Approches du
christianisme
Jésus-Christ
est-il un personnage historique ?
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Selon la plupart des
spécialistes du christianisme, 1994 a été le deux millième anniversaire de
la naissance de Jésus de Nazareth. | |
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Le christianisme a
connu un succès phénoménal au cours des deux premiers millénaires qui
ont suivi la naissance de son fondateur à Bethléem. |
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La Bible est un
best-seller, c'est le texte le plus édité. Copiée, recopiée sur papyrus,
la Bible est imprimée pour la première fois par Gutenberg en
1455. |
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Elle est aujourd'hui
traduite en plus de trois cents langues et elle est accessible à 98%
de la population mondiale. |
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Il y a 1,8 milliard de
chrétiens dans le monde aujourd'hui. Il faut dire que le terme chrétien
n'est pas d'origine chrétienne. Les disciples se désignaient entre
eux sous le nom de « frères », de « disciples », de
« ceux qui suivent la Voie », de « saints ». |
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C'est dans des milieux
non-chrétiens d’Antioche que ce concept a été formé et que « pour la
première fois, le nom de chrétiens fut donné aux disciples »
(Ac. 11, 26). |
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L'apparition de ce
terme manifeste que l'Eglise n'est plus considérée comme une secte
juive, mais comme un groupe religieux nouveau. Ce terme n'est
pas un terme honorifique, c'est plutôt un sobriquet insultant à
l'égard de ceux qui considèrent que Jésus est le Christ. Qu'est-ce qui
fait l'identité du chrétien ? |
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Alexamenos adore son
dieu |
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Il n'existe pas d'autre
personnage qui ait exercé une influence comparable à celle de ce
prophète galiléen, puisque son influence se fait sentir encore
aujourd'hui. Même les adversaires les plus acharnés de la religion,
reconnaissent qu’il a été un personnage hors du commun et que
son message a marqué l'humanité, bien que sa prédication n'ait
duré que quelques années et que sa mort fut ignominieuse. |
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Pourtant, aussi
extraordinaire que cela puisse paraître, cet homme n'a laissé aucun
écrit. Et il est pratiquement impossible de retracer une
histoire de sa vie, car les évangiles, seule source d'information sur
sa vie, ne sont pas des livres d'histoire, des biographies, mais des
témoignages sur son message. |
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De plus, ces
témoignages ont subi l'influence de l'interprétation des
communautés chrétiennes dans lesquelles ils ont été rédigés.
L'historien se trouve dépourvu quand il entreprend de retracer
ou de décrire ce que fut son existence.
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Une question se pose
avec acuité chez ceux qui s'opposent violemment à la foi : y
a-t-il eu à l'origine du christianisme une personnalité réelle, celle
de Jésus, ou bien l'histoire évangélique n'est-elle qu'un mythe et Jésus
n'a-t-il eu de réalité que dans l'imagination et le coeur de ses
adorateurs ? Ce n'est pas une question nouvelle, elle s'est posée à partir
du dix-huitième siècle... tout comme on s'interrogeait aussi peu de
temps après sur l'existence de Napoléon, en se demandant s'il n'était pas
qu'un mythe, qu'une légende. |
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C'est au début du
vingtième siècle que la discussion sur l'historicité de Jésus s'est
amplifiée, parce que les matériaux évangéliques ne permettaient
pas d'écrire une vie de Jésus et que les témoignages non-chrétiens le
concernant étaient peu nombreux. |
14 |
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L'histoire de Jésus
n'est consignée ni dans les actes officiels ni dans les Annales de
l'empire romain, ni dans aucun ouvrage d'histoire juive, et il n'a
guère été pris en considération par l'histoire mondiale. |
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Il fait son entrée dans
l'histoire à l'occasion d'un échange de notes administratives. Gaius
Plinius Secundus, généralement appelé Pline le Jeune, légat en
Bythinie, écrit à l'empereur, vers 112, pour lui faire part de ses
problèmes. Il a comme soucis des grèves, des scandales et
une morosité politique. Il constate un malaise religieux : les
temples sont désertés, dans quelques-uns, le culte a cessé. Cela a conduit
à une crise agricole, puisqu'il n'y a plus d'acheteurs pour les
animaux destinés aux sacrifices.
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16 |
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Tout cela est
imputable, selon ses informateurs, aux chrétiens qui forment une société
secrète manquant de loyauté envers l'empire. Cette lettre est importante
pour connaître l'Eglise ancienne, mais c'est certainement des
adversaires des chrétiens que le gouverneur de Bythinie tire ses
informations. |
17 |
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Il demande
des instructions : « J'ai l'habitude de vous consulter sur
mes doutes. Voici la règle que j'ai suivie à l'égard de ceux qui ont été
déférés à mon tribunal comme chrétiens. Leur faute ou leur
erreur s'était bornée à se réunir à date fixe, avant le lever du
jour et de chanter entre eux un hymne à Christ comme à un dieu, et de
s'engager par serment (non, comme Pline s'y attendait, à quelque
crime, mais) à observer la loi morale : ne pas commettre de vol, de
violence, d'adultère, de ne pas manquer à leur parole, ne pas nier un
dépôt réclamé... |
18 |
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Ils se
retrouvaient pour prendre ensemble un repas, mais un repas
ordinaire et innocent. A ceux qui avouaient, je l'ai demandé une
deuxième et une troisième fois, en les menaçant de supplice. Ceux qui
persévéraient, je les ai fait exécuter. Ceux qui niaient être
chrétiens ou l'avoir été, s'ils invoquaient les dieux selon la formule que
je leur dictais et sacrifiaient par l'encens et par le vin
devant ton image que j'avais fait apporter à cette intention avec les
statues des divinités, si, en outre, ils blasphémaient le Christ -
toutes choses qu'il est, dit-on, impossible d'obtenir de ceux qui
sont vraiment chrétiens, j'ai pensé qu'il fallait les relâcher. |
19 |
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Ce n'est pas seulement
à travers les villes, mais aussi à travers les villages et les
campagnes que s'est répandue la contagion de cette superstition.
Je crois pourtant qu'il est possible de l'enrayer et de la guérir ».
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20 |
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Trajan répond de ne pas
tenir compte des dénonciations anonymes et de punir ceux qui
s'obstineraient à s'affirmer chrétiens : « Il ne faut
pas rechercher les chrétiens. Mais s'ils sont dénoncés et
convaincus, qu'on les châtie. Pourtant, si quelqu'un nie être chrétien et
le prouve en sacrifiant aux dieux, qu'il obtienne le pardon ». |
21 |
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La lettre de Pline
n'est pas la seule source non chrétienne à désigner
« Christ ». Trois ou quatre ans plus tard Tacite écrit dans ses
Annales que Néron était soupçonné d'être l'instigateur de l'incendie de
Rome en 64. |
22 |
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Pour faire taire les
rumeurs, la police romaine avait recherché un bouc émissaire.
Elle en trouva un dans un groupe de personnes connues sous le nom
de chrétiens, qui étaient méprisées par la populace à cause de leur
conduite scandaleuse à ses yeux. Aussi un certain nombre de chrétiens
furent-ils torturés et condamnés à mort : |
23 |
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« Néron produisit
comme inculpés... des gens détestés pour leurs turpitudes, que la foule
appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Christ que, sous le principat de
Tibère, le procurateur Ponce-Pilate avait livré au supplice.
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Réprimée sur le moment,
cette exécrable superstition perçait de nouveau, non seulement en
Judée où le mouvement avait pris naissance, mais encore à Rome où
tout ce qu'il y a d'infâme et de honteux afflue et trouve des
sectateurs... ». |
25 |
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Tacite ne semble pas
croire au bien-fondé de l'accusation portée contre les chrétiens,
mais il n'hésite par à les présenter comme des ennemis de la société
romaine. Il nomme le Christ comme fondateur de ce mouvement et donne des
renseignements qui reprennent les évangiles : Tibère et Ponce-Pilate.
|
26 |
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Malheureusement la
mort du fondateur n'a pas stoppé le mouvement, et à l'époque de
l'incendie de Rome, soit trente ans après sa mort, les partisans
de cette superstition étaient devenus une multitude. Mais Tacite
n'aurait-il pas utilisé des documents d'origine chrétienne, en
recourant à des témoignages de croyants inculpés, conservés dans des
rapports de police ? |
27 |
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Nous savons que Pilate
fut préfet de Judée de 26 à 36. Son nom, Pontius Pilatus, est gravé sur
une pierre qui fut réemployée dans la construction du théâtre de
Césarée Maritime, et qui a été redécouverte en 1961. Mais il n'est
resté aucune trace de sa correspondance avec le pouvoir. |
28 |
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Philon d'Alexandrie
attribue à Pilate des violences, des exécutions sans jugement. Pilate
passa outre la sensibilité juive en voulant exposer des
enseignes militaires dans le Temple, il fallut que l'empereur
s'en mêle pour le faire céder. |
29 |
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Pour financer l'aqueduc
devant amener l'eau à Césarée, il voulut puiser dans le Trésor du
Temple, cet incident tourna à l'émeute et s'acheva dans la violence.
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30 |
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Pilate fut révoqué en
36 par Vitellius, légat de Syrie, et envoyé à Rome pour se justifier
devant l'empereur d'avoir maté dans le sang une manifestation
messianique samaritaine... Pilate fut condamné par Caligula
soit à l'exil soit à la mort... |
31 |
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Vers l'an 120, dans sa
Vie des douze Césars, Suétone écrit la vie de Néron. Dans une série de
mesures prises par l'empereur, il note : « On livra au supplice les
chrétiens, sorte de gens adonnés à une superstition nouvelle et
dangereuse ». Et, dans la vie de Claude, on peut lire : « Comme
les juifs se soulevaient continuellement, à l'instigation d'un
certain Chrestos, il les chassa de Rome ». |
32 |
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Dans tout cela, il n'y
a rien de très précis concernant Jésus qui mourut sous Ponce-Pilate. Mais
un fait est capital : dans la deuxième décennie du deuxième
siècle, les autorités impériales connaissent les chrétiens comme
un mouvement spécifique, et elles ont eu affaire à eux déjà sous
Néron. |
33 |
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Trois témoins romains
font mention du Christ, ce qui empêche de mettre en doute son
existence historique.
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34 |
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Indirectement, les
textes du Talmud établissent également qu'il n'y a pas lieu de mettre
en doute son existence. Une tradition antérieure à l'an 200, venue du
traité du Sanhédrin, dans le Talmud de Babylone, indique : « A la
veille de la fête de la Pâque, on pendit Jésus à la veille de la fête de
la Pâque ». |
35 |
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Pour poursuivre
l'enquête, on peut apporter un autre document juif. Vers 93, Flavius
Josèphe mentionne le Christ dans deux passages de son livre, les
Antiquités juives. Le premier rapporte la condamnation et
l'exécution de Jacques, le frère de Jésus, et le second parle de
Jésus comme d'un sage dont beaucoup de juifs et de non-juifs sont devenus
les disciples, croyant qu'il était le Messie : |
36 |
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« A cette époque
vécut Jésus, un homme exceptionnel, car il accomplissait des choses
prodigieuses. Il se gagna beaucoup de monde parmi les juifs. Lorsque, sur
la dénonciation de nos notables, Pilate l'eut condamné à la croix,
ceux qui lui avaient donné leur affection au début ne cessèrent pas
de l'aimer, parce qu'il leur était apparu le troisième jour, de nouveau
vivant, comme les prophètes l'avaient déclaré. De nos jours ne
s'est pas tarie la lignée de ceux qu'à cause de lui on appelle
chrétiens ». |
37 |
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Si c'est en langue
hébraïque ou araméenne, et si c'est probablement à Jérusalem qu'est
née la littérature concernant Jésus, depuis lors, il n'y a guère eu de
littérature juive concernant Jésus, venant des descendants à qui
le prophète de Nazareth avait pu s'adresser. Quelques lignes
dans la littérature non-chrétienne, c'est tout ce que nous
pouvons savoir de Jésus de l'extérieur. |
38 |
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Le seul intérêt
qu'il est possible de trouver dans ces témoignages non-chrétiens,
c'est que même les plus ardents détracteurs de la prédication du
Nazaréen n'ont jamais mis en doute son existence historique, ce qui
sera fait par les critiques les plus tendancieux de l'époque moderne...
Mais ceux qui ont entendu parler de ce prophète galiléen
considèrent toujours son arrivée sur la scène publique comme un
événement quelconque, sans grande importance.
|
39 |
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On aurait tort de
penser que les seules sources non-chrétiennes ont une valeur probante. Les
textes du Nouveau Testament permettent d'affirmer, sans hésitation,
l'existence de Jésus, même si les premières communautés n'ont pas
cherché à mettre en valeur le rôle historique mondial que pouvait
avoir celui en qui des hommes mettaient leur foi, au point de mourir pour
son nom au lieu de le renier. |
40 |
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Pour connaître Jésus de
Nazareth, il faut accepter de franchir le pas de la foi et de s'en
remettre au témoignage que les premiers chrétiens ont porté sur
lui. Les lettres de l'apôtre Paul, facilement datables, permettent
d'affirmer un fait qu'aucune communauté chrétienne n'a pu inventer
: |
41 |
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Jésus est mort sur une
croix, sans doute le vendredi 7 avril 30 (date très vraisemblable, quoique
pas entièrement certaine, d'autres historiens estiment que la
mort de Jésus eut lieu le 27 avril 31). Cette mort est loin d'être
« noble » pour le fondateur d'une religion ! En effet, un
texte terrible de la Loi de Moïse concerne ce châtiment :
« l'homme ayant en lui un péché passible de mort, qui aura été mis à
mort et que l'on aura pendu à un arbre : un pendu est une malédiction de
Dieu » (Dt. 21, 23). |
42 |
|
A partir du milieu du
deuxième siècle, les chrétiens se définissent de la manière suivante :
« Autrefois, nous prenions plaisir à la débauche. Aujourd'hui, après
la venue du Christ, nous vivons ensemble, nous prions pour nos
ennemis, nous cherchons à gagner nos injustes persécuteurs, afin que
ceux qui auront vécu conformément à la sublime doctrine du Christ
puissent espérer les mêmes récompenses de Dieu, le Maître du
monde » (Justin, vers 150). |
43 |
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« Les chrétiens ne se distinguent pas des
autres hommes ni par le pays ni par le langage, ni par les
vêtements... Ils se conforment aux usages locaux pour les
vêtements, la nourriture et la manière de vivre... Ils
passent leur vie sur la terre mais sont citoyens du ciel... On les
persécute et ils bénissent. Châtiés, ils sont dans la joie comme s'ils
naissaient à la vie.» (Epître à Diognète, fin du deuxième siècle). |
44 |
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Les documents
chrétiens sont les plus nombreux pour affirmer qu'un personnage
réel se trouve derrière la tradition évangélique. Ainsi encore,
aux environs de l'an 200, mourut à Lyon saint Irénée, évêque de cette
ville, l'un des hommes les plus marquants de la cité. Une de ses
lettres, adressée à son ami Florinus, nous est parvenue. |
45 |
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A celui qu'il avait
perdu de vue depuis un certain temps, Irénée rappelle des
souvenirs de vie étudiante en Asie Mineure, évoquant leurs
études auprès de Polycarpe, évêque de Smyrne, qui mourut
aux environs de 155, âgé de plus de quatre-vingt-cinq ans. |
46 |
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Il se souvient que
le vieillard les entretenait de « Jean, le disciple du
Seigneur », qu'il avait personnellement connu bien des
années auparavant. Irénée n'aurait pas fait ce témoignage sans avoir
la certitude que son ami pouvait évoquer les mêmes souvenirs.
Donc, aux environs de l'an 200, un homme était en mesure d'évoquer
Jésus par l'intermédiaire d'un maître qui avait connu
personnellement un des disciples de ce Jésus...
|
47 |
Sous le règne de
Tibère, nul ne sait exactement où ni quand, un personnage dont on
ignore le nom a ouvert une brèche dans l'horizon des hommes. Ce
n'était sans doute ni un philosophe ni un tribun, mais il a dû vivre de
telle manière que toute sa vie signifiait : chacun peut, à chaque
instant, commencer un nouvel avenir. Des dizaines de conteurs
populaires ont chanté cette bonne nouvelle. | |
48 |
Il faut se mettre à
l'écoute des conteurs populaires qui transmis aux générations
ultérieures ce qu'ils avaient perçu de Jésus. La question se pose de
savoir qui a pu écrire les évangiles. Jusqu'à une époque
récente, les plus anciens manuscrits dont on disposait
remontaient au deuxième siècle. | |
49 |
Et l'on pensait que les
évangiles avaient d'abord été véhiculés par un enseignement oral,
puis mis par écrit à la fin du premier siècle, après la
disparition des témoins oculaires. Et l'on affirmait avec plus
ou moins de véhémence que ces évangiles étaient surtout et même
uniquement des témoignages de foi.
| |
50 |
Cela reste vrai : les
évangiles ne sont pas des chroniques de la vie de Jésus, ils ont été
composés pour donner sens à l'activité de Jésus, mais ils ne sont
plus considérés comme des textes composés par d'habiles compilateurs qui
auraient travaillé à partir de sources aujourd'hui disparues. | |
51 |
La tradition de
l'Eglise a limité le nombre des évangélistes à quatre, bien que le
quatrième évangile soit davantage une construction théologique
élaborée qu'un conte populaire... | |
52 |
Les trois premiers
évangiles sont appelés synoptiques, parce qu'il est possible de les lire
en parallèles, même s'ils ne sont pas toujours unanimes. | |
53 |
Ce ne sont pas des
biographies de Jésus, mais des témoignages de foi et des annonces du
mystère de Jésus. | |
54 |
Jamais un récit ne
rapporte un fait brut, mais toujours, quand il présente un acte ou
une parole de Jésus, il cherche à transmettre un enseignement qui
remonte au maître, qui lui est fidèle sinon dans la lettre, du
moins dans l'esprit. | |
55 |
Comment a été fixée le
début de l'ère chrétienne ? Au sixième siècle, un moine, Denys
le Petit, instaura un comput des dates à partir de la naissance
de Jésus, en la fixant en l'an 753 de la fondation de Rome. | |
56 |
Il se trompa sans doute
de quelques années. Néanmoins on peut parvenir à des hypothèses assez
probables. Ce calcul, même erroné, a permis d'illustrer, par un texte
poétique, la situation du monde au moment de la naissance de
Jésus : | |
57 |
« Des milliards
d'années depuis qu'au commencement roulèrent les galaxies dans
l'immensité du monde, | |
58 |
des millions d'années
depuis que la terre avait balbutié les premiers hommes, | |
59 |
|
près de deux mille ans
depuis qu'Abraham avait fait route vers l'inconnu, |
60 |
quinze siècles depuis
Moïse et la sortie d'Egypte, | |
61 |
mille ans après le
règne de David, | |
62 |
au cours de la cent
quatre vingt quatorzième Olympiade,
| |
63 |
dans la sept cent
cinquante quatrième année de la fondation de Rome, et la
quarante deuxième année du règne d'Auguste, | |
64 |
six siècles après le
Bouddha, | |
65 |
et cinq après
Socrate, | |
66 |
Jésus-Christ, Dieu
éternel, Fils du Père éternel, conçu dans le temps par une femme, naît à
Bethléem, en Palestine, pour sanctifier le monde ». | |
67 |
L'évangéliste Luc (3,
1) fixe le commencement du ministère public à l'an 15 du principat de
Tibère César, ce qui permet de le dater des années 27-28. | |
68 |
|
Cette date se trouve en
quelque sorte justifiée par l'évangéliste Jean (2, 20) quand il parle des
quarante-six années qu'il a fallu pour reconstruire le Temple de
Jérusalem. |
69 |
La vie publique de
Jésus aurait duré deux ou trois ans, ce qui correspond aux trois
fêtes de Pâques mentionnées par Jean.
| |
70 |
La date de la naissance
de Jésus est difficile à établir avec précision. Selon Matthieu, Jésus
serait né sous le règne d'Hérode le Grand, mort en l'an 4 avant le début
de l'ère chrétienne. | |
71 |
Les historiens
s'accordent sur l'an 746 ou 747 de la fondation de Rome, c'est-à-dire en 6
ou 7 avant l'ère chrétienne. Luc, qui affirme que Jésus avait environ
30 ans au début de son ministère, s'accorde avec cette date. Il mentionne
le gouverneur de Syrie, Quirinius. | |
72 |
D'après Flavius
Josèphe, celui-ci présida au recensement de la Palestine,
en l'an 6 de l'ère chrétienne. Le recensement mentionné par
les évangélistes au moment de la naissance de Jésus ne peut pas être celui
de Quirinius, puisque Matthieu et Luc attestent que Jésus est né au temps
du roi Hérode le Grand, mort en l'an 4 avant l'ère chrétienne. | |
73 |
Il y a un
désaccord de dix ans entre les données : si Luc parle d'un premier
recensement, il apparaît informé, mais peu soucieux d'exactitude
chronologique. | |
74 |
La mention du
recensement impliquerait un fait public qui aurait dû laisser des traces.
Or il n'y a aucune trace d'un recensement dans l'histoire, on sait
qu'Auguste a organisé des recensements dans diverses provinces :
il est probable que Luc a regroupé divers recensements répartis sur
une trentaine d'années. C'est une simplification de l'histoire
familière aux historiens de l'antiquité, plus soucieux de la forme
littéraire que des détails matériels.
| |
75 |
Les chrétiens sont
tellement habitués à fêter Noël le 25 décembre qu'ils ne se soucient guère
de la date de la naissance de Jésus. Il semble que ce soit vers la fin du
règne de Constantin, mort en 337, qu'on décida de célébrer cette
naissance à cette date. | |
76 |
Aurélien aurait
fixé la date en fonction du solstice d'hiver, c'est-à-dire le
moment où la force solaire, jusqu'alors décroissante,
commence à grandir. C'était la fête du « Natalis solis
invicti, du soleil renaissant et invaincu ». | |
77 |
C'est pour
christianiser cette fête païenne que l'Eglise décida de
célébrer le « Dies natalis », d'où vient le mot de
Noël, comme jour de la naissance du véritable soleil levant. Cette
date est donc d'origine romaine, mais elle s'imposa au cours du quatrième
siècle dans la chrétienté pour célébrer la gloire de Dieu manifesté en
Jésus, lumière qui éclaire tout homme en venant dans le
monde. | |
78 |
Si l'on se réfère au
texte de Matthieu, relatif à la naissance de Jésus, et si on
s'intéresse à la situation des bergers à qui la naissance est annoncée, on
découvre qu'ils sont dans les champs à garder leurs troupeaux. | |
79 |
Cela exclut une
naissance en hiver : l'été sec et chaud a détruit toute forme de
végétation dans les champs, et l'hiver très rigoureux (surtout la nuit) ne
leur permettait par de rester dans les champs. | |
80 |
Il faut attendre les
pluies de printemps pour que l'herbe repousse et que les bergers
puissent conduire leurs troupeaux hors des bergeries. Cela permet de
penser que la naissance a eu lieu vraisemblablement au
printemps... | |
81 |
Jésus est né à
Bethléem, fait attesté par Matthieu et Luc. Bethléem est la ville de
naissance du roi David. La perspective religieuse affirmait que
le Messie, sauveur du peuple, serait originaire de la cité de David :
« Et toi, Bethléem, tu n'es pas le moindre des cantons de Juda, car
de toi naîtra un sauveur » (Mi. 5, 1, cité par Mt. 2, 6). | |
82 |
Le prophète Michée
annonçait de cette manière la naissance de Jésus dans cette ville. Il
est pratiquement certain que la famille de Jésus, comme d'autres
familles juives, ait été de la descendance de David.
Pourtant, Jésus ne se prévaudra jamais de son illustre
ascendant... | |
83 |
Certains exégètes
récusent l'historicité d'une naissance de Jésus à Bethléem, il serait né à
Nazareth, puis la tradition chrétienne aurait déplacé le
lieu de sa naissance en fonction de la prophétie davidique et
messianique de Michée. | |
84 |
Même si la naissance de
Jésus a eu lieu à Bethléem, Jésus est toujours reconnu comme
venant de Nazareth, une obscure bourgade du Nord du pays, la Galilée.
Cette région, tout comme le reste de la Palestine était sous
influence romaine, et il est attesté que la société était multilingue
(polyglotte). | |
85 |
On en trouve une preuve
évidente dans le texte de l'évangile de Jean (19, 20) où il est fait
référence à l'inscription que Pilate fit placer sur la croix de Jésus
en ces termes : « Cette inscription a été lue par de nombreux
juifs, car l'endroit où Jésus fut crucifié était proche de la ville,
et elle était écrite en hébreu, en latin et en grec ».
| |
86 |
La colonisation
romaine avait renforcé le multilinguisme de la région, et il est
pratiquement certain que tous les habitants, à des degrés divers,
parlaient ou comprenaient plusieurs langues. | |
87 |
Ainsi, Jésus, comme les
enfants de son temps, parlait l'araméen, un dialecte issu de
l'hébreu, qui était sa langue maternelle, il connaissait aussi
l'hébreu, langue dans laquelle avaient été écrits les livres saints
du judaïsme. | |
88 |
Il devait avoir des
notions de grec et de latin, les deux langues culturelles de la
Méditerranée orientale, depuis les conquêtes de grecs et des
Romains, langues dans lesquelles s'effectuaient aussi les
échanges commerciaux. | |
89 |
Un exemple, tiré de
l'évangile selon Marc, nous apprend que Jésus s'est rendu dans la
région de Tyr, qu'il y a rencontré une syrophénicienne.
Marc souligne que cette femme parlait le grec, et donc que la
conversation qu'elle a eue avec Jésus a été menée en grec. | |
90 |
Il en est de même dans
la discussion de Jésus avec les Pharisiens, concernant l'impôt à
payer à César. La Palestine avait comme monnaie des pièces
portant une inscription latine au « Divus
Augustus », le divin Auguste. Jésus ne demande pas ce que signifie
l’inscription, mais de qui il est fait mention sur cette pièce,
signe qu'il comprenait le sens de la phrase... | |
91 |
Il faudrait encore
évoquer l'interrogatoire de Jésus par Pilate : il n'a pu être mené
qu'en grec ou en latin. | |
92 |
Cependant, si Jésus
parlait plusieurs langues, il faut savoir qu'il avait un
accent, l'accent rugueux des paysans galiléens, celui-là même qui fit
repérer Pierre dans la cour du grand-prêtre au moment du procès de Jésus.
| |
93 |
Le climat dans lequel
s'est déroulée l'enfance de Jésus est celui de la spiritualité de
l'Ancien Testament. | |
94 |
L'élément essentiel du
culte repose sur la bénédiction par laquelle chaque croyant remercie
Dieu à chaque instant de sa vie, à chaque geste qu'il accomplit. La
bénédiction constitue la trame de la prière, car l'essentiel est de
bénir. Les bénédictions s'échelonnent tout au long de la
journée. | |
95 |
Si chaque jour
s'accompagne de formules religieuses, à plus forte raison en est-il du
sabbat qui est consacré à la prière et à la méditation : toute vie
profane cesse pour vingt-quatre heures, du vendredi soir au samedi
soir. | |
96 |
La loi prévoyait trois
pèlerinages par an, pour tous les hommes, à partir de douze ans, âge
où l'enfant entre dans la vie adulte, après un temps de catéchèse :
l'enfant devient Bar Mitzva, un fils de la loi. | |
97 |
Ce jour-là, on lui
demande de monter à l'ambon et de lire, dans la synagogue, un passage
de la Torah. | |
98 |
A l'âge de douze ans,
Jésus accompagne ses parents à Jérusalem. Après la fête, Jésus reste au
Temple, sans que ses parents ne s'en aperçoivent. | |
99 |
Quand ils
découvrent son absence dans la caravane du retour, ils regagnent
Jérusalem et le cherchent. C'est dans le Temple qu'au bout de trois jours,
Jésus est retrouvé. Il était assis parmi les docteurs, ce qui fait
ressortir l'intelligence et la sagesse de l'enfant.
| |
100 |
Les Évangiles gardent
le souvenir de paroles très dures de Jésus à l'égard de sa famille. Luc
qui rapporte la seule parole de Jésus enfant souligne comment Jésus
s'est démarqué de la paternité de Joseph, que Marie lui
rappelait : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois,
ton père et moi, nous te cherchions, tout angoissés ».
C'est sans hésitation que Marie désigne Joseph comme le père de Jésus.
Cette paternité eut pour Jésus plus d'importance qu'on ne le pense.
D'ailleurs, pour désigner Dieu, Jésus emploie le terme affectueux que
les enfants donnent à leur père : « Abba, papa ». | |
101 |
|
Après la manifestation
de Jésus au Temple, les évangiles ne rapportent rien de son existence
jusqu'au début de sa vie publique. Jésus grandit, il apprend le
métier de Joseph, que l'on a l'habitude de présenter comme
un charpentier. En fait, le terme grec de l'évangile qui désigne le
métier de Joseph est : tecton, mais plutôt bâtisseur, sens qui lui
est resté dans le terme « architecte ». Même si l'évangile ne le
dit pas, Jésus travailla avec lui comme apprenti. Selon les
directives des livres saints, un père ne doit pas seulement nourrir son
fils, mais lui apprendre un métier : « Qui n'enseigne pas à son
fils une profession manuelle, c'est comme s'il en faisait un
brigand ». |
102 |
Les gens qui ont
fréquenté Jésus durant sa vie l'ont souvent appelé
« rabbi », terme qui veut dire « maître » en hébreu.
Jésus devait être considéré comme un enseignant, même s'il
n'avait pas effectué d'études auprès des scribes et des docteurs
de la Loi. Charpentier, il faisait partie du milieu des artisans
qui étaient les dépositaires de la sagesse populaire véhiculée dans
le cadre des ateliers. « N'y a-t-il pas un charpentier, fils de
charpentier, pour résoudre cette question ? » | |
103 |
Après la manifestation
de Jésus au Temple, les évangiles ne rapportent rien de son existence
jusqu'au début de sa vie publique. Faudrait-il admettre
l'hypothèse qui identifie Jésus avec un personnage connu dans
les légendes tibétaines sous le nom de saint Issa, qui vécut
vers l'an 30 et mourut crucifié ? | |
104 |
Issa a voyagé par terre
et par mer pour arriver jusqu'à l'Indus, il y a étudié les Écritures
saintes du bouddhisme. Issa fut reçu avec joie par les brahmanes qui lui
apprirent à guérir par la prière, à chasser les esprits mauvais
et à restituer au corps la forme humaine après blessure ou
mutilation. | |
105 |
Alors les miracles de
Jésus sembleraient naturels pour ceux qui ont accédé à la véritable
connaissance spirituelle. Issa se serait rendu à Bénarès, aux
bords du Gange, fleuve sacré de l'hindouisme, là où les pèlerins
se purifient de leurs péchés et espèrent mourir, puisque la mort à
Bénarès rompt le cycle des réincarnations. | |
106 |
A proximité de Bénarès,
Bouddha avait fait son premier sermon. Il convient de dire que bouddhisme
et hindouisme étaient florissants au temps de Jésus et que le
monothéisme était vivant en Inde. | |
107 |
A 26 ans, Issa aurait
quitté l'Inde pour Persépolis, puis Athènes et l'Égypte, pour rentrer à 29
ans en Palestine, afin d'y accomplir son destin. | |
108 |
A l'âge d'environ
trente ans, Jésus quitte son village de Nazareth et son travail pour
se rendre sur les bords du Jourdain, où Jean donnait aux pécheurs le signe
de la purification du coeur, en les plongeant dans l'eau. | |
109 |
|
Au premier siècle de
l'ère chrétienne, le judaïsme est fragmenté en de multiples tendances dont
les traces sont perceptibles dans les différents écrits. Pour faire passer
son message, Jésus devait s'inscrire dans l'un ou l'autre courant de
la pensée mystique de son époque. |
110
|
|
Les Pharisiens
constituent un courant de piété. Ils refusent la lutte armée pour
l'indépendance nationale et gardent des objectifs religieux,
centrés sur la fidélité à l'enseignement de la Torah. Toutefois,
ils n'hésitent pas à se considérer comme supérieurs à l'ensemble du peuple
qui n'observait pas les prescriptions rigoureuses.
|
111 |
Les sadducéens sont
conservateurs, ils ne reconnaissent les écrits les plus anciens, refusant
la tradition orale, refusant de reconnaître les progrès
doctrinaux et les nouvelles croyances, comme la croyance aux
anges, à la résurrection des morts et à la rétribution universelle
après la mort. | |
112 |
En réaction contre
l'oppression et la misère subies par les juifs, certains hommes, qui
seront appelés Esséniens, décident de se mettre à l'écart du monde et de
vivre désormais dans la piété. Certains suivirent les conseils de vie
des Esséniens, mais ne quittèrent pourtant pas leur existence quotidienne,
si bien qu'il existait des communautés esséniennes locales,
chargées surtout d'oeuvres de solidarité envers les frères de passage
dans les villes et les villages. | |
113 |
La plupart des fidèles
de la secte se retiraient près de la mer Morte, pour pratiquer
un ascétisme rigoureux. La communauté ressemblait assez
étrangement, quant à son mode de vie, à un monastère dont les membres
travaillaient dans la copie soigneuse des textes
scripturaires. | |
114 |
Jésus eut des contacts
avec les communautés esséniennes, même si rien n'en transpire dans
les évangiles. Toutefois, il semble qu'il prit son dernier repas dans
le quartier essénien de Jérusalem. Pour préparer ce repas,
il envoie deux disciples, en leur disant de suivre un homme portant une
cruche d'eau. Or, ce travail était une tâche féminine, sauf chez les
Esséniens, qui voulaient éviter tout contact féminin, surtout pendant
la préparation de la Pâque. | |
115
|
Les zélotes entendaient
trouver une solution pratique à cette oppression : ils refusaient de
se cacher du monde et se préparaient activement à la lutte contre
toute tyrannie. Ils étaient prêts à lutter et à mourir pour l'amour
de la patrie, mais ils vivaient aussi dans un profond attachement à
la Torah, pour laquelle aussi ils auraient accepté de subir la
persécution et la mort. | |
116 |
|
Jésus a eu des contacts
parmi les zélotes, notamment par l'un de ses disciples, Simon, non
pas celui qui sera surnommé Pierre, mais un autre Simon qui est
toujours qualifié de son titre de zélote. |
117 |
Et sans être affilié au
parti des zélotes, il est vraisemblable que Judas Iscarioth était un
de leurs sympathisants, puisqu'il souhaitait faire advenir
le Royaume de Dieu par la force, tout comme ces révolutionnaires
partisans d'une guerre sainte. | |
118 |
Les zélotes
entraînèrent le peuple dans la révolte, et le résultat en fut la
catastrophe de 70 : Jérusalem tomba et le Temple fut détruit par les
flammes. La nation juive disparaissait de l'histoire pour près de
vingt siècles... | |
119 |
|
Sur les bords du
Jourdain, un dernier prophète - qui n'est pas reconnu comme tel, par
la tradition juive - Jean proposait un baptême de conversion à ceux qui
espéraient la venue de l'ère messianique, dans l'attente de celui qui
devait libérer Israël. |
120 |
Les évangiles
présentent Jésus se faisant baptiser par Jean et recrutant parmi les
disciples de celui-ci ceux qui allaient devenir les siens. | |
121 |
La mort du Baptiste,
exécuté par ordre du roi Hérode, devait permettre à Jésus de mener
son action propre. S'écartant du courant baptiste, il présente un message
qui, dans sa forme, semble nouveau pour le peuple. | |
122 |
Après son baptême par
Jean sur les bords du Jourdain, et après avoir séjourné quelque temps au
désert pour prier et jeûner, | |
123 |
Jésus est de retour à
Nazareth. Il se rend à la synagogue pour y prêcher, mais il n'y
trouve pas l'accueil qu'il pouvait espérer, tant il est vrai qu'aucun
prophète n'est bien reçu dans son pays
| |
124 |
Tout juif adulte peut
prendre la parole dans une assemblée de prière. Habituellement, les
autorités de la synagogue confient cette tâche à ceux qui sont
compétents dans le domaine des Ecritures. Cela laisse suppose que la
renommée et la réputation de Jésus étaient parvenues jusque dans son
village. | |
125 |
On lui donne à lire un
texte du prophète Esaïe. On sait, par les découvertes de Qumran, que
ce prophète était très utilisé au temps de Jésus, le plus ancien
manuscrit retrouvé dans les grottes de la secte des bords de la Mer Morte
étant précisément un rouleau de ce prophète. | |
126
|
L'évangéliste Jean fait
commencer la mission de Jésus par un signe étonnant à Cana, village de
Galilée, lors d'un mariage, auquel il fut convié avec ses proches.
| |
127 |
Toute la tradition
chrétienne a vu dans ce signe de Cana un rappel ou une préfiguration du
vin eucharistique de la même manière que la multiplication des pains
préfigure l'eucharistie. | |
128 |
La province du Nord, la
Galilée, est particulièrement fertile et verdoyante. Son pôle
d'attraction est certainement le lac de Tibériade. | |
129 |
Ce lac est encore
appelé mer de Kinnéreth, en raison de sa forme qui rappelle celle d'un
kinnor (sorte de lyre ancienne). le niveau de ses eaux est de 210
mètres au-dessous du niveau de la mer. Il mesure 21 kilomètres de
long du nord au sud et sa plus grande largeur est de 12 kilomètres,
la profondeur de ses eaux se situe entre 40 et 50 mètres. | |
130 |
La rive nord-ouest du
lac de Tibériade connût la plus grande partie du ministère galiléen de
Jésus. D'ailleurs, certains de ses disciples étaient originaires du lac.
Pierre et André étaient originaires de Capharnaüm où Matthieu, le
publicain, tenait l'octroi, tandis que Jacques, Jean et Philippe étaient
de Bethsaïde. | |
131 |
Le ministère de Jésus,
sur les bords du lac, commence immédiatement par une prédication de
l'Evangile et par un appel à la conversion. | |
132 |
|
Il commence sa
prédication devant la foule venue de tous les territoires d'Israël et des
pays limitrophes et païens, par un Sermon sur la montagne, où il présente
la loi-cadre de son Royaume. |
133 |
|
Ce Sermon a
impressionné non seulement ceux qui ont décidé de le suivre, mais aussi
des hommes de tous bords et qui ne vivent pas nécessairement les
valeurs chrétiennes. Jésus présente le chemin pour parvenir au
bonheur. |
134 |
|
Avec ses amis pêcheurs,
ceux qu'ils avaient appelés comme disciples, ceux qu'il avait choisis pour
en faire ses apôtres, Jésus traversera souvent le lac de Tibériade, se
retirant aussi souvent à l'écart sur les collines sauvages pour y prier.
|
135 |
|
L'eau du lac est calme
d'ordinaire, mais la tempête peut se lever et le transformer en mer
démontée et rugissante… La tempête sur le lac est l'occasion pour
Jésus d'insister sur la nécessité de la foi pour qui veut être son
disciple. |
136 |
|
Jésus parcourt donc la
Galilée, enseignant non seulement dans les synagogues, mais aussi en
pleine nature, proclamant la Bonne Nouvelle. |
137 |
|
Sa renommée s'étend
dans tout le pays, à partir de la ville de Capharnaüm, sur les bords du
lac de Tibériade, dont il fait sa ville. |
138 |
|
Capharnaüm était une
cité peuplée au temps de Jésus, au carrefour de plusieurs routes,
notamment la route romaine de la Mer, la Via Maris, qui allait de la
Méditerranée à Damas. |
139 |
|
Ce village était visité
par les premiers pèlerins de Terre Sainte qui signalent la présence de
deux constructions importantes : la maison-basilique de Pierre et une
synagogue en pierres taillées, à laquelle on accède par de nombreuses
marches. |
140 |
|
C'est dans le contexte
des premiers signes que Jésus donne de sa mission qu'il convient de situer
la multiplication des pains. Jésus nourrit cinq mille personnes avec
cinq pains d'orge et deux petits poissons. |
141 |
|
Tabgha est la
corruption d'un terme grec : Heptapegon (signifiant les sept
sources). Ces sources fournissaient une eau sulfureuse susceptible de
traiter les maladies de peau. La tradition chrétienne a voulu commémorer
en ce lieu la multiplication des pains. |
142 |
|
A Tabgha, également, on
voit encore les poteaux auxquels on attachait les barques, ainsi que
des marches qui descendent dans l'eau. |
143 |
|
Une nuit, après la
résurrection, Pierre et les autres disciples avaient pêché sans rien
prendre. Ils s'en revenaient de mauvaise humeur quand un étranger
leur crie de jeter une nouvelle fois les filets. Ils le font et
ramènent une énorme quantité de poissons. Ils reconnaissent alors
Jésus. |
144 |
|
Dans le repas pris sur
la berge, il faut découvrir un aspect symbolique. Il s'agit de pain,
mais il s'agit aussi de poisson. Et le terme grec employé (ichtus) est
l'anagramme du Christ : Iésous Christos Theou Uos Sôter, Jésus
Christ, le Fils de Dieu, Sauveur. |
145 |
|
La confession de foi de
Pierre marque un tournant l’évangile. Jusqu'alors, l'essentiel de la
mission de Jésus se déroulait dans le cadre de la prédication en Galilée,
avec quelques incursions dans les pays païens tout proches. |
146 |
|
Désormais, le cadre
géographique va changer : ce sera très prochainement la montée à
Jérusalem, là où doit se jouer le destin de Jésus. Lors de la
transfiguration, Jésus parlera de sa véritable mission qui est une
montée vers la Passion... |
147 |
|
Au nord de la Terre
Sainte, le mont Hermon se dresse couvert de neige. D'après certaines
traditions, c'est à son sommet que la Transfiguration aurait eu lieu. |
148 |
|
La tradition byzantine
préfère situer cet événement sur le mont Thabor, colline de 520 mètres qui
domine la plaine de la Basse Galilée. |
149 |
|
En montant à Jérusalem,
Jésus est passé (sans doute plusieurs fois) par Jéricho, oasis bien connue
de l'époque biblique et de tous les pèlerins galiléens qui montaient à
Jérusalem. |
150 |
|
Jéricho, cité des
palmiers, est la ville la plus basse du monde, située à 300 mètres
au-dessous du niveau de la mer. C'est une oasis de verdure de cinq
kilomètres de diamètre, véritable porte d'entrée en Israël en venant du
désert. |
151 |
|
Les fouilles
entreprises montrent que Jéricho devait déjà être une ville fortifiée aux
environs de l'an 7000 avant Jésus-Christ.
|
152 |
|
Jésus traverse donc la
ville lors d'un voyage à Jérusalem. Les évangélistes y situent la guérison
d'un aveugle, Bartimée. |
153 |
|
C'est aussi dans cette
ville de Jéricho que Jésus se fait accueillir par le collecteur d'impôts
Zachée. |
154 |
|
Les nombreuses grottes
de la région accueillirent de nombreux ermites s'engageant dans des
combats spirituels à l'exemple du Christ qui résista à la tentation.
|
155 |
|
Au cours de sa vie
publique, notamment dans le cadre de la capitale, Jésus, par sa
prédication et par ses actes, va s'attirer les foudres des représentants
du peuple et de la tradition juive. |
156 |
|
La tradition chrétienne
se plaît à dire que Jésus serait entré à Jérusalem par la porte Dorée, ou
porte de la Compassion, qui faisait partie de l'enceinte du Temple. |
157 |
|
Les juifs croient que
le Messie viendra par cette porte ; les musulmans, que cette attente
messianique inquiétait, bloquèrent cette porte qui fut complètement
bouchée lorsque le sultan Soliman le Magnifique fit reconstruire les
murailles de la ville. |
158 |
|
Face à la muraille du
Temple se dresse le mont des Oliviers. Sur ces lieux les souvenirs
chrétiens sont très vivants, |
159 |
|
avec parmi les tombeaux
juifs celui qui abrita le corps de la Vierge,
|
160 |
|
l'église de
Gethsémani, |
161 |
|
l'église sainte Marie
Madeleine, |
162 |
|
l'église du Dominus
Flevit, |
163 |
|
le Carmel du Pater
Noster, avec la grotte des enseignements |
164 |
|
ainsi que la mosquée de
l'Ascension. |
165 |
Malgré les critiques
adressées par Jésus aux pharisiens et aux légistes, il accepte
l'invitation d'un pharisien, signe qu'il n'a pas d'exclusives. S'il
se présente comme un pauvre, il vit aussi au contact de gens riches, car
Simon est un homme riche qui offre un repas de fête dans une cadre
confortable. | |
166 |
|
Ce repas aurait eu lieu
à Béthanie, près de Jérusalem. En hébreu, Béthanie signifie : la
maison du pauvre, la maison de l'humilité. |
167 |
|
Actuellement, bien que
sa population soit en majorité musulmane, ce village a conservé le
souvenir du passage de Jésus et du signe qu'il fit en faveur de Lazare,
connu pour être l'ami de Jésus, ainsi que ses soeurs, Marthe et
Marie. |
168 |
|
Le village s'appelle
aujourd'hui El-Azarîye, et on y montre un tombeau, qui est faussement
identifié à la tombe de Lazare creusée dans le roc.
|
169 |
|
C'est à partir des
pentes du mont des oliviers que Jésus est entré triomphalement à
Jérusalem. |
170 |
|
Cette entrée de Jésus
dans la ville sainte se déroule dans le cadre de la semaine qui précède la
Pâque. |
171 |
|
C'est l'incident des
vendeurs chassés du Temple qui a mis le feu aux poudres, même s'il est
vraisemblable qu'il a eu lieu plusieurs mois avant la dernière semaine de
Jésus. |
172 |
|
Par ce geste, Jésus se
met au-dessus des plus hautes autorités et s'oppose au culte normal.
Toucher au Temple, c'était s'exposer à faire éclater une affaire
d'état. |
173 |
|
Le Temple de Jérusalem
n'était pas seulement un lieu sacré (en grec : naos), un
lieu dans lequel seuls les prêtres pouvaient entrer, mais le Temple
(ieron) constituait un vaste domaine qui entourait le sanctuaire
proprement dit. Le Temple formait une immense esplanade qui bordait le
sanctuaire. C'était une sorte de place publique, bordée de portiques où
régnait, au temps de Jésus, une animation très orientale |
174 |
|
Le sanctuaire
proprement dit domine de plusieurs mètres ce marché. Cette fois, l'entrée
est interdite aux païens : "qui sera pris sera seul responsable
envers lui-même, car mort s'ensuivra". |
175 |
|
La décision est
prise : l'affrontement que Jésus avait porté jusque dans la capitale
ne peut avoir d'autre issue que son arrestation et sa mise à mort. La
proposition de Judas Iscarioth aux grands prêtres arrivera à point nommé
pour hâter les événements. |
176 |
|
A l'approche de la fête
juive de la Pâque, Jésus a soin de faire préparer le repas par ses
disciples. La maison où eut lieu cette célébration pascale est inconnue.
ce peut être n'importe quelle maison dans le labyrinthe des ruelles de la
ville. Et pourtant, en se référant aux indications précises
concernant l'homme qui porte une cruche d'eau, il est légitime de situer
plus précisément ce lieu dans le quartier des esséniens. En effet porter
l'eau était une tâche exclusivement féminine dans le judaïsme de l'époque.
Seuls, les esséniens, par souci de pureté rituelle absolue,
effectuaient eux-mêmes cette tâche. |
177 |
|
La salle que l'on
propose actuellement comme celle de la Cène, bâtie par les franciscains au
quatorzième siècle, dans le style gothique, est une salle haute dont la
voûte est soutenue par des chapiteaux caractéristiques de l'époque. |
178 |
|
Elle se situe à
l'endroit où la première communauté chrétienne s'assemblait après la
Pentecôte. Après la mort de Jésus, il est plus que vraisemblable que ses
disciples ont trouvé refuge dans cette même salle, et que c'est là qu'ils
seront réunis quand Jésus leur apparaît, le dimanche de Pâques. |
179 |
|
Un climat festif a
présidé à la Cène. Il ne fait pas de doute que Jésus ait dit beaucoup plus
de choses que ce que les évangélistes ont rapporté. |
180 |
|
Ils n'ont retenu que ce
qui était nouveau, soit parce que le rituel juif était assez connu pour
les chrétiens venus du judaïsme, soit parce que ce rituel n'offrait que
peu d'intérêt pour les chrétiens venus du paganisme. |
181 |
|
Le dernier repas de
Jésus est suivi de son agonie et de sa prière solitaire au jardin de
Gethsémani. C'est sans doute à ce moment que Jésus a pu mesurer pleinement
le destin tragique qui allait être le sien |
182 |
|
Après avoir chanté les
psaumes d'action de grâce, à la fin du repas pascal, Jésus s'en va, par la
vallée du Cédron, jusqu'au jardin de Gethsémani. |
183 |
|
On peut encore voir les
marches qu'il emprunta pour descendre à la vallée du Cédron, à proximité
de l'église saint Pierre en Gallicante (au chant du coq), qui rappelle que
Pierre renia son maître par trois fois. |
184 |
|
Jésus est effrayé
devant un événement qui doit survenir et sur lequel il ne peut avoir de
prise directe, un événement auquel il ne peut donner personnellement
un sens. Il est dépourvu devant la mort qui approche de lui. |
185 |
|
Il est seul, car les
hommes qu'il a choisis sont défaillants, l'un d'eux le trahit,
l'autre va le renier, les autres dorment sans se rendre compte de
l'importance de ce qui se déroule pendant leur sommeil. |
186 |
|
Pour Jésus, c'est
l'heure du rejet, de l'abandon par ceux qui l'entourent, c'est l'heure de
la mort. Dans sa prière au Père, à qui tout est possible, il demande
d'écarter la coupe de souffrance. Mais il comprend quelle est la volonté
du Père, il s'y abandonne avec confiance. |
187 |
|
Le rôle de Judas fut
d'indiquer l'endroit où saisir son maître, car beaucoup de pèlerins
campaient sur le mont des Oliviers pendant la période pascale, rendant
difficile la reconnaissance d'une personne au cours de la nuit.
|
188 |
|
Les gardes trouvent
Jésus paré à toute éventualité, tandis que des disciples, non
préparés, s'enfuient et se dispersent, laissant Jésus seul aux mains
de ses ennemis. |
189 |
|
Après son arrestation
au jardin de Gethsémani, Jésus est traduit devant un tribunal juif, le
Sanhédrin, grand conseil comprenant soixante et onze membres, chefs
religieux des familles sacerdotales, membres de l'aristocratie
laïque et scribes, divisés en deux tendances : les pharisiens et les
saducéens. |
190 |
|
Ce grand conseil se
réunit dans le palais du grand prêtre. |
191 |
|
Les prêtres ne
manquaient pas de mobiles pour chercher à faire périr Jésus :
|
192 |
|
il ne respectait pas le
sabbat, il ne respectait pas le Temple, il se moquait ouvertement des
prêtres et des pharisiens, il se prétendait fils de Dieu. |
193 |
|
Pendant que se décidait
le sort de Jésus, dans la cour du palais du grand prêtre, Pierre reniait
son maître. |
194 |
|
Sous des apparences de
procès régulier, ce premier procès de Jésus devant les autorités
juives a été bâclé. Même si le Sanhédrin avait quelque pouvoir pour
ordonner l'exécution d'une sentence pour un motif religieux, tel
que le blasphème, il n'avait pas le pouvoir d'ordonner la mise à
mort. C'est pourquoi il faut porter l'affaire devant le procurateur
romain, Pilate, qui séjournait à Jérusalem, pendant les périodes
de fêtes. |
195 |
|
Les milieux sacerdotaux
livrent Jésus à Pilate, en invoquant non plus des motifs religieux,
mais en présentant Jésus comme un agitateur qui refuse de payer
l'impôt et veut rétablir la royauté sur Israël. L'intention qui
dirigeait les prêtres était double ; il fallait faire condamner
Jésus, et surtout discréditer absolument sa mémoire parmi le
peuple. D'où la conversion du motif religieux en motif politique
d'incitation à la révolte et à la sédition. |
196 |
|
Pilate est un
procurateur romain ordinaire qui pense surtout à sa carrière et
qui mène une guerre froide contre les chefs juifs. Quand on enferme Jésus
dans ses prisons, il ne représente pour lui qu'un épisode
négligeable. |
197 |
|
Pilate s'aperçoit
certainement qu'on lui présente un procès truqué, et se trouve dans
l’embarras, quand on lui présente Jésus. Il aurait sans doute aimé trouver
le moyen de décliner la compétence de son pouvoir, mais les grands
prêtres, qui jouaient le rôle de procureurs de justice, lui
présentent Jésus comme un dangereux nationaliste,
invoquant contre lui des accusations auxquelles Jésus ne
répond pas, car il ne les accepte pas. |
198 |
|
Interrogé, Jésus ne
répond rien aux accusations portées contre lui. Pilate ne trouve
pas de motif de condamnation dans la personne de Jésus et dans ses
actes. |
199 |
|
Mais il va abandonner
Jésus, mais auparavant, conscient du fait que Jésus pouvait être
populaire, il va faire un geste susceptible de lui attirer la faveur
des foules, même s’il devait déplaire aux chefs des prêtres qu'il
semblait mépriser. Pilate propose inconditionnellement de
remettre Jésus en liberté ; la foule rejette cette proposition et,
sous l'incitation des prêtres, réclame la mise en liberté de Barabbas et
la crucifixion de Jésus. |
200 |
|
Le gouverneur romain
est alors contraint de se soumettre à la vindicte populaire, et
conformément à l'usage romain, il fait flageller Jésus avant de le
faire crucifier. |
201 |
|
La foule, en délire,
approuve sa condamnation, elle hurle à la mort et préfère libérer un
assassin plutôt que de laisser vivre Jésus. Jésus est « le
prophète assassiné ». Jésus est l'innocent qui souffre à la
place d'un coupable. |
202 |
|
Le condamné devait
porter lui-même l'instrument de son supplice, le patibulum, jusqu'au lieu
de l'exécution. Jésus, après avoir été châtié sans raison, doit quand même
être mis en croix. |
203 |
|
Mais les outrages et
les tortures l'ont épuisé. Il n'arrivera sans doute pas au lieu de
son exécution. Il ne convient pas que le condamné ne subisse pas son
châtiment jusqu'au bout. L'épuisement physique de Jésus
explique le fait qu'un passant soit réquisitionné pour porter la
croix avec lui. Cet homme sera un certain Simon qui revenait des
champs. |
204 |
|
En arrivant sur le
Golgotha, Jésus sera dépouillé de ses vêtements. Dépouillé de
tout caractère humain, il connaît la condition de l'esclave révolté. |
205 |
|
La crucifixion, comme
peine de mort, ne s'appliquait pas aux citoyens romains qui étaient
décapités, les juifs, selon leur loi, étaient lapidés. |
206 |
|
Pour décrire
l'exécution, les évangélistes sont très sobres. Les condamnés, qui
devaient subir ce châtiment, habituellement des esclaves révoltés,
étaient cloués, les bras étendus sur le patibulum, puis on fixait cette
barre transversale sur un poteau vertical, le stipes, préalablement
dressé à hauteur d'homme. |
207 |
|
Les pieds du condamné
étaient alors cloués. Une sorte de siège supportait en partie le poids du
corps afin que celui-ci n'entraîne pas une déchirure des membres
supérieurs fixés préalablement. |
208 |
|
Le crucifié mettait
souvent de très longues heures avant de mourir, non pas par perte de sang,
mais plutôt par une lente asphyxie. |
209 |
|
Les inventeurs de ce
type d'exécution sont les Perses et les Phéniciens, puis les Grecs et les
Romains l'ont certainement adopté en raison de son caractère très
spectaculaire. |
210 |
Sur la route de son
supplice, la tradition veut qu'il rencontra sa mère. La quatrième
station du chemin de croix est un oratoire, Notre-Dame du Spasme, avec un
haut-relief d'un sculpteur polonais évoquant cette rencontre. | |
211 |
|
Une tradition très
ancienne, qui ne trouve aucune référence dans les évangiles
canoniques mentionne qu’une femme aurait essuyé le visage de Jésus
marqué par les souffrances et défiguré par les mauvais traitements. |
212 |
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Véronique a franchi les
obstacles qui se dressaient entre elle et Jésus, elle a surmonté la haine
des rieurs pour accomplir un geste de tendresse, en prenant le parti
de la victime contre les oppresseurs. |
213 |
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Le voile de soie
qu'elle a utilisé et sur lequel les traits du visage de Jésus sont
restés imprimés fut remis à la basilique saint Pierre de Rome en
707. |
214 |
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Il était suivi d'une
grande multitude du peuple, entre autres de femmes qui se
frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. |
215 |
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La Via Dolorosa (chemin
de croix à Jérusalem) se termine dans le Saint Sépulcre qui recouvre
le Golgotha, la colline sur laquelle Jésus fut crucifié et sur laquelle se
trouve aussi le tombeau où son corps fut déposé. |
216 |
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On entre dans cette
basilique par le côté gauche, l'autre côté ayant été condamné par
Saladin. |
217 |
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A droite, en entrant,
se trouve le Golgotha, monticule de forme arrondie, auquel on accède
par un escalier abrupt. C'est là que Jésus est dépouillé de ses
vêtements, qu'il est mis en croix, qu'il meurt, et qu'il est descendu de
la croix. |
218 |
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Seul un petit groupe de
fidèles assistera à sa mort, impuissant, au pied de la croix,
sur un mont extérieur de Jérusalem, le Golgotha ou Calvaire, le lieu
dit du Crâne. |
219 |
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C'est là qu'ils le
crucifièrent, ainsi que deux autres, un de chaque côté et au milieu Jésus.
Pilate avait rédigé un écriteau qu'il fit placer sur la croix, il portait
cette inscription : Jésus le Nazaréen, le roi des Juifs.
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220 |
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Jésus, comme tous les
crucifiés, est accablé des sarcasmes de la foule, qui passe et qui
regarde la mort faire son oeuvre. |
221 |
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Jésus meurt après six
heures de souffrances, non sans avoir suscité une véritable
profession de foi de la part d'un centurion romain : « Le
centurion qui se tenait devant lui, voyant qu'il avait
expiré, dit : Vraiment cet homme était Fils de Dieu ».
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222 |
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La loi mosaïque, en
vigueur à Jérusalem, même sous la domination romaine, ne permettait
pas que des cadavres soient exposés en croix durant la nuit, surtout en
période de fête, et encore plus cette nuit-là qui connaissait la
grande préparation pascale. |
223 |
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Des soldats viennent
briser les jambes des condamnés, mais s'apercevant que Jésus est déjà
mort, ils ne lui brisent pas les jambes et lui percent le côté
d'un coup de lance. |
224 |
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Selon la loi romaine
également en vigueur, les exécutés politiques pouvaient bénéficier,
par grâce spéciale, d'une sépulture honorable. Rien n'empêchait qu'un
sympathisant puisse obtenir le corps du crucifié. |
225 |
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Joseph d'Arimathée,
membre influent du Sanhédrin, en demanda l'autorisation à Pilate.
Avec Nicodème, disciple de Jésus mais en secret, Joseph descend le
cadavre de la croix, le dépose au pied du Golgotha. |
226 |
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C'est là que les femmes
firent, selon la tradition, une onction d'huile parfumée au corps de
Jésus, avant que celui-ci ne soit conduit dans une tombe creusée dans
le roc, dans un jardin proche du lieu de la crucifixion. |
227 |
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Les autorités
sacerdotales qui avaient réussi à se débarrasser du prophète
galiléen se félicitaient d'avoir réussi à éviter des histoires
avec le gouverneur, surtout en cette période d'affluence. |
228 |
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Elles étaient
soucieuses de fêter la Pâque et ne se préoccupèrent pas des
déclarations de Jésus qui avait affirmé qu'il ressusciterait le
troisième jour. Elles ne se soucièrent absolument pas de
l'ensevelissement et n'apposèrent donc pas les scellés sur la pierre
du tombeau. |
229 |
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Les premiers récits
chrétiens n'ont pas cherché à évacuer le caractère
scandaleux de la croix : l'arrachement de Jésus à l'existence humaine
n'a pas été édulcoré, comme s'il s'était agi d'une sorte de
demi-mal. |
230 |
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Pourtant, ses disciples
reconnaissent qu’il demeure vivant, non pas qu'il soit revenu
purement et simplement à la vie qu'il possédait avant son
arrestation et sa crucifixion, comme si son cadavre avait été réanimé
d'une manière ou d'une autre. |
231 |
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Si son procès et son
supplice avaient bien mis en valeur qu'il avait été rejeté pour avoir
revendiqué une relation particulière avec Dieu, sa résurrection va
manifester, à ceux qui ont des yeux pour voir, la réalité de cette
relation et de cette intimité. |
232 |
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C'est à partir ou à
travers l'événement de la résurrection que les disciples ont pu
comprendre tout le sens et tous les enjeux de la vie de Jésus. |
233 |
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Mais c’est aussi à
partir de cet évènement fondateur que s’élaborera d’une manière ou d’une
autre l’ensemble de la doctrine chrétienne. |