Jésus traverse Jéricho

 

Après la transfiguration, il ne reste à Jésus qu'à franchir une nouvelle étape dans son ministère. C'est pourquoi il quitte la Galilée pour affronter ses adversaires sur leur propre terrain, en Judée, allant même jusqu'à les provoquer dans la capitale, Jérusalem.

En montant à Jérusalem, Jésus est passé (sans doute plusieurs fois) par Jéricho, oasis bien connue de l'époque biblique et de tous les pèlerins galiléens qui montaient à Jérusalem.

Jéricho, cité des palmiers, est la ville la plus basse du monde, située à 300 mètres au-dessous du niveau de la mer. C'est une oasis de verdure de cinq kilomètres de diamètre, véritable porte d'entrée en Israël en venant du désert. Les fouilles entreprises montrent que Jéricho devait déjà être une ville fortifiée aux environs de l'an 7000 avant Jésus-Christ. La Bible décrit la prise de Jéricho par Josué et le peuple qui avait passé quarante ans dans le désert comme le signe véritable de l'entrée en Terre promise, même si le texte biblique ne respecte pas exactement la réalité historique :

Jéricho était fermée et enfermée à cause des fils d'Israël : nul ne sortait et nul n'entrait. Le Seigneur dit à Josué : Vois, je t'ai livré Jéricho et son roi, ses hommes valides. Vous, tous les hommes de guerre, vous tournerez autour de la ville, faisant le tour de la ville une fois. Ainsi feras-tu six jours durant. Sept prêtres porteront les sept cors de bélier devant l'arche. Le septième jour, vous tournerez autour de la ville sept fois et les prêtres sonneront du cor. Quand retentira la corne de bélier, quand vous entendrez le son du cor, tout le peuple poussera une grande clameur, le rempart de la ville tombera sur place et le peuple montera chacun devant soi (Jos. 6, 1-5).

La Bible rapporte également que de nombreux prophètes habitaient la région de Jéricho. Elle y situe l'enlèvement d'Elie dans un char de feu. Selon le premier livre des Rois, après la révélation que Dieu lui fait de lui-même sur le mont Horeb, Elie est chargé d'oindre Elisée prophète pour lui succéder : Elie partit de là, et il trouva Elisée, fils de Chap, tandis qu'il labourait avec douze paires de boeufs, lui-même étant à la douzième. Elie passa près de lui et jeta sur lui son manteau. Elisée courut derrière Elie et dit : Laisse-moi embrasser mon père et ma mère, puis j'irai à ta suite. Elie répondit : Va, retourne, que t'ai-je donc fait ? Elisée le quitta, prit la paire de boeufs et l'immola. Il se servit de la charrue pour faire cuire les boeufs et les donna à ses gens qui mangèrent. Puis il se leva et suivit Elie comme son serviteur. (1 R. 19, 19-21).

Voici ce qui arriva quand le Seigneur fit monter Elie au ciel dans la tempête. Elie et Elisée quittaient Guilgal. Elie dit à Elisée : Reste ici, je t'en prie, car le Seigneur m'envoie jusqu'à Béthel. Elisée répondit : Par la vie de mon Seigneur et par ta propre vie, je ne te quitterai pas. Et ils descendirent à Béthel. Les fils de prophètes qui étaient à Béthel sortirent vers Elisée et lui dirent : sais-tu qu'aujourd'hui le Seigneur va enlever ton maître dans les airs au-dessus de ta tête ? Il répondit : Je le sais moi aussi, taisez-vous. Elie lui dit : Elisée, reste ici, je t'en prie, car le Seigneur m'envoie jusqu'à Jéricho. Il répondit : Par la vie de mon Seigneur et par ta propre vie, je ne te quitterai pas. Et ils arrivèrent à Jéricho. Les fils de prophètes qui étaient à Jéricho s'approchèrent d'Elisée et lui dirent : sais-tu qu'aujourd'hui le Seigneur va enlever ton maître dans les airs au-dessus de ta tête ? Il répondit : Je le sais moi aussi, taisez-vous. Elie lui dit : Reste ici, je t'en prie, car le Seigneur m'envoie au Jourdain. Il répondit : Par la vie de mon Seigneur et par ta propre vie, je ne te quitterai pas. Et ils s'en allèrent tous les deux. Cinquante d'entre les fils de prophètes allèrent se placer en face du Jourdain, à distance d'Elie et d'Elisée qui s'arrêtèrent près du fleuve. Alors Elie enleva son manteau, le roula et en frappa les eaux qui se séparèrent. Ils passèrent tous deux à pied sec. Comme ils passaient, Elie dit à Elisée : Demande ce que je dois faire pour toi avant d'être enlevé loin de toi. Elisée répondit : Que vienne sur moi, je t'en prie, une double part de ton esprit. Il dit : Tu demandes une chose difficile. Si tu me vois pendant que je serai enlevé loin de toi, alors il en sera ainsi pour toi, sinon cela ne sera pas. Tandis qu'il poursuivait leur route tout en parlant, voici qu'un char de feu et des chevaux de feu les séparèrent l'un de l'autre. Elie monta au ciel dans la tempête. Quant à Elisée, il voyait et criait : Mon père, mon père, chars et cavalerie d'Israël. Puis il cessa de le voir... Les fils de prophètes, ceux de Jéricho, qui l'avaient vu d'en face dirent : L'esprit d'Elie repose sur Elisée (2 R. 2, 1-15).

L'enlèvement d'Elie confirme le caractère mystérieux de sa vie. la tradition juive le considère comme le plus grand de tous les prophètes. Son retour est attendu avant la venue du Messie. Il est l'hôte invisible de toute célébration. Le manteau d'Elie (qui détient ses pouvoirs surnaturels) reste aux mains d'Elisée, il s'en sert pour frapper les eaux du Jourdain et revenir à pied sec à Jéricho. Elisée commence son activité prophétique en assainissant une source de cette ville que l'on présente de nos jours encore comme la fontaine d'Elisée : Des gens de Jéricho dirent à Elisée : Comme le voit mon seigneur, le séjour dans cette ville est agréable, toutefois l'eau est mauvaise et le pays est stérile. Il dit : Procurez-moi une écuelle et mettez-y du sel. Ils la lui procurèrent, il sortit vers l'endroit où jaillissait l'eau, y jeta le sel en disant : Ainsi parle le Seigneur, j'assainis cette eau, elle n'apportera plus ni mort ni stérilité. L'eau fut assainie jusqu'à ce jour, selon la parole qu'avait dite Elisée. (2 R. 2, 19-22).

Jésus traverse donc la ville lors d'un voyage à Jérusalem. Les évangélistes y situent la guérison d'un aveugle que Marc nomme Bartimée :

Ils arrivent à Jéricho. Comme Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une assez grande foule, l'aveugle Bartimée, fils de Timée, était assis au bord du chemin, en train de mendier. Apprenant que c'était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : Fils de David ! Jésus, aie pitié de moi ! Beaucoup le rabrouaient pour qu'il se taise, mais lui criait de plus belle : Fils de David ! aie pitié de moi ! Jésus s'arrêta et dit : Appelez-le. On appelle l'aveugle, on lui dit : Confiance, lève-toi, il t'appelle. Rejetant son manteau, il se leva d'un bond et il vint vers Jésus. S'adressant à lui, Jésus dit : Que veux-tu que je fasse pour toi ? L'aveugle lui répondit : Rabonni, que je retrouve la vue. Jésus lui dit : Va, ta foi t'a sauvé. Aussitôt il retrouva la vue et il suivait Jésus sur le chemin (Mc. 10, 46-52).

La cité même de Jéricho n'a aucune importance dans le récit, elle n'est qu'un lieu de passage vers Jérusalem, on ne s'arrête pas. Et pourtant, à travers ce passage à Jéricho, un peuple de croyants se forme. C'est aussi dans cette ville de Jéricho que Jésus se fait accueillir par le collecteur d'impôts Zachée :

Entré dans Jéricho, Jésus traversait la ville. Survint un homme appelé Zachée, c'était le chef des collecteurs d'impôts et il était riche. Il cherchait à voir qui était Jésus, et il ne pouvait pas y parvenir à cause de la foule, parce qu'il était de petite taille. il courut en avant et monta sur un sycomore afin de voir Jésus qui allait passer par là. Quand Jésus arriva à cet endroit, levant les yeux, il lui dit : Zachée, descends vite, il me faut aujourd'hui demeurer dans ta maison. Vite Zachée descendit et l'accueillit tout joyeux. Voyant cela, tous murmuraient : C'est chez un pécheur qu'il est allé loger. Mais Zachée s'avançant dit au Seigneur : Eh bien, Seigneur, je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et, si j'ai fait tort à quelqu'un je lui rends le quadruple. Alors Jésus dit à son propos : Aujourd'hui, le salut est venu pour cette maison, car lui aussi est un fils d'Abraham. En effet, le fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu (Lc. 19, 1-10).

Les nombreuses grottes de la région accueillirent de nombreux ermites s'engageant dans des combats spirituels à l'exemple du Christ qui résista à la tentation. La tradition a fixé au Mont de la Quarantaine, proche de Jéricho, à l'embouchure du wadi Quelt, la localisation de la tentation, cette expérience spirituelle de Jésus, dès avant l'inauguration de son ministère. C'est là que se dresse le monastère Sarandarion, fondé en 1895 à l'emplacement d'une chapelle byzantine qui commémorait les quarante jours de jeûne de Jésus dans le désert.