Le livre saint d'Israël : la Bible

La première source de la connaissance de la religion d'Israël se trouve dans la Bible. Or, en proposant la Bible comme un seul livre, on risque de se faire illusion : il ne s'agit pas d'un livre, mais d'une véritable bibliothèque. En grec, ta Biblia : les livres. Et cette bibliothèque peut paraître assez déroutante ; on y trouve des récits historiques, qui ne sont guère intéressants pour la connaissance du passé de l'humanité, des récits d'une morale qui n'est pas toujours très édifiante, des guerres, des meurtres, des chants de joie et des chants de peine. La Bible est autre chose qu'un livre, elle est surtout l'aventure d'un peuple dévoré par la recherche de Dieu : chaque écrit apparaît comme une sorte de condensé de cette expérience passionnante qui est interprétée par un rapporteur qui donne le sens des événements relatés, ou du moins qui tente d'apporter une signification à chaque fait de l'histoire du peuple, puisque l'interprétation doit toujours être reprise aussi longtemps que l'histoire se poursuit. Ainsi, un même événement sera raconté plusieurs fois dans la Bible, et les différents rapporteurs lui donneront des sens parfois différents : leur vision des faits passés s'éclaire d'une lumière nouvelle dans les développements de l'histoire du peuple, et aucune interprétation ne peut être définitive.

Les livres dont se compose la Bible se présentent dans un certain ordre qu'il faut connaître si l'on veut se retrouver facilement dans cette vaste bibliothèque, qui fait partie du patrimoine de l'humanité. D'ailleurs, les textes sacrés de la religion d'Israël sont devenus aussi les textes sacrés du christianisme, et on les appelle alors Ancien Testament. Ce terme de "Testament" n'a pas la signification qui lui est donnée habituellement, mais il désigne l'alliance que Dieu a passée avec son peuple par l'intermédiaire de Moïse. Et l'Ancien Testament s'oppose au Nouveau, qui désigne l'alliance établie en Jésus-Christ. Dans les traductions françaises les plus courantes, la Bible présente ces deux versants, vraisemblablement parce qu'en Occident la religion la plus répandue est le christianisme. Aussi ne faut-il pas s'étonner si le classement, l'organisation des livres n'est pas identique dans les Bibles chrétiennes et dans la Bible hébraïque. L'Occident a hérité d'une classification qui n'est pas originaire, mais qui dépend de la littérature grecque, avec son souci d'histoire. La traduction oecuménique de la Bible, qui commence à faire autorité depuis sa publication en 1975, a adopté l'ordre de la Bible hébraïque, même si cette organisation change quelque peu les habitudes des lecteurs chrétiens des différentes confessions.

Organisation de la Bible hébraïque

LA LOI, LA TORAH

C'est la base d'un statut juridique pour le peuple d'Israël, et l'enseignement de Dieu (Torah signifie : enseignement, tradition) dirige les aspects pratiques de la vie quotidienne : le culte, les règles de conduite morale, les exemples à suivre ou à proscrire. Dieu inculque une certaine sagesse à son peuple. Cet ensemble comprend cinq livres :

LES PROPHÈTES, LES NEEBIIM

C'est la révélation de Dieu qui s'opère, en se tournant vers l'avenir : le prophète est appelé par Dieu pour transmettre sa pensée, pour parler en son nom au peuple, s'opposant ainsi parfois au pouvoir politique en place. Il demande aux membres du peuple d'étudier la Loi, source et fondement de toute vie religieuse.

Un sous-classement a été effectué selon la longueur des textes entre les "premiers prophètes" et les "derniers prophètes" :

Les premiers prophètes :

Les derniers prophètes :

LES ÉCRITS, LES KETUBIM

C'est un recueil assez hétéroclite, avec des livres historiques, des livres de sagesse, des écrits narratifs, du lyrisme liturgique.

Telle était la présentation de la Bible hébraïque au premier siècle mais les synagogues grecques disposaient de textes supplémentaires : le Siracide, le livre de Judith, Tobie, la Sagesse de Salomon, le livre de Baruch.

Organisation de la Bible grecque

Il est convenu d'appeler " Bible grecque " la Bible telle qu'elle a été traduite au troisième siècle avant Jésus-Christ : elle est également dite " Bible des Septante " en raison des soixante-dix traducteurs du texte en langue grecque pour les Juifs de la Diaspora. Cette Bible comprend, dans un ordre qui varie selon les manuscrits : les livres de la Bible hébraïque traduits en grec, avec des variantes des omissions ou des additions et des livres qui n'entraient pas dans le texte de la Bible hébraïque, mais qui étaient utilisés dans les synagogues de la Dispersion des Juifs dans le monde. L'organisation de cette bibliothèque est quelque peu différente et elle a beaucoup été utilisée par les traductions chrétiennes :

LE PENTATEUQUE

C'est l'ensemble des cinq livres (penta = cinq) qui composent la Torah :

LES LIVRES HISTORIQUES

LES LIVRES POÉTIQUES

auxquels s'ajoutent les textes deutérocanoniques :

LES LIVRES PROPHÉTIQUES

Ils comprennent les douze petits prophètes :

à côté des autres prophètes, considérés comme grands en raison de la longueur de leur livre :

et un prophète deutérocanonique :

La numérotation en chapitres et versets

Afin de pouvoir repérer facilement un passage à l'intérieur de la Bible, l'ensemble du texte a été divisé en chapitres, et chacun de ces chapitres est lui-même subdivisé en versets : ainsi, chaque phrase est numérotée. Cette numérotation en chapitres et versets n'a d'ailleurs qu'un simple intérêt pratique.

Pour désigner les livres, on utilise des abréviations. Le tableau ci-dessous en donne la liste alphabétique :

Ab           Abdias 

Ag           Aggée 

Am          Amos  

Ba           Baruch 

1 Ch        1 Chroniques 

2 Ch        2 Chroniques 

Ct            Cantique des cantiques 

Dn           Daniel 

Dt            Deutéronome 

Esd          Esdras 

Est           Esther 

Ex            Exode 

Ez            Ezéchiel 

Gn           Genèse 

Ha           Habaquq 

Is (Es)      Isaïe (Esaïe) 

Jb            Job 

Jdt           Judith 

Jg            Juges 

Jl             Joël 

Jon          Jonas 

Jos          Josué 

Jr            Jérémie

 

Lm            Lamentations

Lv             Lévitique

1 M            1 Maccabées

2 M          2 Maccabées

Mi            Michée

Ml           Malachie

Na            Nahum

Nb            Nombres

Ne            Néhémie

Os            Osée

Pr             Proverbes

Ps             Psaumes

Qo            Qohélet - Ecclésiaste

1 R           1 Rois

2 R           2 Rois

Rt             Ruth

1 S           1 Samuel

2 S           2 Samuel

Sg            Sagesse

Si             Sirac - Ecclésiastique

So            Sophonie

Tb            Tobie

Za            Zacharie

 

 

Ainsi, le système d'abréviation et de référence et de plus en plus couramment utilisé : de la sorte, 1 R 19, 9-14 désigne le premier livre des Rois, chapitre 19, versets 9 à 14 compris. Parfois, certains versets sont assez longs : on utilise alors des lettres minuscules pour subdiviser ce verset : Ex 20, 11 b désigne la deuxième partie du verset 11, au chapitre 20 du livre de l'Exode.

La composition de la Bible

Ainsi qu'il vient d'être dit, la Bible existe en deux versions : la version palestinienne, dont le contenu, le canon, a été définitivement fixé vers l'an 100 de l'ère chrétienne, au synode de Jamnia, et la version alexandrine écrite en grec au deuxième siècle avant Jésus-Christ, qui est appelée la Septante. Cette dernière est entrée dans le canon chrétien et contient quelques livres récents qui n'existent pas dans la Bible hébraïque. Le canon Juif comprend trois sections : la Loi (la Torah), les Prophètes (les Nebiim) et les Écrits (les Ketubim), dont il convient d'expliciter le contenu :

LA LOI

La Loi en hébreu s'appelle la Torah, c'est-à-dire l'enseignement, la tradition. C'est un ensemble de cinq livres, de cinq rouleaux, d'où le nom que les chrétiens lui ont donné : "Pentateuque".

Cet ensemble est formé de toutes les codifications Justifiées par toute l'histoire du peuple. Longtemps, la tradition juive a vu en Moïse le responsable de cette oeuvre de la Loi. Mais, on s'est aussi aperçu que les cinq rouleaux ne formaient pas une unité absolue : les récits qu'ils présentent sont variés et leur rassemblement en une collection unifiée ne s'est fait qu'après le retour de l'exil à Babylone.

La Genèse relate la préhistoire de l'humanité, dans ses chapitres 1 à 11 : création du monde, vie au paradis terrestre dans le Jardin d’Éden, la chute, le déluge, la descendance de Noé, la tour de Babel, puis ce livre présente l'histoire des Patriarches, les ancêtres du peuple d'Israël : Abraham, Isaac, Jacob et ses douze fils. L'Exode présente, comme son nom l'indique, la sortie du peuple de la terre d’Égypte, sous la conduite de Moise, puis l'alliance de Dieu avec son peuple sur le mont Sinaï. Les Nombres contiennent le dénombrement du peuple durant le séjour au désert et des récits retraçant la vie de ce peuple en migration et les prescriptions qui découlent de cette situation errante. Le Lévitique, ou livre des Lévites, rassemble une foule de prescriptions surtout rituelles mais aussi morales. Le Deutéronome, c'est-à-dire la deuxième loi, se présente comme un discours de Moise aux tribus d'Israël, juste avant l'entrée dans le pays de Canaan, la Terre Promise. Moïse, vieillissant, rappelle la façon dont Dieu a guidé la vie de son peuple et les principales prescriptions qu'il lui a fixées pour vivre dans son alliance ; ce livre s'achève sur la mort de Moïse.

Ces cinq livres semblent bien s'enchaîner les uns aux autres en une suite d'événements des origines du monde jusqu'à la mort du grand législateur du peuple qu'était Moïse. Mais, beaucoup plus qu'une histoire, ils sont perçus comme une loi pour Israël : cette Torah donne une structure au peuple, réglemente sa vie sociale, et elle est en fait la base même de la vie d'Israël. En effet, le don de la Loi n'est pas un phénomène isolé, mais il s'inscrit dans le dessein de Dieu, dans le plan qu'il trace pour son peuple au long d'une histoire : c'est ce qui explique le mélange très apparent des récits et des textes législatifs dans le livre de la Torah. Mais ce mélange de deux genres littéraires différents n'est pas le seul trait caractéristique des cinq rouleaux. D'autres traits apparaissent au cours d'une analyse un peu plus poussée. Ainsi, on remarque très rapidement l'existence de doublets : les deux premiers chapitres de la Genèse, par exemple, présentent deux récits de la création très différents. On remarque aussi une alternance des noms divins : Elohim et YHWH ; les patriarches utilisent des noms comme Elohim, El Shaddaï, noms qui précèdent la vocation de Moïse. On peut aussi remarquer des alternances dans la désignation de l'ancêtre du peuple : Jacob, Israël, l'identification des deux noms se faisant dans la lutte de Jacob avec l'ange (Gn. 32, 23-33). Le livre du Deutéronome prend une tournure très originale par son style oratoire ainsi que par le fait qu'il incorpore des codes législatifs précédents sans les nier, ni les détruire. Tout cela montre que la rédaction de la Torah est particulièrement complexe.

D'ailleurs, les Anciens et particulièrement les Sémites n'avaient pas la même conception de la propriété littéraire que celle qui est partagée aujourd'hui dans le monde occidentalisé : tout écrit était le bien de la communauté qui pouvait apporter des modifications au texte pour maintenir une meilleure présentation de la réalité et de l'adapter aux besoins de l'époque. Les textes, venus la plupart du temps d'une tradition orale, ont été sans cesse remaniés au cours des âges, et les exégètes admettent, de manière courante, que la Torah est une oeuvre en cinq volumes, mais à partir de quatre documents d'époques différentes, à partir du dixième siècle parce que c'est à ce moment qu'ont été écrits les premiers ensembles littéraires et que c'est aussi à cette époque que le peuple commence à relire son histoire présente à la lumière des événements du passé.

Avec David et Salomon, la tradition orale des tribus s'installe aussi dans une littérature écrite, grâce à la chancellerie royale : un premier document se compose, c'est la tradition yahviste ou judéenne (qui est désignée par la lettre J). La cour de Jérusalem et le Temple constituent les éléments essentiels dans cette composition d'une histoire sainte. Mais après le grand règne de Salomon, c'est la séparation des tribus du Nord d'avec celles du Sud. Le Nord a conservé des traditions orales tribales et des sanctuaires plus anciens que Jérusalem, tel le sanctuaire de Sichem. C'est là que naît un nouveau document, lié au décalogue et aux codes législatifs de l'alliance ; c'est la tradition élohiste (qui est désignée par la lettre E) composée à la fin du neuvième siècle ou au début du huitième. Ce document E offre bien des similitudes avec le document J : Dieu est appelé, dans l'un, El ou Elohim, et, dans l'autre, YHWH. La tradition élohiste est née, non plus dans l'entourage royal, mais dans un milieu qui connaît le prophétisme d'Élie et d'Élisée, dont l'idéal est d'en revenir à Moïse, le grand prophète initiateur du peuple qui a donné une loi à Israël. Le Deutéronome, qui constitue en lui-même tout un document (désigné par la lettre D), est très proche du document élohiste. En 722, c'est la ruine de Samarie et l'annexion des provinces du Nord à l'Assyrie. Des réfugiés du Nord viennent s'installer à Jérusalem, et on aurait alors construit une cité de réfugiés que les prophètes vont appeler du vocable de "fille de Sion". Sous Ezéchias, aux environs de l'an 700, il est probable que les réfugiés aient tiré la leçon des événements de la catastrophe nationale et aient fait des plans d'avenir. A ce moment-là, le seul héritier des traditions élohiste et yahviste, c'est Jérusalem : dès lors, l'histoire sainte yahviste est complétée par des éléments élohistes, et les réfugiés essayent de mettre en oeuvre des codes législatifs. C'est là qu'il est possible de discerner une première ébauche de synthèse deutéronomique, juste après la fusion des traditions de J et de E. En 622, un livre est trouvé dans le Temple, il présente un code qui va être mis en application, servant de base à la réforme de Josias :

La dix-huitième année de son règne (celui de Josias) le grand-prêtre Hilqiyahou dit au secrétaire Shafân : J'ai trouvé le livre de la Loi dans la maison du Seigneur... Puis, le secrétaire Shafân annonça au roi : Le prêtre Hilqiyahou m'a remis un livre. Shafân en fit la lecture devant le roi. Lorsque le roi eut entendu les paroles du livre de la Loi, il déchira ses vêtements. Puis, il donna cet ordre au prêtre Hilqiyahou au secrétaire Shafân : Allez consulter le Seigneur pour moi, pour le peuple, pour tout Juda au sujet de ce Livre qui a été trouvé ; car elle est grande la fureur du Seigneur qui s'est enflammée contre nous parce que nos pères n'ont pas écouté les paroles de ce livre et n'ont pas agi selon tout ce qui y est écrit... (2 R 22, 3-13).

Alors, on incorpore l'ancien code deutéronomique au Deutéronome autour duquel on place des discours d'exhortation à la pratique de l'enseignement présenté dans le Livre de la Loi. Jérusalem est détruite en 587-586. Après cette ruine, les prêtres auront le souci de regrouper toutes les traditions, en leur donnant une lumière nouvelle dans la situation difficile de l'exil. Un nouveau document prenait corps, le document sacerdotal (qui est désigné par la lettre P, initiale du terme allemand "Priestercodex" ou "livre des prêtres"). Ce document sera fusionné avec J et E au début du quatrième siècle ; on lui ajoute alors un certain nombre de lois additionnelles (désignées par P'). Cette activité de constitution de la Torah, sous forme de cinq livres ou rouleaux, est très certainement due à Esdras. Celui-ci a été chargé par le roi perse Artaxerxés II de donner une loi aux juifs. Cette mission d'Esdras est rapportée au livre qui porte le nom de ce scribe des paroles ordonnées par le Seigneur (Esd. 7) eut lieu vraisemblablement en 398. La Torah était alors constituée.

TABLEAU DE LA COMPOSITION DU LIVRE DE LA TORAH

Israël (Sichem)

(E)

722 : ruine de Samarie

David

Salomon (début de J)

 

 

Juda (Jérusalem)

(J)

 

fusion du Nord et du Sud

(J - E)

Ezéchias (vers 700) (début de D)

Josias (622 : dans le Temple)

(D)

 

 

586 : ruine de Jérusalem

Pendant la captivité (P)

398 : mission d'Esdras (Ps)

 

 

TORAH

 

LES PROPHÈTES

La deuxième partie du canon Juif s'intitule "les Prophètes", les Nebiim ; elle comprend deux sections : les "premiers prophètes" et les "derniers prophètes". La première section constitue un ensemble historique, qui débute à l'installation dans le pays de Canaan, après la mort de Moïse, grâce à Josué, et qui se termine avec la chute de Jérusalem en 586. La seconde section comprend les textes prophétiques proprement dits : ce sont des discours prononcés par ces hommes que l'on nomme prophètes et qui reflètent les questions qui se posent à l'époque de leur prédication.

Le livre de Josué se présente comme la narration de la conquête de la Terre Promise sous la conduite de Josué, le successeur direct de Moise, puis comme le partage de l'ensemble du pays de Canaan entre les tribus d'Israël. Ce livre se termine par une assemblée générale du peuple à Sichem, au cours de laquelle Josué rappelle l'ensemble de l'oeuvre de YHWH, depuis Abraham Jusqu'à l'installation en Terre Promise, afin de souligner l'importance du choix que le peuple doit faire entre YHWH et les autres dieux. Ce livre unifie les traditions les plus anciennes depuis le passage du Jourdain Jusqu'au renouvellement de l'alliance, ce pacte conclu devant Dieu, avec un serment fait en commun.

Dans le livre des Juges, ces hommes suscités par Dieu pour sauver les membres du peuple de toutes les situations de détresse, entre la mort de Josué et l'avènement de Samuel, les souvenirs rapportés se rapprochent du genre historique. La vie du peuple, au moment de son installation dans la Terre Promise, s'était étroitement mêlée à celle des occupants du sol, les Cananéens, au point que le peuple abandonnait progressivement son Dieu pour servir les faux dieux. Le livre des Juges veut montrer que le peuple a connu des défaites à cause de sa désobéissance. Dans sa détresse, il a crié vers Dieu qui, ému, lui a envoyé des Juges pour rétablir les situations compromises, pour effectuer la libération du peuple, un peu à la manière de Moïse. Ce livre évoque donc la grande anarchie qui pouvait exister à l'époque de l'installation et du partage du pays après sa conquête.

Les livres de Samuel ne formaient à l'origine qu'un seul livre écrit sur des rouleaux d'une longueur à peu près identique. Ils présentent une succession d'événements qui vont conduire à l'instauration de la royauté en Israël, après la prise de Silo. Longtemps, la rédaction de ces livres a été attribuée au prophète Samuel, mais il faut remarquer que celui-ci ne tient une place importante que dans les quinze premiers chapitres. Samuel, consacré à Dieu dès son plus jeune âge, est dépeint comme un Juge, comme un libérateur du pays, auquel les Israélites Réclament un roi pour lui succéder. D'abord, Samuel refuse, puis, il finit par sacrer roi Saül. Celui-ci ne suit pas les ordres de Dieu. Aussi sera-t-il rejeté au profit de David qui reçoit, en secret, l'onction royale. Entré à la cour comme ménestrel, il finit par s'attirer la Jalousie de Saül, notamment après sa victoire sur le géant des Philistins, Goliath. Alors que David s'est enfui de sa cour, Saül et son fils, Jonathan, tombe dans une bataille contre les Philistins. Et David est consacré roi de Juda, tandis qu'un autre fils de Saül est fait roi d'Israël. Finalement, les tribus du Nord qui constituent Israël, se rallient à David, qui connaît un règne glorieux, avec la prise de Jérusalem dont il fait sa capitale.

A travers le règne de David, l'historien veut montrer que le projet de Dieu se réalise et s'achève, si bien qu'à mesure que l'on approche du règne de Salomon, l'histoire apparaît comme une chronique écrite par un contemporain.

Les livres des Rois rapportent l'histoire des rois de Juda et d'Israël, de la mort de David jusqu'à l'exil à Babylone. C'est d'abord le règne de Salomon qui témoigne de la sagesse de Dieu qui lui est accordée, qui organise l'ensemble du royaume, qui édifie des constructions remarquables, tel le Temple de Jérusalem. Les débuts de Salomon semblent augurer d'un enthousiasme débordant, mais bientôt le climat change, car Salomon se laisse entraîner vers des cultes païens, et le prophète Ahiyya annonce le schisme qui va se produire entre les tribus du Nord et celles du Sud, après la mort de Salomon. Et cette séparation politique entre les tribus va se doubler d'un schisme religieux, condamné par les prophètes. La succession des rois dans chaque clan s'interrompt pour laisser place à celui qui semble véritablement inaugurer le courant prophétique : Élie, puis son disciple immédiat Élisée. Les prophètes interviennent directement dans la vie politique pour rappeler aux rois la fidélité à YHWH. Mais leur parole n'est guère entendue, et c'est la ruine du royaume du Nord, avec la prise de Samarie, qui conduit à faire réfléchir le peuple sur son infidélité à l'alliance avec Dieu. Le règne d'Ezéchias est alors particulièrement souligné, en raison de sa fidélité religieuse. Mais l'impiété ne tarde pas à reprendre force et vigueur. Et la réforme entreprise par Josias, à la suite de la découverte dans le Temple du Livre de la Loi, n'empêchera pas la ruine du royaume du Sud. Jérusalem tombe entre les mains de Nabuchodonosor, et c'est la déportation en Babylonie.

L'ensemble des livres de Samuel et des Rois constitue véritablement un ouvrage prophétique, car ils soulignent que les prophètes sont les acteurs réels de l'histoire. Aussi ne faut-il pas chercher dans ses livres une histoire rédactionnelle des événements, telle que l'on peut l'imaginer au vingtième siècle. Il s'agit d'une histoire providentielle, commandée par le dessein de Dieu sur son peuple, et finalement dirigée par l'activité prophétique. La période royale a constitué la faillite politique du peuple d'Israël, mais, dans le même temps ce peuple est à l'origine d'une grande recherche mystique qui permettra à des hommes de se lever pour réclamer de la part de leurs contemporains un retour à la fidélité à l'alliance conclue avec Dieu, au moment de l'Exode.

Ces hommes sont les prophètes, et particulièrement ceux que la Bible hébraïque désigne comme les "derniers prophètes". Ils se considèrent comme les dépositaires et les garants de tout le patrimoine du peuple en face de Dieu. Dans l'ancien Orient, le phénomène prophétique est lié à la divination. C'est une tentative de l'homme pour interroger la divinité sur les affaires de la cité. La Grèce, la Syrie, la Mésopotamie, l’Égypte... connaissent toutes ce phénomène de divination : c'est un fait culturel dont l'interprétation est souvent ambiguë.

Le prophète, le "Nabi" est, avant tout, un prédicateur et non pas un écrivain : aussi l'essentiel de leur témoignage a-t-il été écrit par leurs disciples qui ont organisé leur message, en l'adaptant parfois aux situations nouvelles. C'est ce qui explique la difficulté à restituer la prophétie singulière dans son originalité première. Le Nabi, c'est celui qui est appelé par YHWH et qui devient son "parleur", son porte-parole. Il n'est en aucune façon celui qui annonce l'avenir. Il rappelle sans cesse au peuple qu'il lui revient d'observer dans toute son intégrité la Loi que Moise a donnée au nom de YHWH : et le contenu de son message passe par une prédication, bien plus que dans une prédiction.

Certes, la plupart des prophètes font des prédictions, dont la réalisation peut être prochaine ou plus lointaine, notamment en ce qui concerne la venue du Messie, l'Envoyé de Dieu... Mais il arrive très souvent que les prophètes se trompent dans leurs prédictions, ou que celles-ci soient très difficiles à vérifier... Ce qu'ils demandent au peuple de comprendre, ce n'est pas l'événement qu'ils peuvent annoncer, mais bien plus la signification spirituelle de l'alliance de Dieu avec son peuple, qui se renouvelle sans cesse dans le cours de l'histoire.

L'ordre dans lequel la Bible présente les différents livres prophétiques tient à la longueur de ces textes, les plus longs apparaissant en premier. De plus, cet ordre n'est pas chronologique. Toutefois, afin de présenter brièvement chaque écrit prophétique, il convient de suivre l'agencement des textes bibliques.

Le livre d'Isaïe n'est dû qu'en partie à ce prophète dont le ministère s'est exercé dans la seconde moitié du huitième siècle. Il importe de distinguer les chapitres 1 à 39 des autres, en effet, les chapitres 40 à 55 sont nettement postérieurs (on les attribue au "Second Isaïe") et les chapitres 56 à 66 le sont encore davantage ("Trito-Isaïe"). La première partie de ce livre porte la marque du personnage de ce prophète qui intervient dans le royaume de Juda, pour annoncer la destruction presque totale de ce peuple, au coeur rebelle et endurci. Il veut éclairer le peuple et les rois du dessein divin qui va conduire le royaume vers la déportation, en raison de son infidélité à suivre la Loi. A la fin de l'exil se fait entendre un autre prophète, le "Second Isaïe" (ou Deutéro-Isaïe) : Israël est captif, entre les mains des Babyloniens, mais Babylone est menacée par Cyrus qui décrétera la délivrance des captifs. La mission du prophète sera de consoler le peuple de Dieu, en lui annonçant la fin du châtiment que YHWH lui avait infligé : on appelle parfois ce témoignage "livre de la Consolation d'Israël". Le Trito-Isaïe a été composé à un moment où le Temple de Jérusalem est reconstruit et où il revient au peuple de l'orner, mais toutes les promesses du temps de l'exil n'ont pas été réalisées, et le peuple est divisé en deux partis, ceux qui n'ont pas connu la déportation et qui, en demeurant dans la Terre, ont accepté des cultes étrangers (notamment les Samaritains) et ceux qui sont revenus de la grande déportation, comme les "humbles" serviteurs de Dieu. C'est dans ce climat troublé que Dieu fait entendre sa voix, par la menace et par la promesse.

Le livre de Jérémie recèle, outre les prophéties de celui-ci prononcées juste avant la déportation, une grande quantité de renseignements biographiques, collectionnés vraisemblablement par son secrétaire Baruch. La carrière prophétique de Jérémie s'étend sur plus de quarante ans, couvrant les règnes de Josias et des derniers rois de Juda. C'est Jérémie qui prépara la réforme religieuse entreprise par Josias : il annonce la ruine d'un monde perdu, il est envoyé pour arracher et démolir, et il annonce en même temps la naissance d'une communauté renouvelée, il est envoyé pour planter et bâtir, et c'est YHWH lui-même qui pourra purifier le coeur corrompu d'Israël : le malheur qu'il prépare pour Jérusalem pourrait être évité si tout le peuple acceptait de se convertir, en rejetant les faux dieux, en refusant d'écouter les faux prophètes qui ne reconnaissent pas, dans la captivité babylonienne, le signe de l'action divine. C'est en exil que vit le peuple, le centre de la nation n'est plus à Jérusalem, mais à Babylone, d'où sortira un peuple nouveau. La découverte de sa pauvreté radicale permettra au peuple de découvrir sa véritable richesse se trouve dans l'alliance avec Dieu, telle qu'elle a été formulée au Sinaï, et telle qu'elle peut être reprise et renouvelée au cours de l'exil.

Le livre d'Ezéchiel retrace la prédication de ce prophète aux juifs déportés en 596 : c'est à Babylone qu'il apprit la chute de Jérusalem en 586, catastrophe nationale qui marque un tournant dans l'histoire du peuple. Il ne s'agit plus pour le peuple de rêver à une puissance politique, mais de découvrir qu'il forme le peuple des "saints" de YHWH. Déporté en 598, Ezéchiel exerce son ministère prophétique durant la captivité, annonçant que la capitale doit subir le sort qu'elle a mérité. Mais, une fois que le châtiment est accompli, il entreprend de ressusciter l'espérance des exilés, en faisant entendre une promesse de salut.

Fort courts, les livres de ceux qu'on appelle les Douze petits prophètes ont sans doute été réunis en un seul rouleau pour des raisons pratiques.

Osée est le prophète de l'amour de Dieu, un amour bafoué par le peuple, mais un amour qui n'en demeure pas moins vivant et qui demande une réponse de la part de son peuple. Le symbolisme conjugal tient une grande place dans le livre d'Osée : le prophète a épousé une femme de mauvaise vie, sans doute une courtisane se livrant à la prostitution sacrée, qui lui donne des enfants de prostitution. Le prophète emmène son épouse infidèle au désert, ce lieu où Israël se laissait séduire par YHWH, pour rétablir des relations conjugales normales. La voix du prophète se fait entendre pour appeler le peuple à renouveler sa fidélité avec Dieu.

Le livre de Joël, un prophète dont on ignore tout, car aucune indication n'est donnée par le texte sur le cadre historique de son témoignage et sur la personnalité de Joël, développe deux thèmes étroitement liés entre eux. L'homme doit se dépouiller lui-même totalement pour préparer le "Jour du Seigneur". La première partie décrit une invasion de sauterelles qui frappe le peuple de Juda : cela doit l'entraîner au repentir et à la conversion. Moyennant cela, Dieu se laissera peut-être fléchir et au "Jour du Seigneur", tous ceux qui invoqueront le nom de YHWH seront sauvés.

Amos est le premier des prophètes "écrivains" : il est le premier prophète dont les discours sont rapportés dans un livre. L'essentiel de son message est une annonce de malheur, sa prédication se fait menaçante : il prophétise la chute d'Israël, il annonce l'imminence du jugement de Dieu. Dieu va visiter son peuple, mais cette inspection divine apportera le châtiment ; car, malgré les malheurs survenus précédemment, le peuple n'est pas revenu vers son Seigneur, la conversion n'est pas venue. L'annonce du Jour de YHWH va devenir le thème même du malheur : le peuple va être jugé. La finale, qui énonce un oracle de bonheur - mais qui est sans doute une addition des disciples du prophète - évoque l'attente de la promesse de Dieu : l'homme peut aspirer au bonheur que Dieu lui-même lui promet.

Le livre d'Abdias est le plus court de toute la Bible : il ne comporte qu'un seul chapitre de vingt et un versets. Mais cela ne signifie pas qu'il soit dépourvu de valeur. Alors que Jérusalem connaissait la défaite, le frère ennemi du peuple, Edom, descendant du frère de Jacob, Ésaü, en a profité pour s'emparer d'une partie du territoire. Le livre est donc quelque peu postérieur à la chute de Jérusalem. Au moment où tout semble perdu, le prophète a une vision : Edom s'effondrera en raison de sa cupidité et de sa trahi son, puis toutes les nations connaîtront également l'effondrement.

Le livre de Jonas se présente comme une légende prophétique. Plus qu'un recueil d'un enseignement, le récit présente l'histoire du prophète qui refuse d'abord d'obéir à l'ordre qui lui est donné par Dieu. Jonas s'enfuit dans la direction opposée à la ville de Ninive qu'il devait convertir : il devient cause de malheur pour tous ceux qui le fréquentent. Jeté à la mer, il est sauvé miraculeusement par un monstre marin dans le ventre duquel il passe trois jours et trois nuits. Après cet événement, le prophète obéit à sa mission, et il prêche la conversion à Ninive et toute la ville donne des preuves d'un changement de conduite, si bien que Dieu renonce à détruire Ninive, ce qui entraîne la colère du prophète qui réclame la mort. Le livre de Jonas se termine sans que l'on sache ce qu'il advient du prophète après sa prière.

Le livre de Michée, prophète contemporain Isaïe, présente un procès entre Dieu et son peuple. Si Jérusalem n'a pas encore connu le châtiment de Samarie, la sécurité n'est qu'apparente, car Dieu ne peut se contenter des moyens que le peuple a trouvés pour se faire pardonner : Dieu réclame la Justice, et son châtiment sera à la mesure de la révolte du peuple contre le Seigneur qui avait fait alliance avec lui. Mais Michée ne se présente pas comme un prophète de malheur : une place est accordée au relèvement de Juda et à la description des temps futurs.

Les trois chapitres du livre de Nahum célèbrent la chute de Ninive, ville qui prend une valeur de symbole : son châtiment est un exemple pour toutes les nations. Celles-ci sont des instruments dans les mains de Dieu, mais il ne les préserve pas de leur chute, quand il se décide à relever son peuple.

Le petit livre d'Habaquq s'en prend aux Chaldéens, c'est-à-dire aux néo-Babyloniens qui, ayant combattu la puissance assyrienne, se lancent à la conquête du Proche-Orient. En période de crise internationale, le prophète en appelle à son Dieu : il s'étonne du fait que YHWH ait pu permettre le triomphe d'ennemis si orgueilleux, au point que la foi en la souveraineté de Dieu sur le monde est mise en cause. La réponse de Dieu à l'appel de son prophète tient en un seul mot : fidélité, le Juste vit par sa fidélité (Ha. 2, 4). La fidélité de l'homme permet de comprendre la fidélité de Dieu qui est bien réelle malgré les apparences : Dieu a manifesté des preuves de sa fidélité dans le passé, et il vient encore pour se constituer comme la force de son peuple fidèle.

Sophonie s'élève contre le renouveau du paganisme parmi le peuple de Juda, durant la minorité du roi Josias : ses exigences feront de lui une sorte de précurseur de la réforme religieuse entreprise par ce roi. Les rédacteurs de son livre l'ont ordonnancé en trois parties : menaces contre le peuple de Juda, menaces contre les nations ennemies de ce peuple, et promesse d'un rétablissement. Le thème du "Jour du Seigneur" est le centre de toute sa prédication, ce jour devant être celui d'un bouleversement général, et même cosmique, il atteindra tous les hommes et constituera pratiquement une désintégration de la création. Pourtant, il ne s'agit pas d'une fin du monde, mais plutôt d'une transformation du peuple de Dieu qui sera délivré de son péché pour inaugurer une vie nouvelle, à partir du petit "Reste", de gens humbles et pauvres, (qui) chercheront refuge dans le nom du Seigneur (So. 3, 12).

Le message prophétique d'Aggée se situe à la fin de l'année 520, auprès des juifs revenus de Babylone pour reconstruire le Temple. Ce prophète essaie d'interpréter les signes des temps, et particulièrement la pauvreté du peuple : les mauvaises récoltes sont la punition infligée par Dieu à ceux qui sont revenus d'exil sans retrouver un zèle ardent. Il faut reconstruire le Temple sans tarder pour que la bénédiction du Seigneur puisse se répandre sur son peuple.

Zacharie est le contemporain d'Aggée dont il consolide le message, en soulignant l'amour ardent dont YHWH fait preuve à l'égard de son peuple. Toutefois, comme le livre d'Isaïe, le livre de Zacharie ne peut pas être attribué à un seul prophète. Si la première partie se rapporte très bien à la date de 520, la seconde partie (chapitres 9 à 14) provient d'un auteur plus tardif, que l'on appelle parfois le "Deutéro-Zacharie". Le message du premier Zacharie se compose de huit visions que le prophète eut dans la même nuit et annonce pour bientôt des temps meilleurs aux juifs revenus d'exil : la restauration se prépare, elle s'organise et elle va s'achever prochainement. Le prophète entrevoit un Messie qui apportera le salut à son peuple, mais aussi à toutes les nations. Le Deutéro-Zacharie se situe entre les années 330 et 300, au début de la période grecque, et il présente une description de la venue des temps messianiques : c'est Dieu lui-même qui réalisera le salut pour son peuple en le rassemblant, puis il intégrera à la communauté du salut toutes les nations païennes qui adopteront la Loi.

Le livre de Malachie est le dernier livre canonique de la Bible hébraïque. Malachie est un pseudonyme, il signifie "mon envoyé", ou encore "mon ange". Le peuple est rentré d'exil, le Temple est reconstruit, le culte a repris : tous ces indices, qui se trouvent dans le livre lui-même, permettent de situer ce message prophétique entre 480 et 460. Les espérances nées dans le peuple après Aggée et Zacharie ne se sont pas réalisées, le scepticisme s'installe, le découragement entraîne une régression de la foi. Malachie réagit et place chacun de ses auditeurs devant ses responsabilités envers le Seigneur et envers les autres hommes.

TABLEAU DE LA COMPOSITION 

DES LIVRES PROPHÉTIQUES 

EN REGARD DE L'HISTOIRE

 

Samuel (vers 1040)

Saül (vers 1030-1010)

David (vers 1010-970)

Salomon (970-931)

    séparation des douze tribus en deux royaumes

Israël 

Jéroboam (931-910) 

Nadab (910-909) 

Basha (909-886) 

Ela (886-885)

Zimri (7 jours en 885)

Omri (885-874)

Achab (874-853)                           Elie

Ochozias (853-852)

Joram (852-841)                             Elisée

Jéhu (841-814) 

Athalie (841-835)

Joachaz (814-798)

Joas (798-783) 

Jéroboam II (783-743)                  Amos (vers 750)

                                                       Osée (peu après Amos)

Zacharie (743)

Shallum (743)

Menahem (743-738)         

Peqahya (738-737)                    

Péqah (737-732) 

Osée (732-724)

        Prise de Samarie en 722 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Juda

Roboam (931-913)

Abiyyam (913-911)

Asa (911-870)

 

Josaphat (870-848)

 

 

 

Joram (848-841)

Ochozias (841)

Joas (835-796)

Amasias (796-781)

Ozias (781-740)               vocation d'Isaïe en 740

Yotam (740-736)      

Achaz (736-716)

                                           Michée

 

 

 

 

 

 

Ezéchias (716-687)

Manassé (687-642)

Amon (642-640)

Josias (640-609)    vers 630 : Sophonie

                                 627 : vocation de Jérémie

                                vers 622 : première rédaction

                                des livres de Josué, des Juges,

                                de Samuel, des Rois

                                vers 612 : Nahum

Joachaz (609)

Joiaqim (609-598)   vers 600 : Habaquq

Joiakin (598-597)

            Première déportation

Sédécias (597-586)           Jérémie, Ezéchiel

            586 : chute de Jérusalem et seconde déportation

                                 vers 550 : Deutéro-Isaïe 

            538 : édit de Cyrus et retour d'exil

            520-515 : reconstruction du Temple

                        Aggée, Zacharie, Abdias, Trito-Isaïe

             sous Xerxés et Artaxerxés (486-423)  

Malachie

             avant Alexandre (336)           Joël, Jonas

   

 

LES AUTRES ÉCRITS

Après la Loi, après les livres prophétiques, la Bible hébraïque présente une troisième collection de livres assez hétéroclites : aucun titre caractéristique n'a été attribué à cette collection, puisqu'on l'appelle simplement " les autres écrits ". Le livre des Psaumes se présente comme un recueil de cent cinquante chants liturgiques destinés au culte, avec un accompagnement musical d'instruments à corde. Comme le livre de la Torah, ce livre des Psaumes est divisé, vraisemblablement intentionnellement, en cinq parties, terminées chacune par une formule de bénédiction.

Ce livre est entièrement rédigé en vers, chacun Dieux se composant de deux membres (parfois trois) qui soulignent le rythme à partir de l'accent tonique, comme dans la poésie anglo-saxonne. Certaines analogies existent entre différents psaumes ; aussi a-t-on essayé de les regrouper dans des classifications qui relèvent toujours de la conjecture et de la probabilité, mais qui permettent de souligner certaines parentés entre ces cantiques. Ce sont d'abord des hymnes de louange, qu'ils soient cosmiques, historiques ou qu'ils invitent à l'acclamation pendant les marches des pèlerinages ; puis des prières individuelles ou collectives, comme les supplications des malades ou des pénitents, les cris des persécutés ou des exilés, comme les chants de confiance ou les actions de grâces ; on trouve aussi des psaumes qui mélangent plusieurs genres : chants de bénédictions, chants liturgiques, psaumes alphabétiques. Le contenu des psaumes permet aussi de souligner leurs différents genres : ils peuvent être à la gloire de la royauté, ils peuvent revêtir une tournure prophétique ou historique, ils peuvent aussi se présenter comme des enseignements de sagesse. La date de composition des psaumes est inconnue : longtemps, les exégètes les ont attribués à l'époque du règne de David, puis à l'époque du retour d l'exil, actuellement, l'opinion la plus répandue est que la majorité de ces chants religieux ont été composés avant l'exil à Babylone.

Le livre de Job traite, sous la forme du dialogue du problème du gouvernement du monde par Dieu, et plus particulièrement de la souffrance du juste. Il n'apporte pas de solution au problème du mal, mais il se présente comme une tentative de l'homme qui veut se situer en face de Dieu, alors qu'il connaît le désarroi le plus extrême. On suppose que ce livre a été composé, à partir d'une légende ancienne, à l'époque qui a suivi l'exil, alors que le peuple en venait à mettre en cause sa foi en la justice de Dieu.

Le livre des Proverbes rassemble une collection de sentences qui rappellent la littérature sapientielle de l’Égypte et de Babylone, La période royale, surtout celle de Salomon, parait avoir été propice pour la mise par écrit de ces sentences qui circulaient dans la tradition orale du peuple. Salomon lui-même est présenté comme l'initiateur de ce genre de littérature en Israël, de même que David était considéré comme l'inventeur de la littérature psalmique ou que Moïse se situait à l'origine de tous les codes juridiques. La mise par écrit de ces sentences s'est surtout faite dans les milieux de cour, parmi les scribes qui voulaient former des esprits cultivés, mais après l'exil, un travail de refonte de ces écrits s'est opéré, incorporant des textes des littératures voisines.

Un recueil est appelé les "cinq rouleaux" : ce sont cinq petits livres qui étaient lus habituellement dans les synagogues à l'occasion des jours de fêtes importants dans l'histoire du peuple : Cantique des cantiques pour la Pâque, Ruth pour la Pentecôte, Lamentations le jour de l'anniversaire de la chute du Temple, Qohélet pour la fête des Tentes, Esther à Pourim.

Le Cantique des cantiques est un recueil de poèmes d'amour au sujet duquel les avis sont très controversés. Alors que la Bible démythifie toute forme d'érotisme à l'endroit des pays voisins qui laissaient les dieux et les déesses présider les amours des hommes, ce chant d'amour humain, à la fois sexuel et sacré, semble décrire l'activité amoureuse comme bonne dans l'oeuvre de Dieu.

Le livre de Ruth doit son nom à la principale héroïne du récit. Son auteur évoque l'histoire d'une ancêtre du roi David, une étrangère au peuple d'Israël qui abandonne son peuple et ses dieux pour s'agréger au peuple. Convertie sincère, introduite légalement dans une famille israélite par son mariage avec Booz, elle donnera naissance à un fils, Oved, le père de Jessé, père de David. Ce livre souligne ainsi l'universalisme auquel la religion d'Israël est appelée au milieu des autres nations. Ce thème, ainsi développé, contraste avec les mesures rigoureuses d'Esdras qui interdisaient les mariages avec les étrangères.

Le livre de Qohélet, appelé également l'Ecclésiaste, s'appuie sur la constatation de l'universelle vanité des choses : tout se dirige vers la mort, et rien ne peut subsister. Tout est vain, aussi bien la sagesse que la vertu ou que les agréments de la vie.

Mais celui qui prend la parole dans l'assemblée (traduction littérale du terme Qohélet) n'est pas un sceptique sur le plan religieux : il croit en Dieu, il partage la foi d'Israël, il accepte les doctrines révélées par la Parole de Dieu, mais il ne donne pas de solution à son problème : le juste peut tout au plus s'efforcer d'échapper au Jugement de Dieu en suivant la Loi, mais il n'y a pas d'espérance d'un au delà de la mort.

Les Lamentations, attribuées faussement à Jérémie, dont on reconnaît pourtant quelquefois l'influence, sont composées de cinq poèmes, ayant pour objet la ruine de Jérusalem et celle du Temple par Nabuchodonosor. Elles s'appliquent donc bien à la catastrophe nationale de la déportation en Babylonie. Mais elles constituent aussi un chant de confiance à Dieu qui pourra prendre en pitié son peuple châtié.

Le livre d'Esther raconte l'histoire d'une jeune Juive qui a été choisie pour épouse par le roi Assuérus et qui réussit à empêcher l'extermination de ses compatriotes voulue par le vizir Aman. Esther obtient la condamnation du vizir et son remplacement par l'oncle d'Esther, Mardochée, qui obtient du roi l'autorisation d'exterminer ceux qui en voulaient à la communauté juive. L'événement est rappelé dans la fête des Pourim.

Le livre de Daniel comprend deux parties, malgré son unité apparente. D'abord, son rédacteur présente le héros, Daniel, Juif déporté qui demeure fidèle à YHWH malgré l'épreuve ; puis, son récit prend une forme autobiographique. Daniel obtient une sagesse extraordinaire en refusant de manger des aliments considérés comme impurs. Ses compagnons, d'abord jetés au feu pour avoir refusé d'adorer des idoles, sont protégés par Dieu et obtiennent alors la faveur royale. Nabuchodonosor ayant perdu la raison, son fils Balthazar lui succède et, au cours d'un festin, il a la vision d'une main inscrivant des signes incompréhensibles sur le mur de la salle où il se tenait. Daniel interprète ces termes énigmatiques dans le sens de la ruine imminente des Chaldéens et de la venue au pouvoir des Perses. Le récit de Daniel dans la fosse aux lions souligne que la puissance de YHWH l'emporte toujours : il annonce la délivrance proche des fidèles persécutés pour leur foi.

Les derniers écrits de la Bible hébraïque sont attribués à un chroniste : il s'agit des livres d'Esdras, de Néhémie et des Chroniques.

Les livres d'Esdras et de Néhémie traitent des événements qui se sont déroulés après le retour d'exil. Mais leur auteur ne fait pas une oeuvre "historique" au sens moderne du terme : il veut avant tout justifier les fondements de la vie juive après le retour de la captivité, ces fondements étant le respect de la Loi, les institutions centralisées autour du culte à Jérusalem, et l'espérance de la restauration davidique. Ainsi, l'oeuvre des restaurateurs apparaît comme entièrement commandée par le dessein de salut de Dieu...

Les livres des Chroniques sont une reprise d'écrits anciens, complétés par une documentation orale ; alors que les premiers livres prophétiques (Josué, Juges, Samuel, Rois) s'inspiraient du Deutéronome, les écrits du Chroniste veulent réinterpréter toute l'histoire, et particulièrement celle du Royaume du Sud, au point de vue sacerdotal et liturgique.

A tous ces livres qui constituent le canon de la Bible hébraïque, il faut ajouter quelques livres contenus dans le canon de la Bible d'Alexandrie, et qui ne sont connus qu'en grec. On les appelle "apocryphes". Les livres des Maccabées présentent la rébellion des frères Maccabées contre le roi Antiochus Épiphane. Le livre de Judith retrace la légende d'une juive qui aurait sauvé son peuple en tuant le général assyrien Holopherne. Le livre de Tobie insiste sur la valeur des oeuvres de bienfaisance à l'égard des malades et des morts. Le livre de Sirac est constitué par un recueil de sentences sur des sujets divers : c'est un livre de sagesse pratique qui doit amener la conversion morale des païens. Le livre de Baruch, secrétaire de Jérémie, est un poème sapientiel invitant à la pénitence et qui s'inspire des Proverbes. Le livre de la Sagesse, dont le patronage est accordé à Salomon, reprend la doctrine de sagesse de la Bible en lui donnant un sens nouveau, en raison du milieu hellénisé dans lequel ce livre est écrit.