Les sectes

 

Introduction : lecture d'extraits de journaux

Régulièrement, les médias nous livrent des informations sur les sectes, et ces informations ne sont pas toujours réjouissantes.

La Vie du 3 Avril 1997

Après la découverte, le 27 mars 1997, des 39 morts de la secte WW Source supérieure à San Diego, on estime que, depuis vingt ans, environ 1100 personnes adeptes des sectes ont été assassinées ou se sont suicidées. Parmi les plus grands massacres, on se souvient des 912 victimes de la secte Jones en Guyane (novembre 1978) ou encore des 80 mors de la secte Waco au Texas (avril 1993) et des 74 victimes de l'Ordre du temple solaire depuis 1994.

Voix du Nord du 5 avril 1997

Un petit garçon de dix-neuf mois est décédé jeudi dans la communauté fondamentaliste Thabita's place à Sus (Pyrénées-Atlantiques), et ses parents, qui appartiennent à cette communauté dont les membres déclarent vivre conformément à la Bible, ont depuis lors été placés en garde à vue, L'enfant aurait souffert de déficience cardiaque depuis sa naissance mais n'aurait jamais été suivi médicalement. Il était en tout cas atteint de rachitisme et ne pesait que 4,5 kg.

Voix du Nord du 6 avril 1997

Les parents du jeune Raphaël Ginhoux, décédé jeudi dans une secte, ont été mis en examen et écroués à la maison d'arrêt de Pau. Le jeune enfant, âgé de 19 mois, est décédé par manque de soins et par malnutrition. A 19 mois, il était un cadavre ambulant de 4,5 kg et 75 cm. Les parents de l'enfant vivent dans la secte Tabitha's Place. La secte fondamentaliste, millénariste et apocalyptique n'accepte pas les soins médicaux extérieurs.

Analyse de ces communiqués de presse

Ces quelques entrefilets de la presse ne constituent pas des exceptions. Et il serait très intéressant de relire et d'analyser le court article de la Voix du Nord du 5 avril 1997.

Un petit garçon de dix-neuf mois est décédé jeudi dans la communauté fondamentaliste Thabita's place à Sus (Pyrénées-Atlantiques), et ses parents, qui appartiennent à cette communauté dont les membres déclarent vivre conformément à la Bible, ont depuis lors été placés en garde à vue, L'enfant aurait souffert de déficience cardiaque depuis sa naissance mais n'aurait jamais été suivi médicalement. Il était en tout cas atteint de rachitisme et ne pesait que 4,5 kg.

On remarque aussitôt que l'on ne parle pas de secte directement, mais de "communauté". C'est d'emblée reconnaître que le terme "secte" a une connotation péjorative ou tout au moins dévalorisante. Et les responsables des sectes n'hésitent jamais à entamer des procès devant les tribunaux civils à l'encontre de tous ceux qui, selon eux, les diffameraient, notamment en les qualifiant des "sectaires".

Le terme "communauté" est beaucoup plus valorisant, et fait référence à un vocabulaire d'Eglise, généralement bien reconnu dans tous les milieux sociaux. Cette communauté, dans l'article en question, est qualifiée de "fondamentaliste". Etymologiquement, ce terme n'est pas dévalorisant ; au contraire, il indique que la dite communauté s'attache à suivre uniquement les principes enseignés pas la Bible ; seulement, le fondamentalisme finit par prendre les enseignements bibliques au pied de la lettre, sans chercher à les interpréter ou à les éclairer par les acquis plus récents des recherches scientifiques ou même théologiques... 

Le suicide dans certaines sectes

A l'origine des sectes, deux convictions : le monde est complètement mauvais ; si les élus se suicident ils ressusciteront bientôt et établiront une société nouvelle. D'où les hécatombes du Temple solaire et la folie de la secte Aoun au Japon... C'est pourquoi il faut rester vigilant.

En 1978, au Guyana 918 membres du Temple du peuple se donnent la mort ou sont abattus sur ordre de leur gourou qui, lui-même, est retrouvé mort, une balle dans la tête. En 1993, le gourou de la secte des Davidiens se suicide avec 86 disciples dont 17 enfants, dans une ferme du Texas. En 1994, la secte Aoun commet un attentat au gaz mortel dans le métro de Tokyo, provoquant 12 morts et 5 500 intoxications. Toujours en 1994 se produit le suicide collectif, en Suisse et au Canada de 53 membres de l'Ordre du temple solaire. En 1995, la même scène se renouvelle avec la même secte, dans le Vercors, faisant 16 victimes.

A l'origine de ces actes de folie collective, deux convictions : il faut rompre avec un monde totalement mauvais, voire en précipiter la fin ; les suicidés ressusciteront bientôt et établiront une société nouvelle.

 Définition de la secte

Etymologie

Utilisé de façon péjorative et sans contenu précis dans le domaine religieux, le vocable "secte" peut provenir d'une double étymologie : ou bien, il provient du verbe "secare", qui signifie "couper" (et dans ce cas, il désigne un petit groupe qui a fait sécession d’un plus grand), ou bien, il provient du verbe "sequi", lequel signifie "suivre" (et dans ce cas, il désigne l’ensemble des disciples d’un maître hérétique).

De manière générale, cette double étymologie convient bien au phénomène. La secte est un mouvement organisé qui se sépare du reste de la communauté ; le sectaire, le membre de la secte, est celui qui suit un chef spirituel, un maître, un gourou.

Le vocable "Église" est toujours valorisant et toute secte se veut Église, taxant de secte les Églises qui ne répondent pas à son idéal. La secte s’oppose à l’Église et s’en distingue de plusieurs façons. Elle constitue un groupement contractuel de volontaires qui ont choisi, après certaines expériences religieuses précises, de s’agréger à d’autres qui ont fait les mêmes expériences.

Les sectes attirent généralement des défavorisés, mais les riches et les intellectuels peuvent aussi éprouver des frustrations dans des ordres autres qu’économiques.

Officiellement, dans un Etat de droit, comme la France, l'idéal de la laïcité se doit de respecter les convictions personnelles de tout individu, de tout citoyen. Dans un tel Etat, il n'est fait aucune distinction entre l'adorateur de l'oignon et celui qui croit à la résurrection du Christ : la théologie n'a aucune place dans l'observation que l'on peut faire de la secte et de ce que l'on peut pratiquer à l'intérieur d'elle. Tout ce qu'il est possible d'observer, c'est une organisation externe, même si cela est relativement malaisé, puisque le propre de la secte est aussi de se fermer sur elle-même, en évitant les contacts extérieurs.

Organisation interne

A l'origine et au sommet de l'organisation se trouve un gourou, un chef spirituel qui donne les directives. L'idéologie qu'il impose à l'ensemble des membres est coercitive, elle s'appuie en général sur une forme de terreur pour un au-delà : "si tu ne respectes pas les consignes, la règle, tu risques le pire pour ta vie présente et aussi pour ta vie future".

Pour que cette idéologie coercitive puisse fonctionner et donner son meilleur rendement, il est exigé une obéissance aveugle. Le membre de la secte se doit de suivre les prescriptions qui lui sont imposées sans chercher à comprendre.

Pour que cela se fasse dans les meilleures conditions possibles, le gourou recommande facilement une restructuration de la personnalité : celle-ci peut aisément s'obtenir par différentes techniques, comme un régime alimentaire qui connaît des carences dans l'apport vitaminique, comme des ruptures dans le rythme du sommeil, comme la répétition régulières de formules à connaître par coeur, comme les "mantras". L'enseignement qui est donné est alors entièrement répétitif.

Une autre caractéristique de la secte peut se trouver dans l'importance du groupe dans lequel le nouvel adepte se trouve accueilli, souvent avec beaucoup de chaleur.

Dans un groupe, on perd très facilement le contrôle de soi-même, surtout si ce groupe connaît l'enfermement dans ses structures, et s'il n'y a pas moyen d'entrer et de sortir librement, que ce soit physiquement ou intellectuellement, avec l'impossibilité de communiquer avec le reste du monde (téléphone, radio, télévision, presse).

Tout cela conduit à l'aliénation, au sens où celle-ci est une perte du sens critique et de la mise en dépendance en face d'un autre individu. Le membre de la secte perd alors tout son discernement pour s'en remettre complètement aux directives qui lui sont données.

L'enseignement fonctionne alors comme un conditionnement : l'enseignement du maître est un véritable outil de propagande : l'adepte ne peut plus penser par lui-même, il pense et dit ce que le gourou, ce que le groupe pense et dit. Enfin, la secte n'a pas de visées extérieures : tout ce qui peut appartenir à l'un ou à l'autre des membres appartient à la communauté (travail, revenus, héritages...).

Typologie des sectes

Certaines sectes sont d'inspiration chrétienne et se fondent sur une interprétation presque littérale de la Bible. Tout ce qui est dit dans la Bible contient un enseignement véritablement fondé qui dépasse même les données de la science actuelle : ce n'est plus l'esprit de la Parole de Dieu qui compte, mais la littéralité du mot tel qu'il est écrit.

Par exemple, certains Témoins de Jéhovah refuse de reconnaître le fait que la terre soit sphérique, puisqu'un psaume de la Bible affirme que Dieu a lancé le disque terrestre dans l'espace ! Elles reposent également sur ce qu'on appelle le "millénarisme" et deviennent alors apocalyptiques : la Bible nous annonce le retour du Christ pour un règne de mille ans sur la terre après la fin du monde. Alors certaines sectes n'hésitent pas à donner des dates précises pour la fin du monde et le retour du Christ. Parmi les sectes d'inspiration chrétienne : les Témoins de Jéhovah, les Antoinistes, les Mormons, mais il y en a beaucoup d'autres.

Il faut compter aussi avec les sectes d'origine orientale : le Mouvement pour la conscience de Khrisna, l'Eglise de l'Unification du christianisme mondial (Moon)... et aussi les nouvelles sectes, comme le New Age, l'Eglise de Scientologie, l'Ordre du Temple solaire... L'entraînement des adeptes peut se faire par la musique et les effets spéciaux, mais aussi par la consommation de drogues plus ou moins douces...

Dans la France de la fin du XXe siècle, deux couches successives de sectes se superposent.

La plus ancienne a son origine principale dans le terrain protestant ; elle est apparue en marge de celui-ci et en réaction contre lui. Elle comprend, dans l’ordre chronologique de leur naissance, les groupes suivants :

·      les mennonites,

·      les baptistes,

·      les quakers,

·      les irvingiens (ou catholiques apostoliques),

·      les néo-apostoliques,

·      les darbystes,

·      les mormons,

·      les adventistes,

·      les Témoins de Jéhovah,

·      les pentecôtistes,

·      les Amis de l’homme.

    On peut y ajouter les salutistes (Armée du salut).

 Ces mouvements continuent aujourd’hui de se répandre. Mais il est difficile, malgré plusieurs tentatives faites en ce sens par des chercheurs, de connaître l’importance statistique exacte de chacun de ces groupes. Les plus dynamiques d’entre eux, les Témoins de Jéhovah et les pentecôtistes, pourraient posséder chacun entre 120000 et 150000 membres en 1993.

Sous le nom de "secte", certains auteurs des années 1950 rangent des groupes tels que :

·      la Science chrétienne,

·      les Antoinistes,

·      les disciples du Christ de Montfavet,

·      les baha’is,

diverses sociétés théosophiques et même des Églises catholiques non romaines :

·      Église catholique libérale,

·      Église catholique française,

·      Église catholique gallicane.

 

Depuis 1968, une nouvelle vague sectaire a retenu l’attention et suscité des polémiques. On peut y ranger sept mouvements.

Les moonistes ou Église pour l’unification du christianisme mondial ou disciples de Sun Myung Moon constituent un groupe d’inspiration messianique ; ils se considèrent comme l’avant-garde d’une "nouvelle humanité" qui occupera la Terre, dans le bonheur et l’unité paradisiaque.

Originaire d’Inde, l’Association internationale pour la conscience de Krishna a pour fondateur Bhaktivedanta Swami Prabhupada (1896-1977), commentateur de la Bhagavad-Gitâ. Les adeptes vivent dans des communautés ou ashrams, pratiquent le yoga, sont astreints à un régime végétarien, n’usent d’aucune drogue ni d’aucun excitant, condamnent les relations sexuelles hors mariage, s’adonnent à l’étude des textes sacrés de l’hindouisme, à des travaux agricoles ou artisanaux, etc. Ils sont connus pour leur crâne rasé, leurs vêtements indiens, leurs danses accompagnées du chant Hare Krishna ...

La Mission de la Lumière divine du guru Mahara Ji , redénommée Centre élan vital depuis 1987, vient de l’Inde. Elle se propose de faire accéder ses adeptes à la connaissance spirituelle par la méditation. La confiance au "Maître parfait venu dans ce monde troublé pour enlever la souffrance" est essentielle à l’expérience en question, qui est d’ordre sensible. En Occident et depuis les années 1980, les disciples mènent une vie professionnelle et familiale normale, tout en pratiquant quotidiennement la méditation.

L’association Soka Gakkaï , fondée au Japon en 1951, se fonde essentiellement sur le dernier "sermon" du Bouddha. Son étude ainsi que l’invocation rituelle de son titre sont le chemin d’accès pour tout laïc à l’illumination.

L’association de Méditation transcendantale, originaire de l’Inde, se contente de prôner une méthode pouvant s’intégrer à n’importe quelle théologie ou philosophie. Introduite en Occident en 1960 par le Maharishi Mahesh Yogi, elle utilise la concentration sur un mantra pour transcender l’activité mentale ordinaire et permettre un état de conscience simple.

L'Eglise de scientologie vient des USA et a un Américain pour fondateur (L.R. Hubbard). Elle propose à ses adeptes de dépasser le stade ordinaire de la conscience de soi. Elle recourt à une théorie explicative du monde et de l’homme et à des techniques d’origines variées pour améliorer l’aptitude des croyants à traiter avec leurs semblables.

Né à la fin des années 1960 de la contre-culture religieuse américaine, le groupe aujourd’hui dénommé la Famille a connu plusieurs appellations successives, dont celle d’Enfants de Dieu. Son fondateur, David Berg, a doté la Famille de croyances qui ont évolué au fil des ans et d’une direction ferme. Rassemblés en colonies et en familles, ses adeptes (des jeunes exclusivement dans les débuts du mouvement) se livrent à un prosélytisme ardent. Ils y ont employé jusqu’à la séduction sexuelle (le flirty fishing ). Elle croit en une fin du monde imminente. Seuls survivront à ce cataclysme les pauvres, les populations du Tiers Monde en particulier, qui s’organiseront pour vivre sur une terre paradisiaque, sous la direction de la Famille.

L’économique dans les sectes

Dans la plupart des sectes anciennes, l’ascèse consistait surtout à abandonner des comportements jugés moralement répréhensibles et à s’abstenir d’un certain nombre d’habitudes dans les relations sociales, le costume, etc. Un tabou, d’intensité et d’extension variables, frappait aussi les excitants. Mais peu de groupes prônaient une diététique originale, la réduction du temps de sommeil ou du volume des repas, alors que plusieurs sectes nouvelles font entrer dans le genre de vie qu’elles préconisent certains éléments de l’ascèse traditionnelle des religions d’Extrême-Orient : temps de sommeil réduit, nourriture particulière (végétarisme), obéissance stricte, rupture avec la famille et avec les activités antérieures, etc. Néanmoins, cela n’est pas toujours le cas.

·      Les mouvements qui laissent leurs membres dans la société demandent en général à ceux-ci de subvenir par des dons périodiques aux besoins de l’organisation.

·      Dans l’Église de scientologie, les adeptes paient, suivant des tarifs officiels, les cours qu’ils suivent et les séances de tests auxquels ils se soumettent ; aucune autre éthique particulière en matière économique ne semble leur être imposée.

·      Dans les groupes dont les membres vivent en communauté, l’abandon des biens et de tous les revenus en faveur du trésor commun est de règle ; on y prône la réduction volontaire de la consommation individuelle.

La secte, qui pourvoit aux besoins essentiels, est souvent organisée de façon rationnelle dans son économie propre, de manière à s’assurer un rapport maximum du capital. Cela ne l’empêche pas de recourir à des quêtes, à la vente d’objets artisanaux fabriqués par ses membres, ces derniers représentant une main-d’œuvre à bon marché.

Les sectes ont aussi des entreprises, utilisant comme main-d’œuvre exclusive des membres du mouvement. Dans une telle formule, pauvreté individuelle et richesse collective vont de pair.

Les sectes en France

En France, une commission parlementaire s'est penchée sur le problème des sectes. Elle a cru pouvoir dénombrer dans le pays 172 sectes ou "organisations mères" et 800 groupes "satellites" avec 160000 adhérents et 100000 sympathisants.

Depuis 1983, date d'un premier rapport, le nombre des adeptes aurait augmenté de 60 % et celui des sympathisants de 100 %.

Il n'y a pas de secte sans radicalisme religieux et sans coupure avec la société.

En théorie, on ne naît pas dans une secte. On y entre : d'où la limitation des admissions et une tendance au secret. D'où aussi la surveillance étroite des membres les uns sur les autres, et éventuellement d'un chef charismatique sur tous, pour que chacun demeure dans la ligne de la communauté et, en quelque sorte, renouvelle constamment son adhésion.

Les sectes font du prosélytisme mais à doses limitées ; car contrairement aux religions, elles ne veulent par sauver l'humanité entière, ni transformer la société. Elles sont plutôt des lieux d'attente du jour prochain où Dieu changera radicalement le monde. Celui-ci étant réputé pourri, elles se définissent comme des groupes d'élus en opposition avec lui.

Au dix-neuvième siècle, on qualifiait de "secte" l'Armée du Salut, dont tout le monde admire aujourd'hui l'action caritative. De même, il n'y a pas lieu d'appeler "sectes" les mouvements pentecôtistes. Ils ne s'entourent pas de secret, ne constituent par des contre-sociétés et cherchent à toucher les masses.

Le danger des sectes

Une fois ces correctifs apportés, il existe bel et bien un danger des sectes et le discernement devient nécessaire, à partir de quelques critères.

Les sectes récentes retiennent de plus en plus l’attention. Le fait important à ce sujet tient à ce qu’elles n’inquiètent plus seulement les Églises et les milieux rationalistes mais aussi la police ou la justice – parfois saisies de plaintes –, les mass media et le monde politique lui-même.

Dès la fin des années 1970, des associations antisectaires se sont constituées, souvent autour de la défense de la famille.

Plusieurs questions doivent être posées face à un groupe suspect :

·      1. Entre les mains de qui réside le pouvoir ?

·      2. Le leader est-il tyrannique ou respecte-t-il les personnes ?

·      3. Comment fonctionne le groupe et quelle marge y est laissée à la liberté individuelle et à la nécessaire autonomie de la vie conjugale et familiale ?

·      4. D'où vient l'argent du groupe ? Comment est-il utilisé ? Comment peut-on contrôler cette utilisation ?

·      5. Enfin comment sont recrutés les adeptes ? Dans quelle mesure leur vie professionnelle et leur protection sociale sont-elles préservées ? Sont-ils tombés dans la dépendance financière du groupe auquel ils ont adhéré ?

Les autorités ecclésiastiques désapprouvent, certes, les croyances et les pratiques des sectes, les font étudier par des théologiens et procèdent à des mises en garde.

Parmi les reproches qui sont mis en avant, on ne retiendra ici que les plus fréquents. Les groupes en question useraient de méthodes déloyales de recrutement :

·      ils s’attaqueraient à des jeunes gens faibles ou en état de dépression ;

·      ils leur cacheraient les fins qu’ils poursuivent jusqu’à ce que les recrues aient pris un engagement difficilement réversible ;

·      ils auraient recours à des méthodes de "lavage de cerveau" et utiliseraient même la violence pour transformer leurs nouveaux adhérents en adeptes convaincus et en propagandistes ;

·      leurs idéologies et leurs pratiques provoqueraient des phénomènes de régression psychologique et intellectuelle chez leurs membres.

Ces groupes, en particulier ceux qui pratiquent la vie commune, attenteraient à la liberté physique de leurs sectateurs ;

·      ils les affaibliraient physiquement, par le régime de sommeil, d’alimentation, de travail, pour mieux les manipuler psychologiquement.

·      Ils se proposeraient des fins économiques et politiques occultes et inavouables : certains entretiendraient même des rapports financièrement profitables avec les services secrets américains. En même temps, on leur reproche de dépolitiser leurs fidèles.

L’hostilité à l’égard des sectes vise essentiellement deux points :

·      d’une part, la rupture qu’elles provoquent entre leurs jeunes adeptes et les familles de ces derniers ;

·      d’autre part, le caractère exclusif de l’adhésion qu’on doit apporter à leurs idées et à leur genre de vie.

Les sectes guérisseuses, comme celle du "Christ de Montfavet", se voient reprocher, spécialement lorsque des enfants sont en cause, leur refus des soins médicaux. Avec moins de violence et moins souvent, les Antoinistes sont parfois accusés de charlatanerie en matière de santé. Aux Témoins de Jéhovah, on fait grief de refuser le service militaire, ainsi que tout service de remplacement, et de s’opposer aux transfusions sanguines.

Si on ne peut rencontrer librement les adeptes d'un groupe en dehors du groupe, il y a lieu de se méfier.

Le rapport parlementaire de 1996 cite 57 groupements qui, en France actuellement, coupent en fait les personnes de leur entourage à cause du temps consacré à la secte, à ses rites et ses croyances.

L'Eglise de scientologie est par ailleurs stigmatisée parce qu'elle recourt à des pratiques de déstabilisation mentale par les tests dits de personnalité.

D'autres groupes sont accusés d'affaiblir l'individu en lui imposant une discipline très rigoureuse ou de réduire son esprit critique en l'astreignant à des actes ou des prières répétitifs afin d'obtenir sa complète obéissance.

L'embrigadement des enfants serait pratiqué dans 28 mouvements.

82 sectes feraient courir à leurs membres le danger d'atteintes à l'intégrité physique par mauvais traitements, agressions sexuelles, etc.

Près de 51 organismes sont pointés du doigt parce qu'ils détournent les circuits économiques en recourant au travail clandestin et à diverses fraudes.

Enfin, des sectes telles que Moon, l'Eglise de scientologie sont de redoutables puissances financières.

Le sentiment de la plupart des spécialistes et observateurs en France est qu'il ne faut pas créer une législation antisectes, qui pourrait être détournée de son but, mais appliquer beaucoup plus rigoureusement que par le passé l'arsenal juridique disponible contre l'escroquerie, l'exercice illégal de la médecine, l'abus de faiblesse et l'abus de vulnérabilité.

Surtout, il faut comprendre d'où vient l'engouement actuel pour les sectes.

Il a sa source dans la fragilisation des individus, liée, elle-même, à la crise des valeurs et des religions traditionnelles et à une perte de confiance dans la science. L'essor des sectes est inséparable de la situation de souffrance, de frustration et de solitude dans laquelle se trouvent beaucoup de nos contemporains. Ce diagnostic suggère dans quelle direction chercher le remède : il faut redonner une âme à la société.