L'espérance est un combat
L'histoire biblique montre comment les témoins de l'espérance ont dû mener sans cesse un dur combat pour continuer à espérer. Il a fallu beaucoup de courage à Abraham pour croire à la promesse de Dieu, quitter son pays et se lancer dans l'inconnu. L'espérance de libérer son peuple imposa à Moise d'entrer en opposition et contre le pharaon et contre Israël, devenu mécontent dans le désert après la sortie d'Égypte.
Pour
stimuler l'espérance du peuple élu, les prophètes eurent à lutter âprement
contre le découragement et contre l'idolâtrie des exilés. Il coûta cher aux
apôtres de témoigner de l'espérance qu'ils portaient en eux. La défense de
leurs convictions les amena en prison et jusqu'au martyre. L'histoire du salut
continue. Elle expose les fidèles à devoir poursuivre en permanence de
difficiles efforts, afin de pouvoir avancer vers la Terre Promise.
De nos jours, le combat de l'espérance doit être conduit simultanément sur plusieurs fronts. Il faut persuader les fixistes de ne pas avoir peur de la vie, qui suppose un développement continu. Il y a même des traditionalistes qui ont beaucoup de mal à percevoir la voix de Dieu à travers la clameur des pauvres et des sans espoir. Se réfugier prudemment dans de nobles abstractions est évidemment plus facile que de se jeter dans la mêlée.
Sur le front opposé, il y a des aventuriers impatients qui foncent en avant sans frein, sans points de repère. Il faudrait arriver à les convaincre qu'il ne s'agit pas d'adapter la semence de la Parole divine au terrain d'aujourd'hui. C'est le terrain qu'il faut adapter à la semence.
Pour rendre l'espérance aux hommes, pour l'entretenir, il faut combattre contre tout ce qui défigure ou dilue la vigueur du message d'espérance de la Bible.
Lutter pour rallumer parmi les hommes un grand idéal humain, pour faire passer en eux le puissant dynamisme de l'espérance suppose que nous inspirions confiance. Pour être crédibles aux yeux de ceux qui nous voient lutter, nous devons nous efforcer d'être désintéressés, persévérants et objectifs. On doit pouvoir constater que nous nous battons sincèrement contre tout ce qui est injustice, mauvaise foi et travestissement de la réalité. Il faudrait faire comprendre que si l'avenir doit reposer sur des fondations solides, il est nécessaire de construire sur ce qui est équitable et vrai. Sinon aucune structure économique ou sociale ne saurait résister.
On est porteur d'espérance dans la mesure où l'on est, en même temps, porteur de vérité.
Léon-Arthur ELCHINGER, Je plaide pour l'homme, 1976