La prière, une chance pour l’homme
La prière est une dimension constitutive de tout croyant. Par la prière, il comprend que sa véritable patrie n’est pas dans ce monde, mais dans le Royaume de Dieu, qu’avec les autres croyants il construit chaque jour. En ce sens, la prière rejoignait une des grandes dimensions du pèlerinage qui fait découvrir aux chrétiens qu’ils habitent ce monde sans être de ce monde.
La prière est un lieu de ressourcement dans la foi et dans la conscience d’appartenir à l’unique Eglise de Jésus Christ. Trop souvent, la foi est comme asphyxiée par la société humaine qui l’enferme dans la satisfaction immédiate des besoins de la vie quotidienne des hommes. Pour redonner un nouveau souffle, la prière permet à chaque chrétien de se découvrir comme un des membres du peuple de Dieu en marche vers son Seigneur. Comme le peuple d’Israël en marche dans le désert, les chrétiens sont en marche vers le Royaume. La prière du peuple juif était une méditation des "paroles" que Dieu lui avait adressées sur le mont Sinaï, par l’intermédiaire de Moïse. La prière du chrétien est aussi une écoute et une méditation des paroles de Dieu.
Dieu est premier, non pas parce qu’il aurait tout prévu d’avance, permettant aux hommes d’exister simplement comme des robots soumis entièrement à sa volonté. Dieu est premier parce qu’il s’est engagé définitivement dans la voie des hommes qu’il aime.
La chance de la prière, la chance qui est offert à chaque chrétien, c’est de retrouver cette place de Dieu dans la vie des hommes. Un chant affirme cette réalité fondamentale : Dieu fait de nous, en Jésus-Christ, des hommes libres... Nous sommes libres devant Dieu par Jésus-Christ, cette liberté, il nous l’a acquise au prix de son sang. Tous les sacrifices sont devenus vains : le seul sacrifice qui soit agréable désormais à Dieu, c’est le coeur brisé et broyé, c’est le coeur qui s’associe à la souffrance de son Fils Jésus. Comme le dit assez justement, l’apôtre Paul, J’achève en ma chair ce qui manque à la Passion du Christ (Col. 1, 24). La chance qui nous est offerte dans la prière, c’est de nous rendre présents devant Dieu, dans le Corps même de son Fils.
La vie des chrétiens en Dieu par l’Esprit
Les premières communautés chrétiennes, et particulièrement celle des apôtres constituée en première Eglise par l’événement fondateur de la Pentecôte, se sont découvertes comme des lieux où s’exprimait la présence de l’Esprit de Dieu promis par Jésus. Toute leur existence a été une vie selon l’Esprit. Et il importait, pour ces premières communautés, de vivre selon cet Esprit, dans la fidélité à la tradition reçue des apôtres. C’est au coeur de la vie des croyants que peut s’établir la communion entre Dieu et les hommes.
Certains Pères de l’Eglise sont même allés jusqu’à refuser de considérer comme chrétiens ceux qui se contentaient de recevoir le baptême ou d’autres sacrements sans vivre la grande dimension spirituelle et mystique. Ils refusaient en quelque sorte de reconnaître la présence de l’Esprit dans ces croyants, en raison de leur passivité, car l’Esprit n’est jamais inactif, il agit au plus intime des fidèles qui acceptent de collaborer à l’oeuvre salvifique du Père inaugurée dans la prédication de Jésus.
Si la théologie comporte nécessairement un aspect doctrinal, qui constitue l’enseignement officiel de l’Eglise, sa catéchèse, elle, ne découvre sa pleine richesse que dans la vie mystique, par une expérience de vie dans l’Esprit-Saint, celle-là même que les saints de tous les temps ont connue et expérimentée au cours de leur vie.
La vie mystique n’est pas une envolée vers des sphères mystérieuses qui dépasseraient toute participation humaine. Au contraire, elle est une avancée progressive dans le mystère même de ce Dieu qui se révèle, qui se donne à connaître à tous les fidèles, en les faisant participer activement à son projet de salut et de recréation du monde.
Alors, la prière du chrétien, si elle accepte de se calquer sur la prière de Jésus, dans une relation filiale avec le Père, est beaucoup plus simple qu’il n’y paraît, elle n’est pas réservée à une élite. Il suffit de s’arrêter pour se rendre disponible à Dieu, pour vivre dans le sentiment de sa présence : éprouver au plus intime de nous-mêmes qu’il est là avec nous, qu’il est tout proche de nous. C’est dans des gestes très simples que l’homme peut rencontrer son Dieu : il n’est pas perdu dans les nuages, il vient à notre rencontre dans les tâches les plus banales. Sainte Thérèse d’Avila, une des plus grandes mystiques de l’histoire de l’Eglise, la réformatrice de l’ordre du Carmel, ne renonçait jamais au service de la vaisselle : C’est là, en rangeant les couverts qu’il est possible de découvrir concrètement ce Dieu qui nous appelle à le servir, en aimant les autres, en nous mettant à leur service.
La seule chose à savoir et à se redire constamment, c’est que la prière est un rendez-vous d’amour avec Dieu. Dans un monde où tout est agression, dans un monde où ce qui compte avant tout, c’est la vitesse et le rendement, le chrétien est celui qui sait s’arrêter pour prendre du temps et l’offrir à Dieu. Car il découvre que le temps qui lui est offert est aussi un don de Dieu. La prière des chrétiens, qui inspire tous les moments de leur vie, se transforme, pour ainsi dire, en un immense feu d’amour. On s’imagine parfois qu’il suffit de se dire :Tiens, il faut que je me mette à la prière. C’est une illusion. Il faut tomber amoureux de Dieu. Il est inutile de s’inquiéter : Qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire ? Il n’y a pas un seul amoureux au monde qui se pose une telle question. Tous pensent : Quand est-ce que je vais le rencontrer ? Prier, c’est ne jamais être seul, c’est rester proche de Dieu, en sachant que ce rendez-vous est toujours possible.
Alors, prier devient aussi naturel que respirer. Il nous arrive parfois de respirer profondément, même si on le fait rarement. Quand on le fait, on se sent revivre, parce qu’on avait oublié à quel point c’était vital.
Dans ce monde qui ne connaît souvent que l’aridité et la sécheresse des coeurs, dans ce monde où l’oubli de Dieu se fait sentir, la prière apparaît alors comme une sorte d’invitation à faire refleurir les déserts, comme le disait Don Helder Camara, l’ancien évêque de Recife.
Dans ce monde où trop souvent également les hommes se referment sur eux-mêmes, oubliant la solidarité qui les unit, la prière devient une sorte de bouquet offert à Dieu, un bouquet qui rassemble toutes les meilleures réalisations de l’homme qui a soif d’un monde nouveau. Car le but de la prière, c’est bien l’avènement d’un monde nouveau, tel qu’il est décrit dans le livre de l’Apocalypse de saint Jean : des cieux nouveaux et une terre nouvelle.
Dans ce monde nouveau, où l’homme sera recréé à l’image du Fils unique de Dieu, le Père céleste sera la source de toutes les bénédictions qui se répandront sur l’humanité renouvelée. La prière chrétienne est une anticipation de ce monde nouveau. C’est par elle que nous pouvons découvrir tous les bienfaits dont Dieu comble ses enfants.
Prier, c’est rencontrer quelqu’un de connu depuis longtemps. C’est une rencontre, une communication, un engagement à recevoir Dieu, chacun à sa manière parce que lui, Dieu, reçoit chacun comme il est. C’est une preuve de confiance : je me donne à Dieu parce que j’ai confiance en lui. Je n’ai jamais entendu Dieu personnellement, mais la prière sert à travailler sa foi. Quand on prie, on ne se pose pas la question de savoir à quoi cela sert.
Le mystère de Dieu n’est pas inaccessible pour peu que le fidèle accepte de se laisser porter par l’Esprit-Saint. La transcendance de Dieu ne fait pas de lui un être perdu, inabordable, elle invite chaque homme à marcher vers lui, non pas dans une quête plus ou moins stérile qui serait celle d’un esprit scientifique purement spéculatif, mais bien plus dans l’attitude de celui qui accepte de reconnaître que l’on ne peut pas avancer vers Dieu, si on ne découvre pas que Dieu a d’abord fait les premiers pas, que Dieu lui-même s’est mis en quête de l’homme : Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais pas déjà trouvé. Cette parole, mise dans la bouche de Dieu par saint Augustin, exprime bien le fait que Dieu est toujours premier dans le cadre même de l’existence humaine.
L’Esprit-Saint est celui qui anime et qui vivifie le coeur de tous les fidèles, il permet une approche du mystère de la connaissance du Dieu unique. L’homme ne connaît pas Dieu, à moins que celui-ci ne se donne à connaître, à moins qu’il ne se révèle à lui. Il ne s’agit donc pas de connaître quelque chose sur Dieu ou même quelque chose de Dieu, il s’agit d’avoir Dieu en soi et de vivre par lui. Celui qui n’a pas rencontre Dieu ne peut pas parler de lui, mais il ne faut pas que celui qui aspire à connaître Dieu et à le rencontrer ne s’évade dans l’oraison, en recherchant des images sensibles, des formes ou des figures de Dieu. Celui qui vit de la prière est intimement uni à Dieu, il est le lieu même de la présence de Dieu au milieu du monde.
C’est l’Esprit-Saint qui mène les hommes à la rencontre de Dieu, Père et Créateur. La création du monde se trouve au terme même du mouvement qui vient de Dieu, du Père, par le Fils, dans l’Esprit. Mais toute l’économie du salut suit le chemin inverse : l’homme, animé par l’Esprit-Saint, qui est au plus intime du coeur de l’homme, accède, par le Fils, à la présence du Père.
La prière est une énergie qui sanctifie les croyants pour les conduire au Père de toutes les grâces, en les construisant à l’image de son Fils, Jésus Christ. Tout le ministère, tout le travail du Fils et de l’Esprit converge vers le Père, qui est la source de toute la vie spirituelle des hommes. C’est en permettant au croyant de remonter vers le Père que l’Esprit le conduit à la découverte de la transcendance absolue de la divinité une et indivisible. Le sommet de la vie mystique réside dans la rencontre personnelle avec le Christ qui parle de son Père dans le coeur des hommes par l’Esprit-Saint.
Un modèle de prière : ‘‘la prière de Jésus’’
La prière de Jésus se présente comme une oraison jaculatoire, qui résume toute la richesse de la révélation biblique : Seigneur Jésus, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur. En confessant la seigneurie universelle de Jésus Christ, en reconnaissant sa filiation divine, en découvrant par là le mystère de la Trinité, l’orant, l’homme de prière, se trouve installé au plus profond de l’abîme, inauguré par la chute et le péché de tous les hommes. Mais, au fond de cet abîme, dont il ne peut sortir seul, ce croyant adresse une invocation à la miséricorde divine du Christ.
Le Christ, présent et agissant encore dans le monde par l’Esprit-Saint, est celui qui fait passer des ténèbres humaines à l’admirable lumière divine. Le Nom même de Jésus, ce Nom qui surpasse tous les noms (Phi. 2, 10), est chargé d’une puissance véritablement sacramentelle, puisqu’il constitue la présence même du Christ Seigneur au coeur de celui qui prie. Et l’invocation même de ce nom de Jésus introduit dans la présence de Dieu, qui permet au croyant de reprendre l’expression de saint Paul, dans sa lettre aux Galates : Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi (Gal. 2, 20). Si Dieu est présent à tout homme, l’homme se rend présent, par la prière, à la présence de Dieu en lui.
Organiser une réunion de prière
Une réunion de prière est un rassemblement de la communauté chrétienne : il ne suffit pas d’être les uns à côté des autres dès le départ pour constituer une communauté de prière. Il faut aussi créer un lieu, une ambiance : cela est possible par un chant qui manifeste l’entrée en célébration. Ce chant sera toujours choisi en fonction du projet, de l’idée directrice que l’on désire suivre dans la prière.
Ce rassemblement d’Eglise ne peut être efficace que si chaque membre de la communauté découvre qu’il entre dans une relation intime avec Dieu. D’où l’importance qu’il convient d’accorder à un signe trinitaire, comme le signe de la croix, ou le souhait de bienvenue du célébrant, lors de la célébration eucharistique.
Une réunion de prière est animée par un esprit de prière. Il convient donc de placer les participants dans l’optique d’un thème spirituel, dont on pense qu’il est important pour la vie de la communauté ou pour la vie de l’Eglise. C’est l’Esprit de Dieu qui nous porte dans la prière, mais la prière se doit d’être incarnée dans les réalités de l’existence humaine.
Une réunion de prière est signifiante quand on se met à l’écoute de la Parole de Dieu. Il est nécessaire de proclamer un ou plusieurs textes de l’Écriture. Il ne s’agit naturellement pas de faire de la bibliomancie, mais de choisir les textes selon l’esprit que l’on veut donner à la prière communautaire.
Écouter la Parole de Dieu, c’est d’abord faire silence pour l’entendre, pour l’accueillir... Mais, comme cette Parole résonne et retentit dans la vie du chrétien, il convient aussi de l’acclamer par un chant et surtout par un psaume. La Bible propose cent cinquante psaumes, qui ont constitué la prière la plus certaine de Jésus, puisqu’il s’est coulé dans le cadre de la prière de son peuple.
D’ailleurs, toute sa vie est marquée par ce chant des Psaumes. Cela apparaît sans doute encore plus nettement aux derniers jours de sa vie. Le livre des Psaumes (qui fut le recueil de prière de Jésus, tout comme il demeure le livre de prière par excellence pour les juifs et pour les chrétiens) permet de découvrir que toute prière est le premier acte de la rencontre de l’homme avec son Créateur, avec son Sauveur, avec son Inspirateur.
C’est la raison pour laquelle la prière se présente toujours comme un appel, un cri de l’homme qui sait qu’il est destiné au bonheur par son Créateur, mais qui reconnaît aussi sa faiblesse. C’est un appel qui monte du fond de l’angoisse vers Celui qui peut libérer l’homme de l’abîme dans lequel il se trouve plongé par la suite de sa faute, de son péché.
Il peut arriver que la lecture de la Parole de Dieu ne soit pas comprise immédiatement par tous les auditeurs. Une brève introduction peut en donner le sens ou la portée. Éventuellement, une explication plus longue peut suivre cette lecture, en restant dans le style de la méditation, et en ménageant toujours des temps de silence pour que chacun puisse faire sienne la Parole de Dieu.
Une prière prend son extension complète quand elle devient prière communautaire. Ayant entendu la Parole de Dieu, nous sommes toujours renvoyés aux hommes qui nous entourent. Il convient alors de prévoir une prière d’intercession, formulée comme une demande de pardon, comme une suite de demandes, comme une suite de louanges... Les participants interviennent alors par une acclamation appropriée.
L’intercession peut s’achever dans la prière du Seigneur. Le Christ Jésus a mis sur nos lèvres cette prière pour que nous puissions nous tourner vers son Père qui est aussi notre Père.
La prière nous conduit à rendre grâce à Dieu. Elle est écoute de la Parole, écoute du souci des hommes, elle remonte à Dieu par l’action de grâce que nous lui rendons. Nous bénissons Dieu de ce qu’il a fait et nous lui demandons de répandre sur nous sa bénédiction
La prière individuelle
Même quand il prie dans la solitude de sa chambre, le chrétien n’oublie pas qu’il est l’homme qui porte devant Dieu l’ensemble de la communauté ecclésiale, la totalité de la communauté humaine. Il n’y a pas de prière solitaire possible pour celui qui sait qu’il fait partie d’une famille, celle des enfants d’un même Père. Quand nous sommes seuls pour prier, nous pouvons toujours suivre le même schéma que pour une prière communautaire, bien que l’esprit qui préside à la prière ne soit plus nécessairement aussi précisé que dans une réunion de prière.
C’est toujours sous le signe du Dieu Trinité que nous nous plaçons pour nous mettre en état de prière, et c’est aussi en nous mettant à l’ombre de la croix de Jésus que nous entrons dans la prière, c’est également en nous laissant porter par l’Esprit-Saint que nous pouvons entrer en dialogue avec le Dieu-Père.
Même dans la solitude, nous devons apprendre à faire silence en nous-mêmes : les soucis du monde nous accablent souvent, les ennuis personnels nous tenaillent... Nous les portons devant Dieu. Mais il faut apprendre à les faire taire pour nous mettre en présence de Dieu : il sait nos soucis, il connaît nos ennuis avant même que nous ne les lui disions.
Faisons donc d’abord silence : comment écouter Dieu nous parler, si nous ne lui laissons pas placer un mot. Ayant fait silence, nous pouvons entendre sa Parole. Nous ne pouvons pas prier Dieu si d’abord nous ne nous mettons pas à son écoute, en nous souvenant que c’est lui qui nous a aimés le premier, en nous souvenant qu’il nous précède toujours. C’est alors que les soucis qui sont les nôtres peuvent être présentés devant le Père. Mais il ne conviendrait pas de transformer la prière chrétienne en prière entièrement égoïste, obligeant le Père à se soumettre aux désirs de l’un ou de l’autre de ses enfants. La prière est ouverte au monde des hommes. Elle est une demande adressée au Père pour que les hommes découvrent sa volonté et la mettent en pratique.
C’est pourquoi la prière du Seigneur devient le coeur de la prière individuelle : Que ta volonté soit faite, juste avant une conclusion sous forme de doxologie, de louange à la gloire de Dieu, ou sous forme de bénédiction, par laquelle le chrétien bénit Dieu et lui demande de répandre sur lui sa bénédiction.
Il est difficile de rentrer en contact, on n’a pas toujours l’impression d’être écouté. L’obstacle, c’est la peur : que va-t-il se passer ? que va-t-il demander ? Dieu nous pousse toujours en avant. Quand on prie, on est toujours renvoyé par les autres. Recevons cette prière d’un jeune enfant comme une suggestion pour la nôtre :
Pourquoi y a-t-il la vie ? Pourquoi nous sommes différents ? Pourquoi on doit mourir ? Tous ces pourquoi, je les garde en moi comme des trésors, je ne peux pas les oublier. C’est trop important de savoir. Je veux comprendre, je veux chercher. Seigneur, je te confie tous ces pourquoi qui trottent dans ma tête. Écoute mes questions, ouvre mes yeux et mes oreilles, Toi qui as envoyé ton Fils Jésus pour m’aider à comprendre, Toi qui me donnes l’Esprit pour m’ouvrir à la vérité.
On ne voit pas celui à qui on s’adresse dans la prière jusqu’au jour où on peut dire : Dieu est vivant à travers ce qui se fait sur la terre. Dieu est là avant nous, il propose son amour. La clé de la prière, c’est de croire que Dieu est présent qu’il nous accueille, qu’il attend notre confiance. Le Dieu d’amour ne peut vouloir que le bien et le bonheur pour chacun des hommes.
Alors, il est aussi bon et nécessaire de faire appel à l’expérience des autres priants, par exemple à la prière des Psaumes, qui présentent l’homme heureux comme celui qui sait entendre le murmure de la création :
Heureux l’homme qui ne prend pas le parti des méchants,
ne s’arrête pas sur le chemin des pécheurs
et ne s’assied pas à la table des impies,
mais se plaît à la Loi du Seigneur,
et récite sa loi jour et nuit !
Il est comme un arbre planté près des ruisseaux,
il donne du fruit en sa saison
et son feuillage ne se flétrit pas,
il réussit tout ce qu’il fait. Ps. 1
Pour le chrétien, Dieu est une personne vivante avec qui il peut entrer en relation, d’autant plus que son Fils s’est fait chair. Dès lors, le premier devoir du chrétien, c’est d’accorder du temps à Jésus, pour le connaître, lui, le Fils de Dieu, qui l’appelle à connaître sa propre vie. Le chrétien consacre du temps pour connaître son existence, les gestes qu’il a accomplis au cours de sa vie, l’enseignement qu’il a donné à ses disciples.
Il est remarquable que, quand Jésus monte à Jérusalem pour la dernière fois, il est accueilli par une parole qui est celle du psaume 118 : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Et, quand on y regarde de près, les psaumes sont construits comme le temps de la semaine sainte :
d’abord la louange, comme le dimanche des Rameaux
puis le cri de la détresse et de la mort, comme au Vendredi saint,
et puis de nouveau la louange, avec le Dimanche de la Résurrection.
S’il n’y a pas la louange d’abord, la mort n’a pas le caractère dramatique que lui donnent les psaumes et l’Evangile, notamment quand Jésus reprend la parole du psaume 22 : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Comme le Christ, le chrétien est un croyant qui a mis sa foi en Dieu, qui lui fait confiance comme un enfant peut faire confiance à son père. Dieu n’est pas une idée abstraite, il est une personne vivante avec qui il est possible d’entrer en relation, d’autant plus que le Fils unique a demeuré parmi les hommes. Mais durer devant Dieu n’est jamais facile. Il faut apprendre à organiser nos rendez-vous avec Dieu, en nous servant par exemple de la Bible.
Homme de dialogue avec Dieu dans la prière et homme présent au milieu des autres, le chrétien accorde à l’amour la place centrale dans sa vie. Il aime Dieu parce qu’il croit que Dieu l’a aimé en premier et que Dieu veut des hommes capables de construire un monde de justice et de paix. Le chrétien aime les autres hommes, parce qu’il les considère comme des frères...
Sous l’action de l’Esprit-Saint, la prière des chrétiens correspond entière aux vues de Dieu. Elle est devenue un coeur à coeur avec lui. Et cette intimité de l’homme avec Dieu et de Dieu avec l’homme est encore plus parfaite que toute intimité humaine, puisque Dieu habite alors le coeur de l’homme pour le diviniser entièrement : l’homme est alors totalement "fils de Dieu dans le Fils unique".
Ainsi, avant de chercher dans des livres des recettes ou des modèles de prières, prenons le temps d’ouvrir le livre des Écritures et d’ouvrir le livre de notre vie. C’est Dieu qui ne cesse de nous prier de le prier.