était l’image parfaite de la prospérité, mais en période de sécheresse, c’est la désolation et la ruine. La chaîne du mont Carmel rejoint la montagne de Samarie, avec des points culminants, le mont Ebal (940 mètres) et le mont Garizim (880 mètres). Plus au sud, Jérusalem se trouve placée sur un plateau qui coupe la chaîne centrale, qui reprend de l’altitude par la suite jusqu’à dépasser les 1000 mètres dans les montagnes de Judée à proximité d’Hébron.

Une plaine côtière s’étend depuis la pointe du Carmel pour rejoindre progressivement le delta du Nil. Très étroite dans le nord, cette plaine atteint 20 kilomètres à la hauteur de Jaffa qui est un port naturel sur la Méditerranée tandis que les ports de Césarée et d’Ascalon sont des ports artificiels. A l’est de cette plaine, les collines s’élèvent doucement vers les sommets de la chaîne centrale.

L’est du pays forme une vaste dépression géologique que suit le cours du Jourdain. Celui-ci prend sa source au pied du mont Hermon qui surplombe la Galilée à 2800 mètres. Le Jourdain traverse le lac de Tibériade à moins de 210 mètres pour se perdre dans la Mer Morte à moins 395 mètres. Cette dépression, dite syro-africaine, se poursuit jusqu’aux lacs de l’Afrique centrale. Cette vallée dépressionnaire ne constitue pas un lieu de passage, mais plutôt une frontière naturelle entre la Terre Sainte et les pays d’au-delà du Jourdain.

La province du Nord, la Galilée, est fertile et verdoyante. Son pôle d’attraction est certainement le lac de Tibériade. Ce lac est encore appelé mer de Kinnéreth, en raison de sa forme qui rappelle celle d’un kinnor (sorte de lyre ancienne). Le niveau de ses eaux est de 210 mètres au-dessous du niveau de la mer. Il mesure 21 kilomètres de long du nord au sud et sa plus grande largeur est de 12 kilomètres, la profondeur de ses eaux se situe entre 40 et 50 mètres.

Le lac de Tibériade a été décrit par Flavius Josèphe :

« Le lac de Gennésareth prend son nom de la terre qui l’environne. Sa longueur est de cent stades, sa largeur de quarante, et il n’y a point de rivières ni même de fontaines qui soient plus tranquilles. Son eau est très bonne à boire et très facile à puiser, parce qu’il n’y a sur son rivage qu’un gravier fort doux. Elle est si froide qu’elle ne perd pas même sa froideur lorsque ceux du pays, selon leur coutume, la mettent au soleil pour l’échauffer durant les plus grandes chaleurs de l’été. Il y a quantité de diverses sortes de poissons qui ne se rencontrent point ailleurs. Le Jourdain traverse ce lac par le milieu. Il semble qu’il prend sa source à Panion. Mais la vérité est qu’il vient par-dessous terre d’une autre source nommée Phiale, distance de cent vingt stades de Césarée (de Philippe), du côté de main droite et proche du chemin par où l’on va à la Trachonitide. Elle est si ronde que c’est ce qui lui a fait donner le nom de Phiale. Elle remplit toujours si également son bassin qu’on ne la voit jamais ni diminuer ni s’accroître. On avait toujours ignoré jusqu’à Hérode le Tétrarque que cette fontaine fût la source du Jourdain. Mais ce prince y ayant fait jeter de la paille, on trouva après cette paille dans la source de Panion, d’où l’on ne doutait pas auparavant que ce fleuve ne procédât. Cette source de Panion est naturellement fort belle, mais la magnificence du roi Agrippa l’a encore embellie. Après que le Jourdain, qui semble avoir pris là son commencement, a traversé les marais fangeux du lac de Séméchonite, et continué son cours durent cent vingt autres stades, il passe au-dessous de la ville de Juliade à travers le lac de Gennésareth, d’où après avoir encore coulé durant un long espace dans le désert, il se rend dans le lac Asphaltite ».

La terre qui environne le lac de Gennésareth et qui porte le même nom est également admirable par sa beauté et sa fécondité. Il n’y a point de plantes que la nature ne la rende capable de porter, ni rien que l’art et le travail de ceux qui l’habitent ne contribuent pour faire qu’un tel avantage ne leur soit inutile. L’air est si tempéré qu’il est propre à toutes sortes de fruits. On y voit en grande quantité des noyers, qui sont des arbres qui se plaisent dans les climats les plus froids, et ceux qui ont besoin de chaleur, comme les figuiers et les oliviers, n’y rencontrent pas moins ce qu’ils désirent, en sorte qu’il semble que la nature, par un effort de son amour pour ce beau pays, prend plaisir d’allier les choses contraires, et que, par une agréable contestation, toutes les saisons favorisent à l’envie cette heureuse terre, car elle ne produit pas seulement tant d’excellents fruits, mais ils s’y conservent si longtemps que l’on y mange durant six mois des raisons et des figues et d’autres fruits durant toute l’année. Outre cette température de l’air, on y voit couler les eaux d’une source très abondante qui porte le nom de Capernaüm, que quelques-uns croient être une petite branche du Nil, parce que l’on y trouve des poissons semblables au coracin d’Alexandrie, qui ne se voit nulle part que là et dans ce grand fleuve.

A la faveur d’un hiver sans pluie, le niveau des eaux du lac ayant baissé fortement, une embarcation du premier siècle fut découverte en janvier 1986 par deux archéologues amateurs, entre le kibboutz Ginossar et le village de Migdal (nom actuel de Magdala). La barque, du début de l’ère chrétienne, a été utilisée pour la pêche et le transport entre les villages situés sur les bords de ce lac. Cette barque mesure 8,20 mètres de long et 2,35 mètres de large. Elle est en réparation et en conservation dans la piscine du kibboutz.