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L’islam       

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Personne n'a jamais mis en doute l'existence de Mahomet, même si celui-ci est entré vivant dans la légende, tout affirmant lui-même qu'il n'était qu'un homme semblable à tous les autres.

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Aucun événement extraordinaire n'a présidé à sa conception ou à sa naissance ; et le déroulement de son existence n'a absolument rien d'extraordinaire ou de divin.

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On sait d'ailleurs très peu de choses sur la vie de Mahomet avant la révélation qui lui a été faite : c'est sur cette période se son existence que les traditions ultérieures ont le plus fabulé.

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Les dates les plus certaines qui concernent la vie du Prophète sont celle de son émigration de La Mekke à Médine en 622 et celle de sa mort dans la ville de Médine en 632.

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Ces deux dates, et celles des grands événements qui ont pu se produire entre elles, sont très assurées, tandis que les dates antérieures sont beaucoup plus incertaines, que ce soit la date de sa naissance ou que ce soit la date de la première révélation.

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Néanmoins, il est tout à fait assuré que Mahomet est bel et bien un personnage historique, dont la vie ne saurait être rejetée purement et simplement dans la mythologie religieuse. Muhammad, ou Mohammed - dont le nom a été francisé en Mahomet - est un prénom relativement courant à l'époque : il signifie : le loué.

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Il naquit à La Mekke dans une ancienne tribu arabe les Qoraïchites qui prétendent descendre d'Ismaël, fils d'Abraham, et qui ont la garde de la Kaaba, lieu où tous les pro­phètes depuis Abraham se rendent en pèlerinage pour vénérer les idoles et la pierre noire d'origine météorique.

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Les spécialistes s'accordent pour situer son an­née de nais­sance en 571, faisant des calculs par­fois dou­teux. La seule base sûre de la datation de sa naissance est le fait qu'il soit né du vivant de l'empereur perse Khosrô ler, c'est-à-dire avant 579. Il n'a que deux mois quand son père Abd'allah meurt à Yathrib, qui par la suite deviendra Médine. Sa mère étant pauvre, l'enfant est confié par son grand-père paternel, Abd al Muttalib, à une nourrice venue de la campagne, Hâlima, une bédouine à qui Mu­hammad conser­vera toujours une profonde affection.

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Il restera en nourrice jusqu'à l'âge de six ou sept ans : pendant ses années, passées auprès d'Hâlima, il gardera les moutons avec son frère de lait... C'est la légende qui rapporte cette occupation de l'enfant : tout prophète n'a-t-il pas été d'abord berger ? Une tradition, s'appuyant sur une interprétation littérale d'un verset du Coran : « N'avons-nous pas ouvert ton coeur, ne t'avons-nous pas dé­barrassé de ton fardeau qui t'accablait » rapporte que ce frère vit un jour deux anges renverser l'enfant, lui ouvrir la poitrine et ôter de son coeur une tâche noire. Cette interprétation veut signifier que, dès son plus jeune âge, celui qui allait devenir le Prophète du Dieu unique, a été lavé du péché originel, dont seuls Jésus, le Prophète envoyé aux chrétiens et Marie, sa mère, ont été préservés dès leur naissance.

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Il perd sa mère quand il a à peine de six ans. Son grand-père paternel le prend en charge, mais il devait mourir avant que l'enfant n'ait atteint l'âge de huit ans. Mahomet fut recueilli par un de ses oncles, Abu Talib, commerçant aisé, qui ne lui donna sans doute pas une brillante instruction, mais qui l'emmena avec lui dans ses voyages d'affaires. Les récits légendaires et apologétiques rapportent qu'au cours d'un voyage, il rencontra un moine-ermite nestorien, Bahira, qui lui aurait prédit sa mission prophétique.

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Son oncle ne tint guère compte de cette prédiction, mais il se mit sans doute à considérer son neveu d'un oeil différent. Ce que le jeune homme retenait de ses voyages, c'est une extraordinaire admiration pour la terre d’ Abraham, où avaient été révélés la Torah de Moïse, les Psaumes de David et l'Évangile de Jésus...

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Les années passent, et l'intelligence de Mahomet, ainsi que les vertus qu'il avait pu apprendre grâce à son oncle (loyauté, courage, générosité, sens de l'hospitalité...) lui permettent d'entrer au service d'une riche veuve, Khadija, qui lui fait conduire ses caravanes, en fait son homme de confiance, avant de le prendre pour époux. Mahomet accepta ce mariage même si Khadija était plus âgée que lui. Elle a quarante ans, lui vingt-cinq. De ce mariage devait naître quatre filles, les garçons mourant en bas âge. Ce mariage permettait à Mahomet de sortir de sa condition d’homme pauvre, pour devenir un homme considéré dans à La Mekke.

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La Mekke était un centre important pour les caravanes qui sillonnaient l'Arabie centrale : ses riches bourgeois s'étaient constitués en propriétaires des dépôts de marchandises devenant ainsi les maîtres du commerce. Mais, La Mekke était également un grand centre religieux pour toute la presqu'île arabique. C'est d'ailleurs au contact de son oncle que le jeune Mahomet avait pu s'initier aux traditions religieuses qui faisaient de La Mekke un centre de pèlerinage en même temps qu'un centre commercial. 

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 Les arabes de la péninsule étaient polythéistes. Ils adressaient des prières, à heures fixes, à Allah, le dieu créateur de l'univers, ils lui offraient également des sacrifices d'animaux. Mais ce dieu supérieur n'était qu'un dieu parmi les au­tres, auprès de ses filles, dont Manât, la déesse du bonheur, et Allât, déesse du ciel, auprès d'Hubal, le dieu de la foudre, et auprès d'une quantité d'autres dieux dont les pouvoirs bénéfiques ou maléfiques étaient connus des bédouins. Les nomades croyaient également aux esprits du désert, les djinns qui se réifiaient dans les arbres et dans les pierres du désert.

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Dans cette cité de La Mekke, se trouve le sanctuaire de la Pierre Noire, cons­truit, selon les affirmations de la tradition, par Abraham : c'est autour de la Kaaba que s'effectuent les nombreux pèlerinages entretenus par les Qoraïchites avec un soin et un zèle jaloux, d'au­tant plus que toutes les questions religieuses sont source d'apport financier. Par sa naissance, Mahomet se trouvait faire parti du clan de Qoraïchites, même si ce clan n'avait plus à son époque une grande puissance financière.

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Au septième siècle, la Kaaba se présentait comme un cube de pierres à ciel ou­vert, dans un angle duquel se trouvait la Pierre Noire, apportée par Abraham, situé au centre d'une très grande place, sur laquelle se trouvait le puits de Zemzem.

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Des idoles de pierre grossièrement sculptées entouraient ce temple autour duquel s'accomplissait le rite principal du pèlerinage : la septuple circumambulation dans le sens contraire des aiguilles d'une montre.

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Mais l'Arabie n'était pas entièrement polythéiste. D'autres influen­ces religieu­ses s'y exerçaient également : des juifs et des chrétiens s'étaient installés dans cet immense territoire ; à La Mekke, seuls, les juifs constituaient des commu­nautés organisées, les chrétiens restant dispersés, sans hiérarchie, d'autant qu'ils ne consti­tuaient qu'une minorité regroupant des esclaves et des petits arti­sans. Mais ces croyants, avec leur idéal monothéiste, allaient prépa­rer le ter­rain à la révélation islamique. Dans la famille de Khadija, certains commençaient à protester contre l'idolâtrie polythéiste pratiquée dans la ville : ils avaient été au contact de monothéistes au cours de leurs voyages d'affaires et ils trouvaient que le culte polythéiste était en décadence. Ils sentaient naître en eux le besoin d'un ascétisme sur le modèle des ermites chrétiens qu'ils avaient rencontrés.

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La tradition aime à faire connaître que c'est à l'âge de quarante ans que Mahomet eut sa révélation de la part de Dieu par l'ange Gabriel. On n'a guère de détails sur les circonstances qui entourèrent sa vocation ; mais l'on sait que Mahomet, à l'instar des grands prophètes d'Israël et de Jésus de Nazareth, avait entrepris de faire de fréquentes retraites dans le désert : c'est au cours de l'un d'elles que, dans la joie d'un coeur purifié par ces pratiques ascétiques, il eut la révélation d'être envoyé par le Dieu unique pour annoncer les paroles mêmes d'Allah au peuple arabe, jusqu'alors enfermé dans le polythéisme païen.

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C'est un jour de Ramadan que l'ange Gabriel lui apparut et lui confia une mission. Selon la tradition et les différentes biographies du prophète, c'est au cours d'une nuit de la dernière décade du mois de Ramadan que cette infusion de la Parole de Dieu se fit dans celui qui allait devenir l'envoyé d'Allah. Cette nuit est appelée : nuit du Destin, nuit du Décret, c'est la nuit bénie du Coran. « Oui, nous l'avons fait descendre, durant la nuit du Décret. Comment pourrais-tu savoir ce qu'est la nuit du Décret ? La nuit du Décret est meilleure que mille mois ! Les anges et l'Esprit descendent durant cette nuit, avec la permission de leur Seigneur, pour régler toute chose. Elle est paix et salut, jusqu'au lever de l'aurore ».

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Pendant que Mahomet dort, un être mystérieux, un ange de Dieu, créateur de l'univers, se manifeste à lui, tenant un rouleau d'étoffe à la main, rouleau couvert de signes, en lui intimant l'ordre de lire ce qui s'y trouvait écrit. Mahomet découvre alors qu'il a été choisi le Dieu unique, pour être son envoyé, chargé de proclamer aux hommes le message contenu dans ce rouleau : ce message, regroupant les révélations fragmentaires, constituera le Coran.

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En se réveillant, Mahomet a conscience d'être investi d'un message à transmettre : un livre est descendu dans son coeur, il devra le transmettre... Il est d'abord peu confiant dans sa mission, mais son épouse, Khadija, saura convaincre cet homme qui vient se confier à elle, en lui racontant ce qui s'était passé au cours de cette nuit qui apparaît décisive non seulement dans la vie de Mahomet mais dans l'existence de l'Islam. Au lieu de prendre son époux pour un fou ou pour un possédé à l'esprit dérangé, elle regarde avec confiance celui qui vient de lui raconter son incroyable révélation, elle a confiance en lui, elle croit qu'il est bien l'homme que le Dieu unique a choisi pour être le prophète de son peuple.

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Mahomet était investi d'une mission divine et il fallait l'encourager dans la voie qui s'ouvrait devant lui. En effet, une vie nouvelle s'ouvrait devant lui, et les embûches allaient se dresser devant chacun de ses pas : la parole qu'il allait recevoir de la part de Dieu n'était pas facile à transmettre, la révélation du Dieu unique allait le faire passer par la nuit la plus obscure. Rien n'est plus terrible que de se trouver en face du Dieu vivant, Maître, Créateur et Seigneur de toutes choses et de tous les hommes.

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Mahomet  apprécie la Bible dont il isole tous les personnages qui ont pu être « soumis à Dieu ». Du jour au lendemain, Noé, Abraham, Ismaël, Isaac, Israël (Jacob), Joseph, Salomon ou Jésus, deviennent musulmans (soumis), puis musulmans sans le savoir et bien sûr, sans protester. Il récupère de même Adam, Moïse, Aaron, David, Salomon, Job, Jonas, Zacharie, Marie, Jésus (Issa), Jean-Baptiste (Yahya).

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S'inspirant des ascètes chrétiens ou arabes, Mahomet effectue de nombreu­ses retraites. Vers 610, il prend l'habitude de réciter, puis dicter à un secré­taire les paroles que l'archange Gabriel (Djibril) lui rapporte. À travers elles, il s'en prend aux notables de la Mekke. Il prône l'humilité, la justice, la redistribu­tion des biens aux pauvres et aux orphelins. Dans les premiers temps, la mission que Mahomet ve­nait de recevoir demeura réservée à quelques intimes. Après son épouse, son cousin Ali, le fils d'Abu Talib, fut le premier à accepter le mes­sage, puis ce fut le tour de Zaid, un homme que Mahomet avait lui-même adopté, n'ayant pas eu de fils avec Khadija.

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Deux hommes influents se joignent à la première communauté des fidèles : Abu-Bakr et Omar qui plus tard dirigeront eux-mêmes la communauté musulmane, quand elle aura pris son essor. En dehors de sa famille, Mahomet ne réussit à se faire entendre que des petites gens de la Mekke, beaucoup plus faciles à toucher que les grandes familles bourgeoises.  

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Les adversaires de Mahomet ne tardèrent pas à lui reprocher de s'entourer de gens peu recommandables. Le Coran souligne cette incompréhension : « Les chefs de son peuple, qui n'étaient pas croyants, dirent : Nous ne voyons en toi qu'un mortel semblable à tous les autres. Nous ne te voyons, à première vue, suivi que par les plus méprisables d'entre les hommes. Nous ne voyons en vous aucune supériorité, et nous vous prenons, au contraire, pour des menteurs ». Ce à quoi, le Prophète ne pouvait que répondre que Dieu seul pouvait juger les hommes, recevant l'hommage de ceux qui croyaient en lui.

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Mahomet comptait beaucoup sur sa propre famille pour assurer le succès de sa mission divine. Il a été aidé par Abu-Bakr, qui lui suc­céda à la tête de la communauté musulmane : c'est cet ami fidèle qui l'appuya le plus, en recherchant la modération et en faisant toujours prévaloir la modération sur la passion et sur les sentiments.

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Il convainc quelques Mekkois, révoltés ou de condition modeste, mais s'attire la réprobation de ses concitoyens attachés aux divinités ancestrales. En trois ans, il s'entoure d'une petite cinquantaine de disciples. Ils sont une centaine au bout de cinq ans.

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Mais à la compassion ou à l'indifférence envers ces hommes, qui se livraient à des pratiques de piété, succédèrent la raillerie, l'ironie et le mépris. Le passage à l'hostilité s'est effectué lorsque Mahomet osa se présenter devant la communauté mekkoise comme l'interprète autorisé de la volonté du Dieu unique, qui l'envoyait annoncer l'imminence du Jugement dernier. Dieu, le Grand Justicier récompenserait les hommes selon leurs actions et les punirait de la même manière. Ses compatriotes le raillaient, quand il leur présentait des descriptions du paradis et de l'enfer. Non contents de se moquer de lui, en soutenant que ses propos n'étaient qu'une adaptation des fables des anciens, ils s'attaquèrent aux thèmes de son message en le discréditant au maximum, lui proposant de se faire soigner à leurs frais. La lutte devint ouverte lorsque Mahomet et ses fidèles osèrent afficher publiquement leur foi, par des rites dans la Kaaba et en public : des accrochages eurent lieu et le sang coula, l'heure de la première persécution avait sonné.

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Ses protecteurs (sa femme et son oncle) meurent en 619. Il épouse Saouda, veuve mais bonne ménagère, puis une fillette de six ans, Aïcha (au total, il se mariera avec une dizaine de femmes dans un climat de scandales et de rivalités). Mahomet entrait en conflit avec les familles mek­koises, en particulier avec les Qoraïchites, dont la tribu gardait ses privilèges religieux et financiers dans les pèleri­nages. Ceux-ci risquaient de disparaître si on se mettait à écouter celui dont l'influence leur sem­blait trop grande. Les opposants à la nouvelle religion dispersaient ses fidèles quand ils priaient à l'écart, couvraient la voix de Mahomet quand il prêchait, l'insultaient ouvertement, lui crachaient au visage ; avec indifférence, Mahomet accueillait ces provocations et ne s'intéressait qu'à ceux qui étaient susceptibles de se convertir et de partager sa foi monothéiste. La rupture est complète avec ses concitoyens lorsqu'il leur révèle ce qu'il a reçu : « O vous, les incrédules ! je n'adore pas ce que vous adorez, vous n'adorez pas ce que j'adore. A vous, votre religion, à moi la mienne », et encore quand il annonce la profession de foi fondamentale de l'Islam : « Dieu est Unique, Dieu seul, lui l'impénétrable. Il n'engendre pas, il n'est pas engendré. Il n'a pas d'égal ».

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Mahomet se rend compte que son action est vaine dans sa ville ; il entre en contact avec des tribus du voisinage, puis avec les habitants de la ville de Yatrib. Des habitants de cette oasis avaient été conver­tis par les soins d'un envoyé de Mahomet, et quelques-uns, venus au pèlerinage à La Mekke, en 620 et 621, avaient demandé au Prophète qu'il vienne s'installer chez eux, s'engageant par serment à suivre sa religion et à respecter la morale qu'il pouvait leur proposer.

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Sûr de trouver à Yatrib de fidèles partisans et des adeptes convaincus, Mahomet fait partir les siens vers cette oasis, par petits groupes. Les Mekkois ne semblaient pas disposés à laisser le Prophète les rejoindre, la tradition parle même d'un complot ourdi pour le tuer : il dut se cacher durant trois jours dans une caverne, avec son fidèle ami Abu Bakr, avant de pouvoir s'expatrier lui-même. La tête des deux hommes fut mise à prix quand les Mekkois découvrirent le subterfuge, mais rien ne pouvait arriver à ceux qui avaient comme unique protecteur le Dieu souverain de l'univers.

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C'est le début de l'émigration ou « hégire », en 622. Cette émigra­tion est le point de départ de l'ère musulmane : le 12 rabi de l'an 1, correspondant au 24 septembre 622 du calendrier julien. L'oasis de Yatrib allait devenir Médine, ma­dinat an-nabi, la ville du Prophète.

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Quand il arrive à Yatrib, l’oasis située au Nord de la Mekke compte environ trois mille habitants, formant une population plus paysanne que la ville commerçante de La Mekke. Aussitôt, Mahomet fait fi­gure de chef d'un état théocratique, au milieu de ces émi­grés, dont le statut était relativement précaire, puisqu'ils avaient tout quitté, tout sacrifié à la cause de leur foi nouvelle. Seulement, si certains Médinois avaient demandé à Mahomet de venir dans leur oasis, il s'en faut de beaucoup que tous les habitants de l’oasis soient d'accord, que tous admettent les croyances musulmanes : en plus des Juifs qui repoussaient vigoureusement toute progression d'une religion étrangère, il se trouvait aussi des Arabes qui se montraient particulièrement réticents à se soumettre à l'autorité d'un étranger.

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Toutefois, Médine est une ville de tolérance, alors que La Mekke avait totalement rejeté les idées nouvelles ; et Mahomet, de simple prédicateur qu'il était, fut bientôt considéré comme un véritable chef d'État. Il exerçait d'ailleurs ses fonctions avec autant d'habileté diplomatique que de souplesse et de ténacité, parvenant à se faire admettre par tous les habitants. 

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À Médine, par le jeu d'un pacte entre tribus arabes rivales, la vie s'organise au­tour de la communauté (Umma) qui trouve ses ressources dans le pillage des caravanes mekkoises. Pour le Prophète, tous les groupes de la cité se devaient une mutuelle assistance, quelle que soit leur religion, et par cette assistance, ils devaient assurer la défense de leur ville. Les juifs conservaient la liberté de leur culte, en mémoire du voyage nocturne que Mahomet fit à Jérusalem, en compagnie de l'ange Gabriel.

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En effet, quelque temps avant de quitter sa ville natale, après la mort de son épouse Khadija et de son oncle Abu Talib, alors qu'il était accablé par ce double deuil et qu'il était déjà prêt à porter sa prédication en dehors de sa ville, Mahomet fut emporté dans un voyage miraculeux. Il fut transporté du temple sacré de La Mekke jusqu'au temple éloigné, El Aqsa, de Jérusalem ; et des ruines du Temple, il monta jusqu'au pied du trône divin. 

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Pour Mahomet, le culte juif gardait sa valeur, et les fidèles judaïsants de Médine furent donc autorisés à conserver leur culte, puisqu'ils adoraient le Dieu unique, et suivaient l'enseignement traditionnel des prophètes d'Israël. Ces juifs de Médine avaient le droit de compter sur la protection des Arabes, mais, en contrepartie, ils avaient le devoir de contribuer aux frais de guerre éventuels que les musulmans pouvaient entreprendre contre leurs adversaires éventuels. L'arbitrage de toute contestation entre les habitants de l'oasis revenait au Prophète.

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Les principaux articles de la loi que Mahomet voulut imposer à cette nouvelle communauté furent les principes de l'Islam : la reconnaissance du Dieu unique et la foi en lui, le souverain de l'univers, la croyance aux fins dernières et au jugement final qui devait régler le destin de tous les hommes, selon le bien ou le mal qu'ils avaient accompli au cours de leur existence terrestre, la croyance également en l'intervention de Dieu dans le cours de l'histoire des hommes.

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D'autres articles fondamentaux vinrent s'ajouter par la suite, comme les piliers de la foi islamique. Mais il suffisait d'imposer ces premiers principes pour créer des liens entre tous les adeptes de la nouvelle communauté. Pour cimenter les liens qui pouvaient se créer entre ses fidèles, qui avaient quitté La Mekke, pour suivre les prescriptions de l'Islam, et les habitants de l'oasis qui les avait accueillis, Mahomet estima que la construction d'un foyer communautaire, d'une mosquée était une tâche urgente à réaliser. 

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Au début, ses fidèles jeûnent le jour de la fête juive de l'expiation (Yom Kippour), ce qui n'incite pas pour autant les Juifs de Médine à se rallier à la nouvelle religion. Le jeûne est ensuite fixé le mois anniversaire d'une escarmouche victorieuse contre des Mekkois venus secourir une caravane ; Mahomet ne se tourne plus vers Jérusalem pour prier ; la nouvelle religion se détache de ses ancrages primitifs, s'affirme et s'impose par tous moyens : ses détracteurs sont assassinés, un clan juif est expulsé de Médine et ses biens confisqués, la dernière tribu juive restée dans la ville est massacrée (624). Mahomet veut rétablir l'idéal juif et chrétien dans sa pureté originelle chez ceux dont il juge qu'ils l'ont corrompu et qu'ils ont manipulé les écritures, Torah autant qu'Évangile...

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La Mekke tombe en 630. En neuf ans, il s'assure l'Arabie et la soumet. L'économie de pillage (razzia) atteint ses limites : Mahomet sonne l'arrêt des razzias entre tribus arabes. L'ère de la conquête a sonné, on soumet de nouveaux territoires, de nouveaux peuples.

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Il meurt à Médine d'une courte maladie, âgé de soixante-trois ans.

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Les trente années qui suivent la mort du prophète sont déterminantes pour l'histoire. Elles ouvrent une période d'expansion et de conquête mais surtout, du fait de la question de succession, elles sont à l'origine de la division du monde musulman. La disparition de Mahomet est suivie d'une grande confusion car la communauté n'a aucune indication explicite sur la manière de se choisir un dirigeant. La rupture survint immédiatement après la mort du prophète en 632 car ce décès inattendu laissa la communauté sans chef.

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Actuellement encore, le monde musulman est divisé en deux groupes, les sunnites et les chiites. Les sunnites sont considérés comme les musulmans orthodoxes et représentent près de 90% des musulmans. Les compagnons du Prophète auraient passé outre à sa volonté en désignant l'un d'entre eux, Abu Bakr, beau père de Mahomet, comme premier calife. Celui ci régna de 632 à 634. Il réprima les mouvements de mécontentement au sein des musulmans d'Arabie et étendit les frontières de l'Islam à la Syrie.

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Omar lui succéda jusqu'en 644 et étendit les frontières de l'Islam en Egypte et en Iran. Grand homme politi­que, Omar fut le premier à se déclarer « commandeur des croyants ». Il fut assassiné ; à sa mort, six des compagnons de Mahomet élirent un nouveau chef du clan des Omeyya­des, Othman qui régna jusqu'en 656. Il fit promulguer le texte officiel du Coran, il se rendit impopulaire en pratiquant des détournements de fonds et fut accusé de népotisme. Il fut assassiné à Médine ; ce meurtre fut à l'origine du schisme sunnisme-chiisme.

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Les chiites affirment, depuis le deuxième siècle, que Mahomet a désigné comme devant être son successeur, Ali, son cousin, époux de sa fille Fatima et père de ses petits-fils, Hassan et Husayn. Ils représentent environ 10% des musulmans. En 657, un troisième groupe se forma, les Kharidjites qui se désolidarisèrent d'Ali.

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Le sunnisme vit naître quatre écoles juridiques. L'école des Hanafites, fondée par Abu Hannifa (699-767) fut la première et la plus répandue, elle est libérale et laisse le champ libre à la raison et au libre arbitre. L'école des Malékites, fondée par Malik ibn Anas (715-795) est conservatrice et s'appuie sur le droit coutumier en vigueur à Médine au temps du prophète. L'école des Chaféites a été fondée par Ach-Chafii (767-820) élève des écoles précédentes qui a établi des distinctions dans les principes juridiques. L'école des Hanbalites, fondée par Ahmad ibn Hanbal (780-855) incarne une piété rigoureuse, traditionnelle et sans compromis. Ces écoles qui s'affrontaient parfois durement sont arrivées à s'harmoniser en ce qui concerne la pratique de la religion.

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Les chiites ne reconnaissent comme imams que les descendants directs du prophète. Des divergences existent cependant chez eux sur la personne qui clôt la série des imams. C'est ainsi que l'on distingue trois groupes. Pour les Zaïdites, la lignée des imams se termine par Zaïd, un fils du quatrième imam tombé vers 740 au cours de la révolte contre les Omeyyades. Ils sont modérés et tolérants. Pour les septimaniens ou ismaïliens, la lignée des imams se termine avec Ismaïl, fils du sixième imam qui fut appelé par ce dernier à lui succéder avant son décès en 760. Leur doctrine laisse une place importante à la spéculation et comporte des éléments hérités de la Perse ancienne et du mysticisme néoplatonicien.

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Deux courants théologiques et politiques naquirent en 1094, les mutazilites et les nizârites. Les Duodécimains constituent la branche de plus importante du chiisme. Ils reconnaissent douze imams comme descendants légitimes d'Ali, le cousin et gendre du prophète et ils soutiennent que les quatre premiers califes usurpèrent sa place. Ils maintiennent que seuls les des­cendants directs d'Ali sont d'authentiques imams, infaillibles en matière de religion.

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Le caractère distinctif des duodécimains tient à ce qu'ils croient au retour de l'imam caché. Ils disent que, en 874, le dernier des douze imams, Imam al-Mahdi disparut pour obéir à la volonté de Dieu. Ils pensent que al-Mahdi « le bien guidé » est un personnage messianique qui viendra sur terre pour délivrer l'homme du mal et instaurer la règne du bien à la fin des temps et restaurer la religion vraie.

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 Le dogme de l’Islam

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La dogmatique n'a pas la même importance que dans le christianisme. Il n'y a d'ailleurs pas à proprement parler de dogmes en islam. Les disciplines reines  de la théologie sont le commentaire et la réflexion juridico-éthique. Alors que, dans le judaïsme et le christianisme, les dogmes sont sujets à de nombreuses interprétations, en raison de leur complexité, l’islam est une religion facile à comprendre, parce qu’il s’est fixé des dog­mes simples qui peuvent être admis par tous les fidèles, sans prêter le flanc à des discussions interminables. Mais la difficulté de l’islam réside plutôt dans le mélange du religieux et du législatif, du sacré et du judiciaire... C’est que l’Islam n’est pas simplement une religion comme les autres : c’est tout un mode de vie que le croyant est invité à adopter pour suivre le chemin de Dieu tout au long de sa vie quotidienne au milieu de l’ensemble de la communauté des fidèles.

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L’ensemble de la doctrine, fondée sur la révélation a Mahomet s’articule en trois petits articles de foi, d’où vont découler toutes les autres obligations du croyant : Dieu est Unique, Mahomet est l’envoyé de Dieu, dans la ligne des prophètes des temps antérieurs, Le jugement dernier, annoncé par Mahomet, de la part de Dieu récompensera les croyants et punira les infidèles. 

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Dans chaque langue, il existe un ou plusieurs termes utilisés pour désigner Dieu. Mais, en arabe, Allah est le nom spécifique du seul Dieu. Ce nom n’a ni pluriel ni genre. Ceci montre son caractère uni­que quand on le compare avec le mot « dieu », qui peut s’exprimer au pluriel (dieux) ou au féminin (déesse).

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Des explications contradictoires sur les origines du mot arabe Allah, qui est apparenté au nom donné à Dieu dans les autres langues sémites, ont été avancées. La plus reconnue indique qu'il s'agit de la contraction de al-ilah, « le dieu ». On suggère que les arabes païens de l'ère préislamique, bien que vénérant plusieurs dieux, ont fini par poser l'existence d'un dieu supérieur aux autres, souvent désigné simplement par « le dieu ». Mahomet utilisa ce nom existant pour se référer au Dieu unique dont il est le Prophète. Le nom d’Allah est employé pour désigner Dieu par les arabophones, musulmans ou chrétiens. Ce nom est mentionné plus de deux mille cent cinquante fois dans le Coran.  En araméen, une langue qui s’apparente à l'arabe et que Jésus parlait, Dieu est également appelé Allah.  

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L'Islam enseigne qu'il n'existe qu'un seul Dieu pour tous les hommes quelle que soit leur langues. Comment les chrétiens et les juifs pourraient-ils avoir un Dieu différent ? Il n’existe qu’un seul Dieu, unique et incomparable, qui n'a pas de fils ni de par­tenaire. Personne n'a le droit d'être invoqué, imploré, prié, ou être l'objet de quelque acte d'adoration à part lui.  Il est le véritable Dieu, et toutes les autres divinités sont fausses.  Le concept de divinité dans l'islam présente de nombreux points communs avec ceux du judaïsme et du christianisme. Dieu est considéré comme unique, parfait et éternel, omnipotent et créateur du cosmos. 

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Des non-musulmans prétendent qu’Allah est sévère, cruel, exigeant d’être obéi, ni tendre ni bienveillant, alors que chaque sourate, à une exception près, commence par le verset : « Bismillahi ar-rahmâni ar-rahîm » (Au nom de Dieu, le Miséricordieux, le Bienveillant). Sa miséricorde occupe une place essentielle dans l’islam. Sa bonté se manifeste par ses bénédictions matérielles et spirituelles. Le prophète l’a comparée à la bonté d’une mère pour son enfant. L'islam emploie fréquemment d'autres noms pour désigner Dieu, ils expriment des qualités de Dieu. Il existe quatre-vingt-dix-neuf noms par lesquels on désigne Allah, ce sont « les plus beaux noms de Dieu ». Les musulmans se donnent aussi des noms patronymiques formés par l'un des noms de Dieu précédé du terme abd (« serviteur de ») : Abd Allah, Abd al-Rahman, Abd al-Ra­him, etc…

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Pour rendre un culte authentique à Allah, l’islam reconnaît l’existence des anges créés de lumière, ailés, purs, immortels porteurs des com­mandements divins qui n'adorent que Dieu, lui obéissent, et n'agis­sent que sur ses ordres. Des noms propres sont attribués à certains anges. Le Coran en mentionne quelques-uns et définit leur fonction. Gabriel (Jibrîl) et Michel (Mikaïl), qui a la haute main sur les forces de la nature. Quand ils descendent du ciel, les anges peuvent prendre une forme humaine parfaite. Le rôle de ces anges est de louer la divi­nité de Dieu, nuit et jour, sans se lasser ; mais il est aussi de servir d’intermédiaires entre Dieu et les hommes : ce sont eux qui transmettent, par exem­ple, aux prophètes les messages divins.

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Ainsi en est-il particulièrement de Jibrîl, qui est considéré par le Co­ran comme le messager privilégié de Dieu ;

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Mikaïl est l’ange qui veille sur l’ensemble de la nature ;

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Izraïl est l’ange de la mort,

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tandis que Izrafil est l’ange qui sera chargé de sonner au clairon l’heure du jugement dernier.

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Il faut aussi compter les deux anges gardiens que Dieu accorde à chaque homme pour qu’ils soient les témoins de ses bonnes et de ses mauvaises actions ; ils seront présents, au moment du jugement, comme les garants de la conduite de chaque homme, avant que celui-ci ne puisse entrer dans le Paradis ou qu’il ne soit condamné à la Géhenne du feu éternel. 

 67

 

Quant à Iblis, celui qui a refusé de se prosterner devant le premier homme, il a été maudit de Dieu et condamné à errer éternellement, mais il réussit à se concilier les grâces d’une foule de démons, que la tradition préislamique connais­sait déjà sous le nom de djinns, formant avec eux tout un peuple qui sera puni, au jour du jugement, en raison du mal qu’il aura fait à l’ensemble de l’humanité.  

 68

 

Le Coran cite encore Mâlik qui commande la garde de l’enfer, et mentionne aussi Harut et Marut qui apprennent la magie aux démons. Enfin, il est question de quatre anges que le Livre ne nomme pas : Munkar et Nakir, Muba­bas­har et Bashîr qui interrogent les hommes dans leur tombe, la nuit de leur enterrement.

 69

 

Les anges jouent un rôle en vue d'assister les croyants pour soutenir leur lutte contre les infidèles. Les anges ont des fonctions au ciel, sur terre et aussi dans l'au-delà. Au Jugement dernier, huit anges porteront le Trône de Dieu. D'autres accueilleront les créatures de Dieu et introduiront les heureux au paradis ou précipiteront les dam­nés dans la fournaise et participeront à leurs supplices. Certains anges auront un pouvoir d'intercession pour les croyants. Ils implorent Dieu de pardonner aux repentis. La tradition dit également que deux anges se tiennent l'un à droite de chaque homme et écrit ses bonnes actions, l'autre à sa gauche et inscrit les mauvaises.

 70

 

Croyance aux prophètes et aux messagers de Dieu

 71

 

La miséricorde de Dieu à l’égard de l’humanité s’exprime dans le fait qu’il a voulu envoyer aux hommes des prophètes, pour qu’ils puissent proclamer la nécessité de la foi au Dieu unique. Le croyant doit faire confiance aux envoyés de Dieu. Ces envoyés de Dieu ont été marqués par des signes qui ont pu accréditer leur mis­sion, dès leur première vocation. 

 72

 

Il y a eu beaucoup d’envoyés d’Allah depuis les origines du monde jusqu’à Mahomet, en commençant par Adam pour arriver jusqu’à Jésus, qui a été envoyé au peuple juif.

 73

 

Chacun des envoyés de Dieu a prê­ché le monothéisme dans un cadre défini de l’histoire et de l’espace ; avant Muhammad, ils étaient envoyés au peuple d’Israël, mais, Mahomet, le dernier des prophètes d’Allah, a reçu une mission universelle.  

 74

 

Il est Le Prophète de Dieu. Tous les autres prophètes ont eu besoin d’apporter des preuves de l’authenticité de leur mission, en accomplissant, par exemple, des miracles ou des si­gnes qui les accréditaient ; seul, Mahomet, le dernier des envoyés de Dieu, n’a pas eu besoin de preuve : le miracle du Coran, le livre même de la Parole d’Allah, a été sa preuve, une preuve à laquelle tous les miracles ne pouvaient rien ajouter.

 75

 

Mahomet est apparu dans l’histoire comme celui qui apporte le sceau divin de toute la Parole de Dieu pour l’ensemble de l’humanité. Le message de ces prophètes, tel qu’il peut apparaître dans le texte coranique, n’est cependant pas recopié ou retranscrit des livres dont ils ont pu être les auteurs ou les inspirateurs :

 76

 

le Coran ne prétend pas avoir emprunté ses sources aux livres antérieurs, il affirme que tout ce qui a trait aux prophètes a été l’objet d’une révélation particulière de Dieu. Celui-ci a voulu faire connaître à son Envoyé comment les prophètes de tous les temps ont été de parfaits musulmans, en prêchant le monothéisme contre tou­tes les formes d’idolâtrie courantes à leur époque.

 77

 

Les prophètes sont des êtres humains créés par Dieu mais n'ont aucune des qualités divines. Le dernier message envoyé à l'homme, et qui est une confirmation du message éternel de Dieu, a été révélé à Mahomet. Ainsi Mahomet est le dernier prophète à avoir été envoyé par Dieu.

 78

 

Il convient de considérer à présent tous ceux qui sont reconnus comme les prophètes envoyés par Dieu, en suivant l’ordre de la Bible, mais en les regardant tels qu’ils apparaissent dans le Coran. Tout d’abord, il faut citer le premier homme, Adam, qui a été placé dans le monde comme le lieutenant de Dieu.

 79

 

Un pacte avait été conclu entre Dieu et le premier homme, mais celui-ci, poussé par le démon, l’ange qui avait refusé de se prosterner devant cette nouvelle créature, ange qui a pour nom Iblis, a oublié le pacte conclu et n’a manifesté aucune résolution personnelle en face de Dieu.  Iblis tenta Adam, en lui indiquant l’arbre de l’immortalité qui ouvrait, selon lui, les portes d’un Royaume impérissable. Adam désobéit donc à Dieu, puis il est revenu de son erreur, et Dieu l’a de nouveau élu, en le dirigeant selon sa volonté.

 80

 

Le Coran mentionne Idris qu’on identifie habituellement au patriarche biblique Hénok, dont le récit de la Genèse parle également très briè­vement : Hénok vécut en tout trois cent soixante-cinq ans. Ayant suivi les voies de Dieu, il disparut car Dieu l’avait enlevé (Gen. 5, 23-24). Marcher dans les voies de Dieu, c’est agir conformément à la volonté de Dieu, et c’est donc déjà être un parfait musulman.  

 81

 

Noé fut envoyé par Dieu au peuple incrédule pour l’appeler à la conversion au temps du déluge. Noé construisit donc une arche au milieu des quolibets et des ricanements de son peuple, il le chargea d’un couple de chaque espèce animale et de ceux qui partageaient sa foi au Dieu unique. Et, au cours du déluge qui survint, personne n’échappa à la colère de Dieu, sinon ceux à qui Dieu lui-même avait fait preuve de miséricorde. Noé reçut alors les bénédictions de Dieu pour lui et pour tous ceux qui avaient placé leur foi dans le Seigneur de Noé. 

 82

 

Abraham, qui est l’ami de Dieu, ouvre une nouvelle étape dans l’histoire de la Révélation de Dieu aux hommes ; les Sémites, après lui, invoqueront le Dieu Un, en l’appelant le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. 

 83

 

Si la tradition biblique accorde une grande importance à la migration qu’entreprit Abraham pour aller dans le pays qui lui serait indiqué par Dieu, la tradition coranique insiste da­vantage sur la foi d’Abraham avant son départ, elle souligne ainsi les conditions dans lesquelles il entreprit sa migration, en brisant, de manière définitive, avec le polythéisme de ses pères et de ses compatriotes.  

 84

 

Le Coran mentionne, à plusieurs reprises, le sacrifice du fils d’Abraham, sans jamais le désigner ; aussi, tout porte à croire que la tradition islamique veuille voir, dans ce fils, non pas Isaac, comme dans la tradition biblique, mais Ismaël. Et, en souvenir de ce sacrifice d’Abraham, les musulmans ont conservé l’habitude d’immoler un mouton le dixième jour du mois du pèlerinage.  

 85

 

A la suite de son père, Abraham, Ismaël fut entièrement soumis à la volonté de Dieu. C’est la raison pour laquelle la tradition coranique le place également parmi les prophètes : « Mentionne Ismaël dans le li­vre, il était sincère en sa promesse, ce fut un apôtre et un prophète. Il ordonnait à sa famille la prière et l’aumône. Il était agréé par son Seigneur »

 86

 

Isaac, l’autre fils d’Abraham, est aussi considéré comme un prophète parmi les justes. Le Coran a retenu également le nom de certains descendants du prophète et patriarche Abraham : Jacob, le fils d’Isaac et donc le petit-fils d’Abraham, et Joseph, l’un des douze fils de Jacob. L’histoire de Joseph est racontée dans les cent onze versets d’une sourate qui porte son nom. Tous ces descendants d’Abraham sont déclarés justes et soumis à Dieu en toute chose c’est-à-dire authentiques musulmans.

 87

 

Le Coran rapporte l’histoire de Moïse d’une manière comparable à celle de la Bible. Les commandements, transmis par Dieu à Moïse, au moyen de la Loi, sont rappelés dans le Coran, mais sans référence à la révélation mosaïque. Ce que Dieu ordonne, c’est de ne reconnaître que le culte du Dieu unique en refusant aux croyants le culte des idoles qui ne sont que du vent ; le croyant doit mener une vie exemplaire, se soumettant en tout à la volonté du Dieu unique, se refusant de l’invoquer vainement dans des serments, demeurant bon et respectueux à l’égard de ses parents, s’interdisant toute forme d’homicide, se refusant à tout ce qui pourrait faire tort à son semblable, comme le mensonge, l’adultère, le vol, la jalousie, la calomnie.

 88

 

Quelques versets coraniques sont consacrés aux trois premiers rois du peuple d’Israël : Saül, David et Salomon. De ceux que la Bible considère comme les grands prophètes d’Israël, le Coran ne retient que quelques noms. 

 89

 

D’abord, le prophète Élie est simplement mentionné au nombre des justes. Élisée, le successeur biblique d'Élie, est ainsi mentionné également, comme l’un de ceux qui ont été choisis par Dieu pour être guidés sur la voie droite.

 90

 

Jonas, présenté comme l’homme au poisson, est également évoqué par le Coran, à plusieurs reprises.

 91

 

Le Coran mentionne enfin Job parmi les prophètes du peuple d’Israël : Job est l’exemple typique du serviteur souffrant, qui se soumet en tout à la volonté de Dieu, se comportant comme un véritable et fidèle musulman.

 92

 

A la suite de ces envoyés de Dieu, qui ont traversé l’histoire du peuple hébreu, de nouveaux envoyés sont chargés d’une mission par Dieu, dans l’histoire du peuple des chrétiens. C’est ainsi que le Coran parle de Zacharie, de Jean-Baptiste, de Marie, la Vierge Mère de Jésus : le Coran relate le récit de l’Annonciation, de l’annonce faite à Marie qu’elle serait la mère de Jésus ; il affirme la conception virginale de cet enfant, juste parmi les justes ; il raconte sa naissance au milieu de prodiges, puisqu’il parle comme un homme plein de sagesse, dès son berceau.

 93

 

Jésus est donc un prophète, il est considéré, puisqu’il est mentionné, dans le Coran, treize fois comme le fils de Marie et trois fois comme le Messie, fils de Marie. A la fin de sa vie, Jésus monte au ciel, d’où il reviendra pour le jugement dernier ; les musulmans ne peuvent pas admettre que Dieu ait laissé crucifier Jésus, ils pensent que Dieu l’a miraculeusement rappelé à lui et qu’un autre homme a été crucifié à sa place, ils partagent les doutes des juifs sur la mort et la résur­rec­tion de Jésus, admises comme vérités fondamentales de la foi chrétienne.

 94

 

Si les chrétiens ne cessent d’affirmer la mort sur la croix de Jésus et sa résurrection, c’est qu’ils ont perverti le message évangélique ; d’ailleurs, ils ont même falsifié ses paroles. Celui-ci a an­noncé la venue d’un autre Prophète après lui. Les chrétiens auraient refusé d’admettre que Jésus était envoyé de Dieu pour annoncer la venue d’un autre que lui, ils au­raient même substituer au terme « periclutos » qui signifie en grec : le loué, l’illustre, et qui se traduit en arabe par Ahmad (qui est aussi le nom de Mahomet), le terme « paracletos », le Paraclet qu’ils ont traduit par le Saint-Esprit, altérant ainsi profondément le message même de celui qu’ils prétendent servir. Les chrétiens ont toujours caché cette annonce prophétique de la naissance de l’Islam.

 95

 

A côté des prophètes envoyés au peuple hébreu, des prophètes envoyés aux chrétiens, le Coran reconnaît l’existence de prophètes envoyés par Dieu aux Arabes, Houd, Salih et Chuaïb. A plusieurs reprises, il revient sur ces prophètes qui ont été envoyés par Dieu aux Arabes avec la mission de leur annoncer la nécessité de revenir au culte de l’Unique : ces prophètes étaient issus d’un peuple idolâtre, Dieu les avait institués comme ses envoyés au milieu de leur communauté, ils furent traités de menteurs par leurs compatriotes. Ainsi, des avertissements divins ont été adressés aux hommes de tou­tes les générations et de tous les lieux, mais les incrédules ont toujours refusé de croire en leur message, ils ont suscité et fortifié l’opposition à la parole des envoyés de Dieu.

 96

 

L’Islam affirme que Dieu a révélé des livres à ses messagers afin qu'ils servent de preuves et de guides pour l’ensemble de l'humanité. Parmi ces livres, il y a le Coran, que Dieu a révélé à Mahomet. Dieu a assuré la protection du Coran contre toute altéra­tion.

 97

 

Après l’affirmation du monothéisme absolu et celle de la révélation faite aux hommes, le troisième dogme de l’Islam concerne la rétribution des hommes, selon le bien ou le mal qu’ils auront accompli au cours de leur existence. Tout le message des prophètes reconnus par le Coran peut se résumer dans un appel à se soumettre à la volonté de Dieu afin d’échapper à la menace du jugement que Dieu porte sur les hommes, et particulièrement sur le châtiment qu’il prévoit pour les incrédules. Le jugement récompensera le croyant et punira l’infidèle.

 98

 

L’affirmation de l’unicité de Dieu implique qu’il est le créateur et le maître souverain de l’univers. Lui qui n’est pas engendré et qui n’engendre pas a créé le monde, seul et à partir de rien. Si le Coran ne comporte pas un récit de la Création comme celui qui ouvre la Bible, il remarque cependant que Dieu a effectué sa création, d’une manière comparable à celle qui peut être affirmée dans la tradition judéo-chrétienne. Il suffit qu’il parle pour que ce qu’il veut parvienne à l’existence. C’est aussi en six jours qu’Allah a créé le ciel et la terre, et tout ce qu’ils contiennent, à commencer par l’homme. Il a créé tous les êtres vivants qui apparaissent comme autant de signes de sa puissance dans le monde, qu’il confie au premier homme comme à son lieutenant, puisque, à cet homme il a lui-même insufflé son esprit, en ordonnant par la suite aux anges de se prosterner devant ce qui était le sommet de la création. Les anges, qui sont en quelque sorte contraints de se prosterner devant l’homme, sont aussi des créatures de Dieu.

 99

 

Dieu, créateur de toutes choses, aime sa création et il manifeste sa miséricorde à chacune de ses créatures, mais il sait être aussi le juge intransigeant, qui impose son jugement sur l’ensemble de l’humanité, en considérant la manière dont elle aura vécu dans la soumission à sa volonté. Les actes divins de création et de conseils prennent fin avec l'acte du jugement dernier. Le jour de ce jugement, toute l'humanité sera rassemblée et les individus seront jugés séparément en fonction de leurs actes. Ceux qui auront « réussi » seront admis dans le jardin (paradis), et les « perdants », ou les mauvais, iront en enfer, bien que Dieu soit miséricordieux et pardonne à ceux qui le méritent.

 100

 

Dieu est le créateur, celui qui a parlé aux hommes par des prophètes, leur enseignant ses lois, il est le maître suprême de la vie et de la mort : il ressuscitera les hommes pour les juger et pour les rétribuer dans une vie future. En effet, pour la foi islamique, comme pour les autres religions, l’histoire humaine s’achève par la résurrec­tion des morts et le juge­ment, que les morts attendent dans leur tombe, sauf les prophètes et ceux qui sont morts martyrs pour la cause de Dieu, qui ont accès directement au Paradis éternel.

 101

 

Les incrédules, qui auront refusé de se soumettre à la foi monothéiste, seront condamnés au feu de la Géhenne, tandis que les croyants, qui auront accompli de bonnes oeuvres, en accord avec la foi, auront une récompense, celle de vivre pour tou­jours dans les jardins paradisiaques où ils demeureront immortels. Les prédictions, qui jalonnaient la prédication de Mahomet, ont certainement pu ébranler quelque temps ses premiers auditeurs polythéistes, en raison de la grande conviction qui animait le Prophète quand il parlait. Mais Dieu seul est le maître de l’heure du jugement. Si Mahomet ignorait le moment que Dieu seul pouvait fixer, il n’en savait pas moins que cette heure était inévitable et que le jugement arriverait, soit dans ce monde soit dans l’autre. Mais, ses compatriotes, polythéistes et incrédules, ne voyant pas l’heure advenir sur le champ, ne découvrant même pas les signes qui annonçaient la réalité de cette heure, se replongeaient dans leurs anciennes erreurs.

 102

 

Au jour du jugement, après les sonneries de clairon faites par Izrafil, annonçant la mort et la résurrection pour tous les hommes, chacun comparaîtra devant Dieu, muni du livre qui porte l’ensemble de ses actions, bonnes et mauvaises, en présence de ses deux anges gardiens. Ceux qui seront trouvés justes entreront en Paradis, qui est décrit comme une oasis agréable. Ceux qui seront trouvés injustes, incrédules, seront condamnés à la Géhenne, présentée comme un feu qui ne s’éteint pas. Naturellement, la description du paradis et de l’enfer utilise les métaphores suggestives que les Bédouins, habitués à la sécheresse et à l’aridité de la vie dans le désert, pouvaient comprendre et apprécier à leur juste mesure... Mais, il faut le souligner, toutes les descriptions ne sont que des suggestions, la réalité même du paradis ou de l’enfer étant inexprimable.

 103

 

L’Islam reconnaît en outre le « Al-Qadar », la prédestination divine ; cette croyance en la prédestination ne signifie pas que les êtres hu­mains n'aient pas de libre arbitre.  La prédestination est un attribut de Dieu par lequel il régit les choses selon sa volonté et sa science pour les faire exister au moment où il le veut. Dieu a donné aux êtres humains un libre arbitre, ce qui signifie qu'ils peuvent choisir entre le bien et le mal et qu'ils sont responsables de leurs choix. Dieu est le seul dispensateur des biens, et tout vient de lui. Cepen­dant, l’homme agit selon ses possibilités en cherchant à susciter les causes, tout en ignorant ce qui lui a été prédestiné. Chacun doit suivre le bon chemin en sachant que sa responsabilité sera engagée pour tout acte qu'il aura commis volontairement. La croyance en la prédestination ne signifie donc pas que l'homme doit perdre toute initiative, en restant les bras croisés, dans l'attente des événements. Il doit agir en conformité avec les prescriptions de Dieu, car personne ne connaît le futur. Ce n'est qu'après le déroulement des faits que l’homme pourra savoir ce qui lui avait été prescrit.

 104

 

Si l'homme ne fait que jouer la partition qu'Allah a écrite, faut-il en conclure que la liberté de l'homme n'est qu'illusion ? Plus épineuse encore, se pose cette question : comment comprendre la finalité d'un jugement dernier venant sanctionner des actes dont les hommes ne sont pas en dernier ressort les auteurs, mais les agents ? Religion de la soumission à Dieu, l'islam ne se traduit pas par un fatalisme face aux arrêts du destin en pensant que « tout est écrit ». L'homme est nanti d’une volonté qui le porte à choisir ses actes à chaque instant, à déterminer l'orientation de sa vie, en bien comme en mal. L’action humaine entre dans le cadre régi par un dessein divin qui a consigné le destin de la création. Le croyant doit donc agir selon la vertu et se montrer patient face aux vicissitudes de la vie, par une attitude faite certes de soumission, mais non pas d'inaction.

 105

 

Selon la dogmatique musulmane, l'Islam est une religion ouverte à tous. Aucune autorité ne détermine l'entrée, ou l'expulsion, d'un fidèle au sein de la communauté des croyants. Il suffit d'accepter les dogmes fondateurs, à savoir, les croyances suivantes : la foi en Dieu (Allah), la reconnaissance des anges, des Écritures saintes, des messagers de Dieu (Mahomet et tous les prophètes), l’attente du jour du Jugement, ainsi que la croyance en la prédestination.

 106

 

Le Coran est « Le Livre » par excellence, puisqu’il contient, pour les fidèles de l’Islam, l’ensemble du message que Mahomet a reçu de Dieu pour le transmettre d’abord aux Arabes puis à tous les hommes.

 107

 

Les Qoraïchites polythéistes réclamaient un miracle de la part de Mahomet, pour qu’il puisse ainsi être accrédité dans sa mission, il refusa de leur donner satisfaction. Les miracles sont peu efficaces dans le domaine de la foi : les fils d’Israël, après le passage de la Mer Rouge, s’empressèrent de construire un veau d’or qu’ils adorèrent, oubliant les prodiges dont ils avaient été les bénéficiaires. Les polythéistes mekkois n’auraient pas davantage été impressionnés par la vue des miracles que le prophète aurait pu accomplir pour justifier sa mission auprès d’eux. Le seul miracle accordé à Mahomet en face de ses adversaires idolâtres, ce fut la révélation des « ayats » (pluriel du terme « aya », qui se traduit par signe, témoignage, prodige) La révélation de chaque verset, la descente du ciel de chacun d’eux est considérée comme un don céleste, vraiment miraculeux.

 108

 

Les miracles des prophètes qui avaient précédé Mahomet dans l’histoire avaient été passagers, ils avaient été oubliés : mais la révélation de la Parole de Dieu, sous la forme des versets coraniques, devait constituer le miracle permanent. Ce miracle commence dès les premières phrases que Mahomet va entendre et qu’il répétera à son épouse et à quelques intimes. Au cours de la mystérieuse nuit, la nuit de la destinée, alors qu’il est âgé d’environ qua­rante ans, une voix lui intime l’ordre de lire, alors qu’il ne savait pas lire. En cette nuit de la destinée, le Coran descendit du ciel supérieur où il était conservé jusqu’au ciel inférieur, juste au-dessus de la terre ; puis, de ce ciel inférieur, les paroles de Dieu descendront vers les hommes par l’Envoyé qui les exprimera, pendant une vingtaine d’années, de manière à faire connaître aux hommes la volonté divine, à organiser la religion et le culte de Dieu et à faire triompher l’Islam à la face du monde.

 109

 

On pense, comme le souligne la tradition, que Mahomet était illettré, et qu’il se contentait de répéter les paroles de la Révélation qui descendaient en lui. Les premiers croyants recueillirent de sa bouche les premiers ayats révélés, les apprenant par coeur, de façon à pouvoir les transmettre à ceux qui deviendraient croyants.

 110

 

Dans un premier temps, les messages révélés sont confiés à la mémoire et transmis de bouche à oreille, selon une tradition orale. Pourtant, devant la multiplication des ayats, devant leur longueur composant des ensembles très différents, ensembles qui seront appelés « soura », d’où le nom de sourates donné aux chapitres du Coran, certains textes sont consignés par écrit sur des matériaux de fortune : omoplates de chameaux, morceaux de cuir... Mais ce besoin de fixer la révélation par écrit n’apparaît pas comme une urgence, ni au Prophète, ni à ses adeptes les plus proches. Mais cette notation reste très fragmentaire, et surtout rudimentaire, en raison de la pauvreté des matériaux ; des divergences prenaient déjà naissance dans cette transmission des révélations par l’écriture.

 111

 

 Ce n’est qu’après la mort du Prophète que ses proches s’inquiètent du sort qui sera réservé aux révélations coraniques. Les premiers califes, Abu Bakr et Omar, successeurs du Prophète, sur le plan temporel, décident qu’il fallait laisser aux générations suivantes un document complet, qu’il serait possible de consulter, pour régler les discussions pouvant surgir quant à l’interprétation des paroles prononcées par le prophète en écho avec la Parole même de Dieu.

 112

 

Un immense travail de compilation fut alors entrepris. Abu Bakr, le successeur immédiat de Mahomet, se lance dans cette entreprise, organisant un recueil qui ne jouira pas d’une grande autorité, en raison de leur caractère trop personnel, trop intime. C’est le troisième calife, Othman, qui ordonna de réunir dans un livre unique les différents textes qui avaient pu être réunis par les croyants : la recension qui fut entreprise était plus large et plus systématique que les souvenirs intimes des amis directs du Prophète. La fixation du Coran par écrit ne dispense pas les fidèles d’étudier ce texte, en l’apprenant par coeur. De la sorte, ce Livre révélé demeure toujours ce qu’il veut être, en raison même de son étymologie : une récitation de la Parole de Dieu.

 113

 

La division en chapitres (sourates) et en versets date du dixième siècle. Le Coran comporte cent quatorze sourates. La deuxième sourate est la plus longue, tandis que les dernières ne contiennent que quel­ques versets. La tradition s’est contentée d’indiquer, pour chaque sourate, s’il s’agissait d’un texte dicté à La Mekke ou à Médine, ce qui souligne clairement que le Coran, même s’il est la Parole de Dieu par excellence, n’en reste pas moins, un texte qui a connu une intervention humaine pour présider à sa rédaction.

 114

 

Ainsi, historiquement, le Coran a été reçu et transmis en deux grandes périodes, qui couvrent les deux époques de l’activité prophétique de Mahomet : celle de La Mekke, à compter de la nuit de la destinée jusqu’au moment de l’hégire, période que la tradition estime à une dizaine d’années, et celle de Médine, à compter de l’hégire jusqu’à la mort du Prophète, soit également une dizaine d’années. L’analyse scientifique montrerait que les premières révélations empruntent un style concis, avec des phrases courtes, un peu comme pour souligner l’aspect interpellant de la révélation. La période médinoise de la révélation regroupe des versets plus longs et beaucoup plus travaillés, soulignant ainsi le travail d’organisation de la première communauté croyante de Médine. 

 115

 

Dès les débuts de la révélation qui lui est faite, Mahomet est inquiet, il hésite en constatant la grandeur de la mission qui lui est confiée. Les premières révélations faites à Mahomet contiennent le sens de sa mission et les encouragements divins qui lui sont nécessaires pour surmonter les épreuves qui se dresseront devant lui. 

 116

 

Une suite de vingt-trois sourates vient illustrer l’expérience du Prophète : la révélation l’a frappé comme la foudre, son expérience du divin est unique, inexprimable. Néanmoins, l’objet qui lui a été révélé se doit d’être communiqué à tous les hommes, parce qu’il les concerne au plus haut point : il s’agit de leur salut. Mahomet est convaincu de la proximité du jugement que Dieu va opérer sur l’univers.

 117

 

Le châtiment est inéluctable, même si l’heure où il viendra n’est encore connue que de Dieu seul ; ce châtiment sera réservé aux impies, à ceux qui refusent de croire et de se soumettre à la voie droite, en conservant fidèlement la révélation. Tous les hommes seront jugés selon leurs conduites, les justes connaissant le sort des élus, les mauvais le sort des damnés. Les descriptions du jugement de Dieu devaient impressionner ceux qui recevaient le message : les imprécations de Mahomet se font violentes contre ceux qui ne suivent pas le chemin voulu par Dieu. 

 118

 

Comment l’homme peut-il échapper aux tourments du châtiment de Dieu ? Il lui faut suivre les préceptes enseignés par le Prophète. La mission de Mahomet est alors affirmée comme une sorte de corollaire à l’imminence de l’heure du jugement. Contrairement à ce que les premiers témoins pouvaient penser en voyant Mahomet pris dans les transes de la Révélation, il n’était pas possédé par quelque esprit mauvais, il était emporté par la Parole de Dieu qui se révélait à lui.

 119

 

Progressivement, à mesure que la révélation s’amplifie, les attaques de Mahomet contre ses opposants se font plus vives, et on perçoit que la rupture était déjà presque inévitable entre les adeptes du monothéisme absolu et les polythéistes idolâtres, qui refusaient de se convertir et de suivre les préceptes de l’Islam. Une série de sourates rappelle l’urgence de la conversion en raison de l’heure eschatologique qui ne fait qu’approcher, tout en invitant, de manière pressante, les auditeurs de Mahomet à s’engager dans les chemins de la conversion, en pratiquant l’aumône, en renonçant à leur conduite passée et en rendant le culte au Dieu unique.

 120

 

Par Gabriel, Mahomet avait reçu la révélation de l’unicité de Dieu : "Dieu est un, Dieu, lui seul !  Et c’est à lui seul qu’il voulait que soient rendus le culte et la prière". Le texte qui résume peut-être le plus parfaitement la révélation coranique, dans cette première partie de la prédication mekkoise, est la première sou rate, celle qui sert de liminaire à l’ensemble du Coran, et qui apparaît comme l’élément primordial de toute dévotion, dans le monde de l’Islam : Au nom de Dieu, celui qui fait miséricorde... 

 121

 

Comme la plupart des Mekkois restaient fermés à son message, Mahomet développa un nouveau thème de prédication : celui du prophète qui parle dans le désert. Vingt-deux sourates portent les traces de cette deuxième période mekkoise de la prédication coranique. Abraham est l’exemple du prophète qui n’est pas compris par les siens, puisqu’il ne réussit pas à convaincre son propre père. C’est sans doute alors que naît dans l’esprit de Mahomet l’idée d’une communauté de destin entre Abraham et lui. Chaque fois qu’une nation impie se détourne du vrai Dieu, celui-ci lui envoie un Prophète pour qu’elle puisse retrouver le chemin du salut, un Prophète comparable à Abraham, à Moïse, ou à Jésus... 

 122

 

Le propre de tous les prophètes est de souffrir pour la cause de Dieu. Aussi Mahomet finit-il pas ne plus s’étonner d’être la cible des sarcasmes des Mekkois idolâtres. Il ne doit pas se désespérer s’il n’arrive pas à convaincre ses compatriotes, il n’est pas responsable de l’endurcissement de leurs coeurs et de l’aveuglement de leurs yeux. Tant pis pour eux s’ils ne comprennent pas les avertissements qui leur sont adressés de la part de Dieu ! 

 123

 

Une troisième période mekkoise se dessine dans la révélation coranique. Les sourates qui composent cette partie de la révélation faite à Mahomet correspondent à des homélies que le Prophète devait adresser à l’ensemble des Mekkois. Mais, de fait, la prédication ne s’adresse plus seulement aux habitants de La Mekke, elle s’adresse aussi aux tribus avoisinantes, et les thèmes de la révélation sont repris, en affirmant une nouvelle fois les échecs des prophètes antérieurs, tout en soulignant la supériorité de l’Islam, qui apporte la vérité absolue sur le Dieu unique, transcendant, souverain de l’ensemble de l’univers. Après un exorde édifiant, les sourates rapportent des récits concernant les prophètes qui ont été méconnus par leurs contemporains, avant de se conclure par des menaces pour ceux qui n’acceptent pas le droit chemin de la foi islamique. 

 124

L’essentiel, dans la pensée de Mahomet, était de rompre avec le paganisme qui sévissait à La Mekke : il ne fallait pas que les nouveaux convertis soient tentés de retourner à leurs anciennes pratiques idolâtriques. C’est dans ce contexte, de la fin du séjour de Mahomet dans sa ville d’origine, que va se développer la vénération des fidèles pour Abraham, qui n’hésita pas à rompre avec les anciennes pratiques idolâtriques de son père pour se tourner vers le Dieu unique et lui réserver le seul culte authentique. 

 125

 

En rompant avec le polythéisme mekkois, en quittant sa patrie pour émigrer vers une oasis située à huit jours de marche de sa ville, Mahomet entreprenait ce qui allait devenir un tournant radical pour l’avenir de l’Islam : il lui fallait constituer une communauté de tous ceux qui avaient entendu l’appel prophétique qu’il leur avait lancé. Il lui fallait organiser cette communauté en un véritable état qui respecterait comme seule loi les principes de l’Islam. 

 126

 

C’est toujours d’en-haut, de Dieu lui-même que Mahomet recevra les consignes qui lui permettront de guider ses fidèles dans le droit chemin, en leur permettant d’affronter toutes les difficultés qui se présenteront à eux. Les révélations faites dans le cadre médinois sont les plus longues du Coran : elles ne portent plus simplement l’intérêt sur les questions strictement religieuses, mais elles insistent sur le fondement social de la nouvelle religion.

127 

 

Naturellement, la prédication médinoise du Coran reprend les thèmes développés à La Mekke, avec ses avertissements aux croyants et ses menaces contre les polythéistes idolâtres. L’émigration, l’hégire de Mahomet lui a fait changer d’attitude à l’égard de ses anciens compatriotes : il ne les considère plus seulement comme des hommes endurcis dans l’erreur, comme des ennemis personnels, ils deviennent les ennemis de Dieu qu’il faut vaincre, par tous les moyens, pour que la gloire puisse être rendue à Dieu seul. L’engagement religieux des fidèles va s’organiser en engagement politique : l’épée viendra au secours de la parole, les premiers convertis s’organisent comme les combattants de la foi. Le Prophète découvrait qu’il était urgent de recourir aux armes pour que la foi authentique puisse triompher.

128

 

C’est ainsi qu’un nouveau thème de la prédication du Coran apparaît, celui de la guerre sainte, « el jihad », guerre qui avait pour but premier de faire triompher la vérité sur l’erreur de l’idolâtrie. Cette prédication de la guerre sainte valut à l’Islam les reproches des chrétiens, ceux-ci ayant oublié les paroles de Jésus qui annonçait qu’il était venu apporter un feu sur la terre, pour séparer les membres d’une même famille, demandant à ses disciples de le préférer aux membres de leur famille et même à leur propre vie.  

129

 

A cette même époque, la prédication se fit plus violente contre les chrétiens qui furent confondus avec les juifs. A l’origine, il semble bien que Mahomet ait eu des contacts suivis avec quelques communautés chrétiennes, avec lesquelles il devait entretenir de bons rapports, même si, à plusieurs reprises, le dogme de la Trinité est condamné par la révélation coranique. Il est certain que les premiers croyants de l’Islam ont pu découvrir parmi les chrétiens des hommes proches d’eux, qui comptaient des prêtres, des moines, et même de simples laïcs qui ne s’enflaient pas d’orgueil et qui accomplissaient la volonté de Dieu dans l’humilité et dans le partage d’une vie communautaire simple. Par leur foi et leur charité, il apparaissait au Prophète que ces chrétiens pouvaient aussi goûter aux joies du Paradis. Cependant, quand les chrétiens byzantins s’opposèrent à l’avancée de la foi islamique, le ton de la prédication de Mahomet changea et il condamna les chrétiens, au même titre que les juifs. Certes, le Coran donne à Jésus les titres de Messie, de Verbe, d’Esprit émanant de Dieu, mais il se refuse toujours à lui reconnaître un rôle supérieur à celui d’un Envoyé de Dieu, comparable aux prophètes de tous les temps, il se refuse également à le reconnaître comme le Fils de Dieu, comme un associé du Dieu unique. 

130 

 

Les sourates, composées à Médine, furent certainement énoncées à l’occasion d’événements particuliers qui marquaient la vie de la petite communauté islamique. En entrant dans le cadre de la révélation coranique, ces sourates prenaient une dimension universelle. Ainsi, les ayats qui correspondent à cette dernière période de l’existence de Mahomet ne sont pas simplement des récits événementiels rapportés sous forme de chroniques, mais l’organisation sociale, économique, politique et religieuse d’une communauté ayant valeur exemplaire pour toutes les communautés à l’avenir. Les révélations médinoises serviront de base à toute la législation islamique, concernant les prescriptions du culte, les interdits sexuels et alimentaires, les devoirs moraux et politiques de chacun des croyants envers les autres croyants ou envers les infidèles.

131

 

Si le Coran, le Livre révélé par Dieu, se présente comme un bloc littéraire dont on ne peut changer ni la lettre ni l’esprit, pour demeurer dans le respect de la foi, il existe un autre livre sacré, source de référence pour les Croyants, même s’il ne se propose pas à eux comme la Parole de Dieu. Ce second livre, c’est la « Sunna », recueil, considéré comme sacré, des traditions : le terme arabe de sunna, désigne les règles de conduite, les pratiques adoptées et suivies par le Prophète, ses enseignements et ses exemples. Ce qu’a fait le Prophète, ce qu’il a édicté comme règle, a été bien fait, bien dit ; ses enseignements prennent alors force de loi, ils sont articles de lois. Si les musulmans veulent imiter la conduite de Mahomet, c’est dans la Sunna qu’ils peuvent facilement retrouver les exemples laissés par le Prophète, même s’il faut reconnaître que tous les musulmans ne sont pas entièrement d’accord sur toutes les traditions rapportées par ce second livre saint. 

132 

 

Pas plus que le Coran, ce livre n’a été composé du vivant de Mahomet, mais il a commencé d’être esquissé après sa mort pour répondre aux problèmes nouveaux qui se posaient à la communauté privée de son chef. Pour répondre à ces questions, on se référait aux usages qui étaient pratiqués par Mahomet et les siens, on interrogeait ses compagnons de la première heure à la dernière heure sur ses faits et gestes. C’est ainsi que fut composé un premier ensemble de traditions remontant à la vie du Prophète. Une sorte de compilation de l’enseignement oral venait s’ajouter à la compilation des ayats du Coran. Pour demeurer dans la fidélité à l’Islam, il convenait non seulement d’accepter le Coran, mais de suivre également les enseignements de la Sunna. 

133 

 

C’est dès la deuxième génération que ce travail de compilation est entrepris, en même temps que la rédaction d’un texte unique pour la révélation coranique : les traditions orales, véhiculées par les personnages réputés pour leurs connaissances des ayats, sont rassemblées par des auteurs, la plupart du temps persans, qui constituent des recueils, en éliminant les apocryphes. En effet, le genre littéraire du hadith était considéré avec tant de respect que certains croyants, même parmi les plus honnêtes, n’hésitaient pas à en confectionner de faux, dans le but de justifier telle ou telle décision pouvant avoir force de loi. Aussi, la règle sera-t-elle de ne reconnaître et de n’accepter que les hadiths ayant un rapport direct avec un texte coranique. Ceux-ci serviront de référence pour quiconque voudrait donner une interprétation du Coran ; en effet, il ne faudrait pas qu’un croyant se mette à traiter du Coran, sans faire référence à des traditions établies. 

134 

Les docteurs de la Loi coranique ont voulu intégrer les traditions orales qui circulaient bien après la mort de Mahomet dans un corpus explicatif : la Révélation prenait toute sa dimension et toute sa valeur universelle en s’appuyant sur la Sunna, qui faisait, en quelque sorte, l’exégèse du Coran pour constituer à partir de celui-ci une dogmatique et une législation purement islamiques. La loi civile, dans le monde soumis à l’Islam, devenait inséparable de la vie religieuse, telle qu’elle avait pu être proposée par le Prophète, l’envoyé d’Allah. 

135 

 

L'Islam est souvent présenté comme une religion d'interdictions et de contraintes. Elles existent et sont multiples, mais une comparaison avec les autres monothéismes montrerait qu'elles ne sont pas plus nombreuses. Seuls 3 % du Coran concernent des impératifs ou des sanctions. Ce sont les dimensions communautaires de la religion qui les rend plus visibles, surtout dans les sociétés arabes où le contrôle social (le regard de tous sur chacun) et le sens de l'honneur sont forts. Appartenir à la communauté des musulmans (Umma), tel que cela se dégage du Coran, c'est souscrire au respect de cinq principes essentiels (piliers) et y satisfaire. Certaines de ces obligations sont périodiques, d'autres quotidiennes ou exceptionnelles.

136

 

Le premier devoir de tout musulman, c’est de professer la foi, révé­lée au Prophète, enseignée dans le Coran, et explicitée par la Tradition. C’est ainsi que la profession de foi musulmane, la shahâda, est une composition tirée du Coran et de la Tradition. La première partie de cette confession de foi « il n’y a de Dieu qu’Allah » revient fréquemment dans le Coran, tandis que la seconde partie « Mahomet est l’envoyé d’Allah » a été ajoutée par la Tradition. 

137

Pour entrer dans la communauté de foi et de vie, il suffit au croyant de proférer cette shahâda, soit publiquement soit intérieurement, pourvu que ce soit dans la sincérité du coeur. Si, de plus, il obéit aux préceptes coraniques, il ne sortira plus de cette communauté. Religieusement, il n’y a pas d’autre obligation que de professer la foi, et de la renouveler chaque jour au cours des prières. Il n’est pas besoin d’en savoir davantage : Dieu seul sait tout, il connaît le bien et le mal ; il suffit de se conformer à sa volonté pour suivre la voie droite et parvenir ainsi au bonheur pa­radi­siaque.

138

Proclamer la profession de foi c’est reconnaître l’absolue unicité et transcendance de Dieu, son éternité et sa toute-puissance, c’est reconnaître que Dieu a parlé aux hommes par l’intermédiaire de prophètes, en particulier par Mahomet, qui détient le sceau de toute prophétie. C’est prendre conscience que le jugement de Dieu va s’opérer sur tous les hommes, selon leurs conduites, bonnes ou mauvaises. C’est reconnaître que le Coran est l’expression de la Parole de Dieu, telle qu’elle a été révélée au Prophète. 

139

 

Si la shahâda est la première obligation rituelle, la prière est une obligation beaucoup plus contraignante, puisqu’elle doit se renouveler cinq fois pendant les vingt-quatre heures de la journée. A partir de la puberté, le musulman est tenu d’accomplir ces cinq prières, en réponse à l’appel du muezzin qui, du haut du minaret, appelle tous les fidèles à la prière.

140

 

Celle-ci rythme la journée, puisque la première invitation à la prière rituelle se fait entre l’aurore et le lever du soleil, la deuxième juste après midi, la troisième au milieu de l’après-midi, la quatrième aussitôt après le coucher du soleil, et la dernière à un moment quelconque de la nuit. Chacune de ses prières se déroule d’une manière à peu près identique. Du haut du minaret de la mosquée, le muezzin appelle à la prière en psalmodiant les paroles : 

141

Allah est grand, Allah est grand. Il n’est pas d’autre divinité qu’Allah. Il n’est pas d’autre divinité qu’Allah. Mahomet est son prophète, Mahomet est son prophète. Venez à la prière. Venez à la prière. Venez à la félicité. Venez à la félicité. Il n’est pas d’autre Dieu qu’Allah.

142

 

Avant chaque prière, le fidèle doit procéder à des ablutions rituelles, pour se mettre en état de pureté légale, grâce à une ablution générale ou réduite selon les cas, qui peut être remplacée, le cas échéant par une purification avec de la terre ou du sable, s’il n’y a pas d’eau à la disposition du croyant. On ne peut se présenter devant Dieu sans s’y être préparé. 

143

 

Cette purification du corps (visage, oreilles, cou, mains et pieds) achevée, le croyant, qu’il se trouve dans une maison ou qu’il soit en plein air, s’oriente vers La Mekke et délimite un espace sur le sol qui le sépare du monde extérieur, utilisant souvent, pour ce faire, un tapis de prière. 

144 

L’office de prière se compose d’attitudes et de gestes, accompagnés de formules. Le croyant se tient debout, le visage tourné vers La Mekke ; puis, il lève les mains à la hauteur de ses oreilles, en prononçant une formule de sacralisation : « Dieu est le plus grand ! Allahou Akbar ! »

145

 

Ensuite, en plaçant ses mains sur la poitrine, il récite la Fatiha, la première sourate du Coran : « Au nom de Dieu, ce­lui qui fait miséricorde, le Miséricordieux. Louange à Dieu Seigneur des mondes, celui qui fait miséricorde, le Miséricordieux, le roi du Jour du jugement. C’est toi que nous adorons, c’est toi dont nous implorons le secours. Dirige-nous dans le droit chemin, le chemin de ceux que tu as comblés de bienfaits, non pas le chemin de ceux qui encourent ta colère, ni celui des égarés ». Puis, il récite une partie du Coran qu’il connaît par cœur. 

146

Alors, il dit la formule : « Dieu est le plus grand », il s’incline, les mains touchant les genoux en répétant trois fois : « Gloire à notre Seigneur le Sublime ». Il se redresse en disant : « Dieu accepte celui qui le loue, ô Seigneur, à toi la louange ». En redisant : « Dieu est le plus grand », il se prosterne, le visage touchant la terre, les mains allongées sur le sol, en répétant trois fois : « Gloire à mon Seigneur, le Très-Haut ». Puis, il s’assied, et se prosterne à nouveau, en prononçant les mêmes paroles. 

147

 

Le fidèle recommence sa prière, selon le nombre prescrit de formules qu’il doit réciter. Avant de terminer, le croyant s’incline une fois à droite et une fois à gauche, aussi bien pour saluer ses anges gardiens que pour appeler la bénédiction de Dieu sur ses frères dans la foi : « Que la paix soit avec vous et la Miséricorde de Dieu ». Ainsi il se trouve désacralisé et peut reprendre son activité ordinaire. 

148 

 

La pratique de ces prières à des moments définis de la journée permet à la communauté de se constituer en une vaste communauté mystique : sans montre et sans horloge, le plus humble bédouin du désert, en observant simplement le soleil, sait qu’il peut s’unir à la prière de la grande Umma islamique répandue à travers le monde. Il se trouve en communion avec tous ceux qui rendent un culte au Dieu unique et qui lui rendent la louange qui convient à sa Puissance. Ensemble, en suivant les mouvements astronomiques, les musulmans se mettent au diapason de l’univers qui rend grâce à Dieu pour tous ses bienfaits. 

149

 

Une fois par semaine, la prière de l’après-midi, ne se fait pas individuellement, mais communautairement, à la mosquée, au cours d’un service, pendant lequel l’imam dirige la prière. Cet « imam » agit comme les califes des premières communautés. Ce chef religieux est appelé ainsi chez les sunnites, il est appelé « ayatollah » chez les chiites, ou « mollah », ou « cheikh », selon les écoles religieuses. 

150

 

Toutefois, l’Islam ne connaît pas de hiérarchie ni de sacerdoce, si bien que lorsque plusieurs musulmans se réunissent pour prier, l’un d’entre eux peut se faire imam, guide de la prière commune. Cet office, même s’il ne se déroule pas dans une mosquée, dans les régions où l’Islam n’est pas encore implanté officiellement réunit les croyants : c’est le jour de l’assemblée. 

151

 

Le Coran insiste sur la nécessité de cette assemblée : la fréquentation de Dieu dans la prière est la meilleure des choses dans la vie. L’assemblée du vendredi est l’occasion d’une prédication par l’imam. Après la récitation de la shahâda, et d’un texte du Coran, l’imam prononce son sermon, caractéristique de cet office. 

152

 

Les hommes seuls se rassemblent pour cet office qui est l’unique forme de liturgie communautaire. Cette réunion des hommes, surtout dans les pays à majorité musulmane, constitue un spectacle étonnant : le bédouin et l’artisan, le riche et le pauvre, le notable et le plus petit commerçant se retrouvent ainsi côte à côte, unis dans la prière, la tête baissée devant Allah, Dieu plus grand que tout. 

153

 

Cette assemblée est commandée par une forte pression sociale : pratiquement, tous les hommes y participent, quelles que soient leurs convictions religieuses, plus ou moins profondes. C’est dans ce contexte qu’il est possible de percevoir la cohésion de tout un peuple dans l’unité de la religion, manifestée dans cette prière communautaire. 

154

 

Il existe aussi d’autres prières facultatives, comme les prières de la nuit ou des prières de demandes spéciales, telles les prières pour demander la pluie, ou les prières à l’occasion de la mort ou des funérailles d’un croyant. Mais elles n’entrent pas dans le cadre obligatoire de la prière rituelle. 

155

 

Si la prière manifeste, chaque semaine, l’unité de la communauté musulmane dans le cadre d’un petit territoire, le jeûne annuel, au mois de Ramadan, manifeste l’unité de la Umma à travers le monde. Ce jeûne n’est pas une pratique individuelle, c’est une manifestation sociale durant tout un mois lunaire. Pendant ce mois, tout musulman, ayant atteint la puberté, doit jeûner pendant la jour­née en signe d’humilité et de soumission à Dieu. Dans toutes les religions, le jeûne constitue une sorte de purification nécessaire à l’entretien de la spiritualité. 

156

 

Le jeûne du Ramadan fut institué, alors que Mahomet se trouvait à Médine dans la deuxième année de l’Hégire. Il est certain que le climat torride ne devait pas faciliter ce jeûne absolu pendant les différentes journées de ce mois ; mais le fidèle qui aurait pu succomber à la tentation de rompre le jeûne pour calmer sa soif se voyait encouragé par ses compagnons, qui menaient le même combat spirituel que lui. Ainsi, ce premier jeûne communautaire devait renforcer l’unité du groupe musulman : s’ils pouvaient s’abstenir de manger et de boire pendant tout un mois, les fidèles musulmans pouvaient se préparer à traverser les déserts et à partir à la conquête du monde, afin d’y répandre leur foi naissante. 

157

 

Cette première expérience du jeûne volontaire et communautaire devait se poursuivre à travers les siècles. Chaque année, le mois de Ramadan est marqué par l’abstinence diurne ; ce n’est pas un moment de tristesse, au contraire, le fidèle vit dans la joie de pou­voir s’imposer des privations afin de manifester sa soumission à Dieu et de lui plaire en toutes choses. 

158

 

Le jeûne est obligatoire pour tous, sauf pour les malades et ceux qui sont en voyage, sous certaines conditions. Il commence au moment de l’apparition de la nouvelle lune, qui est annoncée officiellement ; il doit être observé rigoureusement du lever au coucher du soleil. Avant l’aube, le fi­dèle formule son intention de jeûner, dans le respect de la tradition isla­mique, car sans cette intention de pureté légale, l’acte même de son jeûne ne serait pas valable. Cette épreuve, qu’il s’impose dans la prière et la pri­vation, manifeste sa foi d’une manière encore plus évidente que les prières rituelles ou que l’assemblée à la mosquée, le vendredi. Le jeûne consiste à ne rien absorber, à ne prendre ni nourriture ni boisson depuis la fin de la nuit noire jusqu’au coucher du soleil ; le tabac comme les relations sexuel­les sont interdits pendant les heures diurnes. Les juristes discutent sur certaines pratiques interdites ou permises pendant le Ramadan et sur les cas de dispense autorisés ou de remplacement compensatoire. 

159

 

Ce mois de jeûne est destiné non seulement à rappeler le souvenir du don du Coran, mais aussi à rappeler l’existence des pauvres : la faim rappelle aux riches que des pauvres ont faim durant toute leur vie. C’est un mois orienté spirituellement ; la permission de se sustenter durant la nuit n’intervient pas comme l’occasion de banqueter : les interdits de la journée cessent, il est possible au musulman de prendre un repas après le coucher du soleil et un autre avant l’aube. Ce mois apparaît comme l’occasion of­ferte aux fidèles d’exercer leur volonté, en vivant dans un climat de fête religieuse et familiale, d’autant qu’à la fin de ce mois prend place une des deux fêtes du monde musulman : la fête de la rupture du jeûne. Les ré­jouissances sont permises et même recommandées : les croyants sacrifient un mouton, après avoir prié et distribué des offrandes aux pauvres. 

160

 

Certes, le travail, la vie économique se ressentent beaucoup de ce mois de jeûne, car les privations diurnes et les veillées nocturnes épuisent. Dans les pays à majorité musulmane, les fidèles se trouvent en quelque sorte contraints de pratiquer cette abstinence volontaire, en raison de la pres­sion sociale ; dans les autres pays, où l’Islam s’est répandu, sans être majoritaire, certains croyants y souscrivent de plein gré ; c’est même, pour la plupart d’entre eux, un mois de retour à la pratique de la religion. 

161

 

Dans la pratique du jeûne, le musulman découvre une nécessité du partage de ses richesses avec les plus pauvres, cette nécessité prend force de loi dans l’obligation qui lui est faite de pratiquer l’aumône. Celle-ci, dans son acception légale, est désignée par le terme de « zakat » qui implique une idée de purification. L’aumône est destinée à purifier religieusement les biens dont le fidèle dispose mais dont il ne peut réellement jouir qu’en reconnaissant qu’ils appartiennent à Dieu. Cette obligation de l’aumône est d’origine coranique. Tout au long du Livre, le terme d’aumône revient régulièrement comme la nécessité d’une pratique de la charité envers les frères et envers tous les hommes. Les produits de cette aumône volontaire, et pour ainsi dire rituelle, comme a pu l’être la dîme dans la tradition chrétienne, doivent subvenir aux besoins des pauvres et de ceux qui les recueillent ; ils doivent aussi aider ceux qui luttent pour défendre la cause de l’Islam, ainsi que ceux qui auparavant rachetaient les esclaves. 

162

 

Cette sorte d’impôt servit, dès les origines de l’Islam, à alimenter les caisses de la communauté médinoise, notamment pour l’entretien de la lutte pour la propagation de la foi ; dès l’année 626, les juifs et les chrétiens résidant à Médine, et désirant poursuivre leurs activités dans cette ville, furent soumis à cet impôt qui devait les taxer très lourdement. Le payement de cette aumône se faisait initialement en nature, proportionnellement aux revenus de chacun : les paysans, les artisans, les commerçants devaient abandonner le dixième, ou parfois seulement le vingtième de leurs récoltes ou de leurs gains, en faveur des plus nécessiteux. Par la suite, cette aumône légale perdit de son caractère véritablement charitable pour devenir un réel impôt. 

163

 

Aujourd’hui, cet impôt, ayant beaucoup évolué, n’est plus distribué aux plus pauvres, mais il continue de servir à la communauté, pour la construction de mosquées, d’écoles ou d’hôpitaux. L’intention première de cette aumône est donc maintenue : il est important, pour le croyant, de reconnaître que tous les biens de ce monde appartiennent en propre à Dieu, les hommes n’en étant que les dépositaires et les gérants, usant de ces biens comme d’autant de bienfaits venant de Dieu. Dans cette même ligne, l’Islam interdit l’usure : s’il est possible de consentir un prêt, moyennant un intérêt, à quelqu’un qui a besoin d’argent pour un investissement, il n’est pas permis de demander un intérêt à celui qui se trouve dans le besoin, il est même recommandé de lui donner alors ce qui lui est nécessaire. 

164

 

La pratique de l’aumône légale a constitué, elle aussi, un grand facteur d’unification et de cohésion dans la communauté ; elle est citée en exemple par ceux qui veulent démontrer le caractère socialisant de l’Islam. Toutefois, la majorité des pays islamiques ont abandonné cette coutume pieuse, pour la remplacer par un impôt sur le revenu ; mais les plus fidèles parmi les musulmans s’acquittent de manière purement volontaire d’une autre aumône. Ainsi, pour la fête qui marque la fin du jeûne de Ramadan, le fidèle donne une aumône spontanée et privée à des croyants plus nécessiteux que lui, afin de leur permettre de fêter eux aussi la Rupture du jeûne. 

165

 

Dès avant Mahomet, La Mekke était une ville sainte, où les polythéistes se rendaient en pèlerinage pour vénérer leurs idoles. Tout pèlerinage porte en lui le désir du croyant de se tourner vers Dieu. Le désir du croyant est non seulement de se rapprocher de Dieu, mais aussi de mieux le connaître, devenant ainsi un meilleur pratiquant de sa religion Le pèlerinage répond à une obligation imposée à tout croyant adulte, libre de sa personne, dans la possibilité matérielle d’accomplir ce voyage vers les lieux saints.

166

 

Le but du pèlerinage est le sanctuaire de La Mekke, au centre duquel se trouve la Kaaba (le cube), édifice rectangulaire en pierre (dix mètres sur douze en base, et quinze mètres de hauteur), entouré d’un dallage et recouvert d’un voile noir, renouvelé chaque année. 

167

 

A l’un des angles se trouve la pierre noire considérée comme une pierre céleste jetée par Dieu sur la terre ; à l’endroit où cette pierre avait été jetée, Seth, un fils d’Adam, aurait édifié une première Kaaba, que le déluge universel, au temps de Noé, aurait détruite, et que le patriarche Abraham aurait reconstruite, aidé de son fils Ismaël. 

168

 

Le croyant pénètre à l’intérieur de la Kaaba par une porte si­tuée à deux mètres du sol : cet intérieur ne comprend que des lampes et des inscriptions. 

169

 

Un autre édifice abrite une pierre qu’Abraham aurait foulée, et sous une coupole se trouve la source de Zemzem. Il existe encore beaucoup de petits édifices dans la cour du sanctuaire... 

170

 

Le territoire de La Mekke est sacré, il est, en principe, interdit à tout non musulman, surtout pendant le temps du pèlerinage. De plus, le pèlerin doit accomplir un certain nombre de règles strictes, afin de se mettre en état de sacralisation. La première chose que le pèlerin doit faire, qu’il arrive à pied, en avion ou en bateau, c’est de se changer pour revêtir la tenue obligatoire du pèlerin, le voile blanc (qui lui servira de linceul). 

171

 

Ce vêtement est en deux parties : une partie basse et une partie haute ; il est fait en tissu non cousu, et il est le même pour tous, qu’il soit un prince ou simple homme du peuple. Après s’être rasé et avoir accompli une ablution rituelle, il peut réciter la prière du pèlerin : « Je réponds à ton appel, ô Allah, je réponds à ton appel, toi qui es unique. Louange, grâce et domination à toi, qui es l’unique ». De cette manière, le croyant se met en présence de Dieu, car c’est pour lui seul qu’il est venu sur ce territoire sacré, sur lequel il devra se maintenir en état de grâce, tout le temps du pèlerinage. 

172

 

Cet état de sacralisation comporte de nombreuses obligations, qui remontent au Coran. Il est interdit de chasser, de tuer, de se couper les cheveux et les ongles, d’avoir des relations sexuelles. Il existe aussi des recommandations morales, dans la mesure où l’Islam se reconnaît aussi comme une religion de l’intention : c’est sur leurs intentions que les hommes seront jugés, au jour de Jugement, en plus de leurs conduites personnelles. Il convient que celui qui veut accomplir le pèlerinage en ait l’intention et qu’il l’exprime, en la maintenant et en la répétant tout au long du pèlerinage. 

173

 

Le pèlerin entre alors dans la grande Mosquée qui peut contenir cinq cents mille personnes. Il y entre du pied droit, avant d’entreprendre le premier rite du pèlerinage : la circumambulation autour de la Kaaba. Il doit faire le tour de la Kaaba sept fois ; ce rite existait bien avant Mahomet. Il essaie d’aller poser son front sur l’angle qui renferme la pierre noire, en signe d’allégeance, manifestant son entière soumission à Dieu : c’est un rappel du pacte conclu par Dieu avec l’humanité tout entière en Adam. Le fait même de toucher cette pierre, considérée comme la main droite de Dieu, est une marque que ce pacte est conclu par les descendants du pre­mier homme. 

174 

 

Le second rite est une course de quatre cent mètres qu’il faut parcourir égale­ment sept fois, en répétant les litanies rituelles des qua­tre-vingt dix-neuf noms de Dieu. Cette course entre deux petits monticules est un souvenir des épreuves d’Agar, qui recherchait une source pour elle-même et pour son fils Ismaël, mourant de soif dans leur fuite à travers le désert. Ayant fait sourdre une source sous ces pieds, un ange lui permit de désaltérer son fils ; elle ramassa cette eau dans ses mains, en disant : « Zemzem », c’est-à-dire : « regroupe-toi ». Ce nom est resté à la source sacrée, qui ne s’est jamais épuisée, malgré l’aridité des territoires avoisinant. Le pèlerin en recueille : c’est le seul souvenir qu’il pourra em­porter de son pèlerinage. Ayant accompli ces premiers rites, dits du petit pèlerinage, qui peut se pratiquer tout au long de l’année, il peut participer au grand pèlerinage, qui n’a lieu qu’une seule fois par an, du 7 au 13 du douzième mois de l’année lunaire. 

175

 

Le hadj, grand pèlerinage, a pour lieu, la montagne Arafa, lieu où Adam et Ève se seraient retrouvés après avoir été chassés du Paradis. Le prophète Mahomet accomplit à cet endroit son dernier pèlerinage, peu avant sa mort ; aussi est-il appelé le pèlerinage de l’adieu. L’essentiel de ce hadj est une station sur le mont Arafa : le croyant est invité à se tenir debout, les mains nues, en face de son Dieu, sur cette montagne, appelée montagne de la Miséricorde. 

176

 

Cette station permet au musulman de se souvenir, d’une manière encore plus prégnante du jour du jugement ; elle entraîne les croyants dans une atmosphère d’extase, tant est grand le déploiement de la foi et de l’espérance du pardon de Dieu. Le retour à La Mekke comporte également plusieurs rites. Le pèlerin se rend d’abord à Mozda­lifa, parce que le Prophète a veillé une nuit à cet endroit ; le pèlerin ramasse alors sept petits cailloux qu’il devra jeter sur une stèle de Mina, en souvenir du sacrifice d’Abraham. En effet, Satan, alors qu’Abraham, Agar et leur fils Ismaël avaient accepté la décision de Dieu d’accomplir le sacrifice d’Ismaël, avait tenté les uns et les autres, afin qu’ils n’accomplissent pas ce sacrifice. Les trois membres de la famille avaient alors lapidé Satan ; c’est en souvenir de cette lapidation de Satan que le pèlerin jette ces cailloux sur la stèle de Mîna. Ce rite signifie pour le croyant le désir qu’il a de lutter contre lui-même, en invoquant le nom de Dieu, lui le plus grand, le sublime. 

177

 

Le dernier jour de ce grand pèlerinage, les croyants (pas seulement les pèlerins, car dans le monde entier, en communion avec les pèlerins de La Mekke, les fidèles accomplissent le même rite) sacrifient un mouton, en prononçant la phrase rituelle : « O mon Dieu, de toi, par toi et pour toi ce sacrifice ». Les bêtes immolées ne peuvent être vendues, mais doivent être distribuées aux pauvres : la plus grande partie sera perdue, mais ce sacrifice est, avant tout, offert à Dieu.

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Ayant accompli ces rites, le pèlerin doit accomplir un nouveau rite, celui de la désacralisation. Il se fait couper les cheveux, la barbe et les ongles ; il abandonne le vêtement du pèlerin ; c’est alors qu’il peut réaliser l’ordre même donné par le Prophète de se désacraliser, avant de retourner au monde ordinaire. 

179

 

Avant de rentrer dans son pays, le pèlerin aime se rendre à Médine, où est enterré le Prophète ; ce pèlerinage est facultatif mais il couronne le hadj. Le prophète a dû quitter sa ville de La Mekke pour se réfugier à Yatrib, laquelle est devenue Médine. En se rendant sur les lieux où le Prophète a vécu ses dernières années, le pèlerin peut méditer sur l’expérience qu’il vient de vivre. Mahomet, qui n’était pas un homme instruit, a été choisi par Dieu pour porter aux hommes son message ; le pèlerin peut se saisir comme porteur du message coranique à l’ensemble de l’humanité, en prenant le Prophète comme modèle de vie, il découvre que tout ce qu’il doit faire, c’est de se soumettre entièrement à Dieu, de s’annihiler pour faire une place à Dieu qu’il vient de rencontrer pendant son pèlerinage. 

180

 

Importante manifestation religieuse, ce rassemblement des fidèles musulmans, pour le grand pèlerinage, comporte aussi une dimension politique : il rassemble tous les musulmans, vivant sous toutes les latitudes du monde, en un seul peuple. Il soude une fois de plus l’unité de la communauté islamique, malgré toutes les dissensions qui peuvent exister entre les différents pays à majorité musulmane. Comme les autres piliers de la religion, le pèlerinage vise à assurer une certaine cohésion de tous les fidèles, en vue de la plus grande gloire et de la plus grande louange du Dieu unique, qui s’est manifesté au Prophète. 

181

 

Ne constituant pas, à proprement parler une obligation, au même titre que les cinq autres piliers de la religion la guerre légale, el jihad, considérée comme une guerre sainte apparaît quand même comme un devoir pour le croyant, une de ses grandes obligations envers le Dieu unique, puisqu’il s’agit surtout d’une guerre de défense de la religion islamique, par l’exemple donné de la foi absolue, et non seulement par l’usage de la force armée, bien que, dès les premières années de l’Islam, le combat de la foi ait été inséparable d’une véritable lutte armée. 

182

 

Le premier aspect de cette guerre, c’est qu’elle ne peut être que défensive, et jamais offensive. Le Coran est explicite à ce sujet, quand il affirme que Dieu n’aime pas les transgresseurs, ceux qui s’attaquent aux autres hommes, et en particulier à ses fidèles : « Combattez dans le chemin de Dieu ceux qui luttent contre vous… Tuez les partout où vous les rencontrerez, chassez-les des lieux d’où ils vous auront chassés... ». 

183

 

De plus, ce combat pour Dieu est dirigé par Dieu même : c’est lui qui combat à la tête de ses fidèles : « Ce n’est pas vous qui les avez tués ; mais Dieu les a tués ». 

184

 

Le deuxième aspect de cette guerre est qu’elle est pour la défense de la religion. Dieu combat avec ses fidèles contre tous ceux qui demeurent incrédules, malgré les avertissements prophétiques. 

185

 

En tout état de cause, la tradition islamique a interprété cette guerre sainte dans le sens d’une prédication de l’Islam au monde entier : il s’agit, pour les croyants, d’étendre à l’univers les droits de Dieu. Finalement, la guerre sainte n’apparaît plus comme une lutte militaire, mais comme un combat spirituel contre toutes les forces du mal. 

186

 

L’Islam au quotidien : L’islam est tout ce qu’Allah a révélé à son prophète Mahomet. Il englobe des questions variées, le dogme, les cultes, la morale, les transactions et les peines prescrites. Tous ces thèmes sont abordés dans le Coran, livre destiné à tous les hommes. En effet, l’islam vise à la réforme de l’individu et de la société tout en croyant en Allah et tout en suivant ses ordres et en les appliquant dans les domaines de la vie selon les directives d’un système clair. 

187

 

Le mot « islam » signifie « paix, pureté et obéissance ou soumission à Allah ». Un musulman est une personne soumise à Allah. Les articles de la foi définissent le style de vie. Les musulmans démontrent leur foi, en suivant les lois de Dieu et en menant une vie de travail et de prière. Ils sont soumis à la loi, qui définit ce qui est halal (acceptable, permis par Dieu), ce qui est haram (défendu, interdit par Dieu) et ce qui est makruh (odieux, mais pas aussi mauvais que ce qui est haram).

188

 

La charia signifie « fil conducteur dans la vie ». C’est la voie que Dieu a tracée pour les hommes afin qu’ils puissent vivre sur terre tout en étant avec et devant Lui. Cette voie est constituée aussi bien des croyances et de la spiritualité que du droit. 

189

 

La charia est dérivée du Coran. Il s’agit d’un régime juridique complet qui aborde les questions religieuses, morales et sociales. La charia ne concerne pas tous les aspects de la vie humaine, comme on le pense parfois. Cela est exagéré dans le sens où elle réglementerait  en totalité tous les détails de la vie humaine. Certes les principaux domaines de l’activité humaine sont touchés, mais à l’intérieur de chacun de ces domaines, il y a des zones vierges que les souverains musulmans et les particuliers ne se sont pas fait faute d’exploiter.

190

 

Elle classe les actions humaines en cinq catégories : ce qui est obligatoire, ce qui est recommandé, ce qui est indifférent ou licite, ce qui est blâmable, ce qui est interdit. Par exemple : ce qui est obligatoire, ce sont les obligations cultuelles (piliers). Il est recommandé de se marier (mais ce n’est pas obligatoire). Il est blâmable (mais non interdit) de rester célibataire. Ce qui est interdit comporte les crimes et délits qui relèvent du droit pénal, et les tabous alimentaires : interdiction de consommer des boissons fermentées, de manger du porc...).

191

 

La colonisation de la plus grande partie du monde musulman par les puissances européennes a provoqué le remplacement de ce système à peu près partout, sauf dans la Péninsule Arabique, par des codes de lois pénales inspirés des traditions occidentales. Après leur indépendance, nombre de pays musulmans ont précisé que la Charia devenait une des sources du droit national. Certains ont récemment réinstauré les peines corporelles prévues, dans un souci de retour aux sources. C’est le cas de l’Afghanistan (1993), de l’Iran (1979), de l’Irak (1994), du Pakis­tan (1991) et du Soudan (1983). Parmi ces pays, l’Afghanistan a pourtant ratifié la « Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » (1984), entrée en vigueur en 1987, convention qui a été également signée par le Soudan. 

192

 

Les peines prévues par la Charia sont des punitions sévères qui n’ont pas pour but de réhabiliter l’individu mais de le punir publiquement pour décourager par cet exemple la répétition du délit. Ceci correspond à la nécessité dans laquelle se sont trouvées les premières sociétés musulmanes de sanctionner sévèrement les délits - vol, adultère, meurtre - pour éviter qu’ils ne provoquent des conflits familiaux ou tribaux. Le Coran et la Tradition mettent en garde de n’appliquer les peines qu’avec retenue et lorsque les faits sont absolument démontrés. 

193

 

Soixante-dix péchés ont été définis par la tradition.

194

 

Toute viande doit être hallal, c’est-à-dire absolument exsangue et provenir d’un animal tué selon les directives religieuses. Il est défendu de manger du porc et des produits dérivés. Le poisson et les œufs sont permis, mais doivent être apprêtés loin de la nourriture non hallal. Les oiseaux qui ne mangent pas de viande sont acceptables, tous les autres sont défendus. Les musulmans ne peuvent pas manger de nourriture bénie au nom d’un autre Dieu qu’Allah. L’alcool et les drogues ne sont pas tolérés. Une personne hospitalisée pendant le Ramadan peut choisir de jeûner de l’aube au crépuscule. Les personnes malades ou qui doivent subir des traitements médicaux peuvent être exemptées du jeûne, mais leur choix doit être respecté.

195

 

En général, les bébés mâles sont circoncis, bien qu’il ne s’agisse pas d’une obligation religieuse. La loi ne l’impose pas absolument, mais c’est une tradition de tout l’Orient et de l’Afrique. C’est une mesure hygiénique qui prend un sens religieux car il marque l’entrée du jeune garçon dans la communauté des croyants. Cette pratique se réalise maintenant dans les hôpitaux. Certaines personnes peuvent s’opposer à la transplantation d’organe, bien que cela ne soit pas précisément défendu par le Coran.

196

 

L’avortement est toléré seulement si la vie de la mère est menacée par la grossesse. Avant l’accouchement, les femmes peuvent refuser un examen interne. Une musulmane ne peut partager une chambre d’hôpital qu’avec une autre femme, et on doit respecter l’intimité de l’autre lorsque l’on entre dans la chambre. Lorsqu’un traitement médical est nécessaire en ce qui concerne une partie du corps en particulier, le reste du corps doit rester couvert, par pudeur.

197

 

Il n’y a pas d’objection à la transfusion. En cas d’hospitalisation, il faut fournir aux femmes des blouses qui couvrent les jambes et qui ont des manches longues. Seules des femmes médecins, des infirmières et des auxiliaires de sexe féminin peuvent s’occuper d’une patiente, sauf cas d’urgence. Dans ce cas, l’ordre de préférence est, selon la disponibilité, une femme médecin musulmane, une femme médecin non musulmane, un homme médecin musulman, et si aucune de ces personnes n’est disponible, un homme médecin non musulman.

198

 

Si la mort approche, le patient doit réciter le credo islamique et d’autres musulmans peuvent lire des versets du Coran. Les yeux du défunt doivent être fermés, la bouche doit être fermée à l’aide de bandages qui passent sous le menton et qui sont attachés sur le front. Les bras et les jambes doivent être droits. Le corps doit être lavé et enveloppé dans un tissu blanc. Les femmes peuvent laver le corps des femmes, et les hommes peuvent laver celui des hommes. Le mari ou la femme peut laver le corps de son conjoint. 

199

 

Le service funèbre, dirigé par l’imam, a lieu à la mosquée, où l’on récite des prières pour le défunt. L’enterrement doit avoir lieu dès que possible. À l’enterrement, le corps doit être enterré sur son côté droit et faire face à La Mekke. Les gens qui participent remplissent le trou de terre. Le tout est ensuite aspergé d’eau. L’incinération est défendue.

200

 

Le code vestimentaire musulman n’est pas seulement une obligation religieuse, il leur permet de s’identifier, il peut aussi être une source de fierté personnelle (démontrer à tous la dévotion et le sens de la pudeur). Les hommes et les femmes doivent s’habiller de façon décente.

201

 

L’on recommande fortement aux hommes de porter la barbe, avec ou sans moustache. Ils doivent cependant tenir celles-ci soignées, propres et taillées. Les hommes doivent éviter tout vêtement qui serait davantage approprié pour les femmes. Par exemple, ils ne doivent pas porter de vêtements en soie. Les vêtements des femmes doivent être décents et couvrir tout le corps, sauf le visage et les mains. Cette pratique et ce code vestimentaire sont connus en arabe sous le nom de hijab, selon les recommandations formelles du Coran

202

Actuellement, la notion islamique du « hijab » se traduit par le port d’une robe non ajustée et modeste, portée par les femmes. Elle couvre tout le corps à l’exception des mains, du cou et du visage. Certaines femmes peuvent décider de se couvrir la tête avec un foulard alors que d’autres ne le font pas. Dans certaines sociétés musulmanes, le concept du hijab requiert l’ajout d’un voile visant à couvrir tout le corps, sauf les mains et le visage, ou, dans certains cas, tout le corps, sauf les mains et les yeux. 

203

 

Le style abaya de l’Arabie saoudite et des régions du golfe Persique et le chador noir d’Iran en sont des exemples. En Afgha­nistan, les femmes portent le burqa, un vêtement non ajusté qui couvre le corps de la tête aux pieds, y com­pris les yeux, ne laissant qu’un grillage en tissu pour permettre de voir.

204

 

La mosquée est le lieu de culte des musulmans. Elle se distingue par son grand espace ouvert sur l’extérieur, espace dans lequel se trouve une fontaine pour permettre les ablutions, elle se distingue encore par son minaret, et souvent par un toit en forme de dôme. 

205

 

Dans la mosquée, l’imam dirige le service à partir du mihrab, structure semi-circulaire ou alcôve tournée vers La Mekke. Le mimbar, un siège ou un pupitre duquel on présente des sermons, est situé à la droite du mihrab, en haut d’une série de marches. 

206

Le plancher de la mosquée, l’endroit où la communauté se réunit, est couvert de tapis. Il n’y a ni siège ni banc. Les rites de purification consistent en des ablutions avant la prière (mains, visage, barbe, pieds), le déchaussement, l’usage de tapis de prières : tout acte religieux doit se pratiquer absolument sans souillures.

207

 

La mosquée est plus qu’un lieu de culte. C’est également une institution sociale, éducative et politique. Elle est contrôlée et gérée par la communauté.

208

 

Les travailleurs qui ne peuvent se rendre à une mosquée pour prier peuvent utiliser une chambre propre et un tapis pour prier au moment approprié. Au moment de la prière, il est utile pour le croyant que la direction de La Mekke soit indiquée. Il doit également avoir avec lui un exemplaire du Coran.

209

 

Bien qu’il y ait eu d’autres mosquées auparavant, la coupole du Rocher à Jérusalem est la plus ancienne encore debout aujourd’hui. Elle a été construite à la fin du septième siècle à l’endroit où l’on croit que Mahomet est monté au ciel.

210

 

La prière est obligatoire cinq fois par jour, à l’aube, à midi, au milieu de l’après-midi, au crépuscule et dans la soirée. L’heure de la prière varie chaque jour selon l’heure à laquelle le soleil se lève et se couche. L'appel à la prière se fait cinq fois par jour par le muezzin de tous les minarets dans le monde et maintenant par radio et télévision. Il consiste en sept déclarations courtes, expressions les plus importan­tes de la foi : « Allahu akbar ! (Dieu est grand !). Allahu akbar ! Ilaha la illa l'Allah (il n'y a pas d'autre Dieu que Allah). Je témoigne que Mahomet est le prophète d'Allah. Surgissez et priez, surgissez et priez. Allahu akbar. Ilaha la illa Allah ».

211

 

Appelés à la prière par un muezzin, les musulmans se réunissent à la mosquée à midi, le vendredi, afin de prier en tant que communauté. Les musulmans peuvent travailler le vendredi, dans la mesure où ils peuvent assister à la prière à la mosquée. Avant la prière commune, un imam fait un sermon.

212

 

Les musulmans prient beaucoup, avec ferveur et respect. En plus de la prière quotidienne, les musulmans ont toujours à portée de main leur « tasbih » (sorte de rosaire), avec quatre-vingt dix-neuf perles, correspondant aux quatre-vingt dix-neuf attributs que le Coran attribue à Dieu. Ils ont aussi un Rosaire plus petit, avec trente-trois perles, un tiers du normal. Prier le Tasbih, est simple, chaque fidèle peut le faire : les trente-trois premières perles, vous dites : « Sub­hana Allah » (béni soit Dieu), les trente-trois perles suivantes, vous dites : « Elhandu Allah » (Gratitude à Dieu), les trente-trois perles finales, vous dites : « Allahu akbar » (Dieu est grand ».

213

 

Afin de déterminer les dates des jours saints, les musulmans ont adopté un calendrier lunaire qui commence en l’an 622 de l’ère chrétienne, l’année au cours de laquelle Mahomet a fui La Mekke pour se rendre dans la ville de Yatrib, Médine. La date marque le début de la foi islamique et la formation de la première communauté. Les dates des jours saints varient chaque année dans le calendrier grégorien. Ce calendrier a été adopté dix ans après cet événement. On indique qu'une date est donnée dans ce calendrier en ajoutant la mention : calendrier musulman, hégirien, ère musulmane ou ère de l'Hégire.

214

 

Chaque mois démarre au premier croissant de la lune visible à partir de la nouvelle Lune : selon l'endroit d'où est effectuée l'observation, le mois peut démarrer plus ou moins tôt. L'année commune de ce calendrier comporte trois cent cinquante quatre jours, répartis en douze mois de trente et vingt-neuf jours alternativement, ce qui décale ce calendrier par rapport à l'année solaire. Cette différence se matérialise par un décalage par rapport au calendrier grégorien, basé sur le soleil et utilisé dans le monde occidental, d'environ onze jours par année grégorienne.

215

 

Avec des années de trois cents cinquante quatre jours, alors que douze lunaisons durent trois cent cinquante quatre et un tiers de jours, un décalage par rapport aux lunaisons apparaîtrait progressivement. Pour compenser ce décalage, sur un cycle de trente ans, on ajoute un jour au dernier mois de l'année (l'année est alors dite abondante, avec trois cents cinquante cinq jours) pour les années 2, 5, 7, 10, 13, 16, 18, 21, 24, 26 et 29 du cycle.

216

 

Au cours du Ramadan, neuvième mois du calendrier, les musulmans commencent à jeûner avant le lever du soleil et continuent jusqu’au coucher du soleil. Pour que son jeûne soit valable, le Musulman doit respecter, tout d’abord, deux principes fondamentaux, l’intention et l’abstinence. L’intention est la volonté résolue, exprimée par le cœur, d’effectuer le jeûne. Durant le jeûne, le Musulman devra s’abstenir de manger, de boire ou d’avoir des relations sexuelles avec son épouse à partir du début de l’aube jusqu’au coucher du soleil.

217

 

Si le Musulman veut profiter au mieux de son jeûne pour se rapprocher de Dieu, il aura la possibilité d’accomplir un certain nombre d’actes. Il a la possibilité de prendre un repas entre minuit et l’arrivée de l’aube. Cependant, il lui sera préférable d’attendre les derniers moments de la nuit. S’il arrive quelqu’un ayant l’intention de jeûner n’a pas la possibilité de connaître précisément le moment où le soleil commence à se lever et qu’il se trouve en train de manger, il lui est permis de continuer à prendre son repas jusqu’à ce qu’il soit sûr de l’arrivée de l’aube. Une fois que le Musulman sera assuré du coucher du soleil, il devra se hâter à rompre le jeûne, en mangeant un nombre impair de dattes. Il fera la prière de « Maghreb » puis prendra son repas. 

218

 

Lors de la journée, celui qui jeûne doit s’efforcer d’invoquer beaucoup Dieu car ses invocations seront exaucées. Pour qu’il profite pleinement de son jeûne, le croyant doit éviter toute forme de vulgarité et de futilité dans ses propos. Le jeûne ne se limite pas uniquement au fait de s’abstenir de manger et de boire. Il est avant tout un arrêt total des propos vulgaires et obscènes. Si le Musulman persistait à mentir et à commettre des mauvais actes, il risquerait alors de voir tous ses efforts réduits à néant.

219

 

Si celui qui jeûne éprouve le besoin de se rafraîchir ou de se baigner, il pourra le faire, mais devra se méfier de ne pas faire entrer d’eau à l’intérieur de son corps. Cependant, si par accident cela se produisait, son jeûne ne serait pas rompu. Les yeux n’étant pas considérés comme une ouverture du corps vers l’extérieur, contrairement à la bouche, on estime que celui qui jeûne peut prendre des gouttes même s’il en ressent le goût à travers la gorge. Il est permis à celui qui est marié d’embrasser sa femme s’il ne craint pas que cela provoque un désir chez lui. Dans le cas contraire, il devra alors éviter tout contact avec elle. Le Musulman peut recevoir une piqûre pendant qu’il jeûne même si elle est com­posée de nourriture. La substance se trouvant à l’intérieur pénètre dans le corps par un en­droit inhabituel, celle-ci n’interrompe pas le jeûne. Toute forme de saignée, que ce soit une prise de sang, un don ou autre, est autorisée si elle n’affaiblit pas celui qui jeûne. Le Musulman peut se rincer la bouche et aspirer de l’eau par le nez pendant qu’il jeûne. Cependant, il devra faire attention à ce que l’eau ne dépasse pas le niveau de la gorge.  Il est permis au Croyant d’avaler tout ce qui est inévitable sans que cela n’invalide son jeûne. De plus, il est aussi permis de se parfumer et d’utiliser de la pommade pendant le jeûne. En effet, ces matières ne jouent pas le rôle de nourriture. A partir du coucher du soleil, le Musulman pourra à nouveau manger, boire et avoir des rapports avec son épouse jusqu’à l’aube. 

220

 

L’Aid-al-Fitr, premier jour de Shawwal, dixième mois du calendrier islamique, célèbre la fin du Ramadan, le mois de jeûne. Pendant cette période, les musulmans ne travaillent pas, mais se rendent à la mosquée afin de prier et rendent également visite à leur famille.

221

 

L’Aid-al-Adha, le jour du sacrifice, a lieu le dixième jour du mois de Dhoul-Hijja, douzième mois du calendrier. Il commémore l’intention d’Abraham de sacrifier son fils à Dieu, qui a empêché le sacrifice. Ce jour marque également la fin du pèlerinage à La Mekke, pour ceux qui peuvent s’y rendre. Les musulmans ne travaillent pas ce jour-là, mais ils rendent visite à leur famille et se rendent à la mosquée.

222

 

L’Al-Hijral Muharran, nouvel an, commence au début du premier mois lunaire. L’Ashura marque le martyre de soixante-dix fidèles conduits par l’imam Husayn, le petit-fils de Mahomet en l’an 680 de l’ère chré­tienne). Le Mawlid-al-Nabi, ou Mouloud, célèbre la naissance du prophète en l’an 570 de l’ère chrétienne. Certaines sectes considèrent cette cé­lébration comme idolâtre.

223

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Condition de la femme dans l'Islam. Le drame des Afghanes a ému le monde. Même si le régime des talibans était une dérive, le statut des femmes, dans la plupart des pays musulmans, reste discriminatoire. Pourtant, Mahomet aimait les femmes. L'émergence de l'islam, au septième siècle, a représenté un progrès pour les femmes. Le droit a durci les dispositions du Coran, intégrant des traditions spécifiques aux tribus de la péninsule Arabique. Puis il s'est figé au onzième siècle et s'est peu à peu momifié, autorisant toutes les dérives. Le sort que la religion réserve aux femmes est devenu l'un des emblèmes les moins glorieux de l'islam. 

224

 

Dans un contexte plus général il est possible de se demander si l'islam est compatible avec les droits de l'homme. Il ne cultive pas les valeurs de liberté et de responsabilité individuelles. Il accepte l'esclavage (comme d'ailleurs l'Ancien Testament), mais n'oblige pas à le pratiquer. L'esclavage a donc pu diminuer, sous la pression, entre autres, de l'O.N.U. En revanche il ne reconnaît pas les mêmes droits à la femme qu'à l'homme. Il autorise l'homme à avoir plusieurs femmes, qui sont sa propriété, et l'autorise à les bat­tre s'il ne peut les convaincre autrement. En justice, le té­moignage de la femme ne vaut que la moitié de celui de l'homme. Elle hérite moitié moins que ses frè­res.

225

 

L'Islam n'empêche pas la femme de travailler, mais insiste pour qu’elle demeure dans ses rôles domestiques et familiaux. L'interprétation de la loi interdit par exemple aux femmes l'accès à des postes importants, notamment au sein de la fonction publique. Elle est également soumise à différentes contraintes, telles que le port du voile, elle est soumise à des châtiments qui lui sont spécifiques, comme la lapidation. Le Coran ne prescrit pas formellement le port du voile, mais indique que la femme, ne doit pas être l'objet du désir sexuel, C'est pour cette raison que la femme se recouvre dans plusieurs pays musulmans du voile (hijad) afin d'éviter de dévoiler des parties dénudées de son corps et d'exposer les hommes qu'elle pourrait épouser à la tentation.

226

 

Il faudrait alors examiner la position du prophète par rapport aux femmes. Au départ, Mahomet n’avait que la riche Khadija comme épouse, son aînée de quinze ans. Aucun de ses enfants de sexe mâle ne survit, ce qui, dans la société bédouine, est un signe d’impuissance et d’opprobre. Il est certain que cette descendance féminine fut mal ressentie par Mahomet, et qu’il chercha à prendre d’autres épouses. Certes, la société arabe païenne préislamique autorisait la polygamie, mais il faut garder à l’esprit le fait que Mahomet se présentait comme un monothéiste proche des juifs. Or les juifs refusaient la polygamie. Par conséquent Mahomet devait avoir conscience de se contredire en admettant la polygamie. Pour régler ce problème, une autorisation spéciale lui fut gracieusement accordée par Allah pour qu’il puisse épouser plusieurs femmes. De nombreuses femmes passèrent dans sa couche, parfois contre leur gré comme Marie, la captive copte. Même si la plupart de ses mariages répondaient à un intérêt politique pour se concilier des alliances avec d’autres clans, le pouvoir de son seul désir s’exprime en de maintes occasions, comme l’illustre son aventure avec Zainab, la femme de son fils adoptif : Mahomet inventa une histoire incroyable selon laquelle il avait reçu l’ordre divin de l’épouser. Ainsi il se disculpait du crime d’inceste et son fils accepta joyeusement de divorcer pour répondre au désir légitime de son père… 

227

 

Il épousa également Aïsha quelques mois avant l’Hégire, alors que lui avait passé la cinquantaine et qu’elle-même n’avait que six ans. Fort heureusement, il attendit sagement ses neuf ans avant de consommer ce mariage. Dans certains pays appliquant la charia, cette histoire scabreuse avec une fillette fixe l’âge légal du mariage islamique à neuf ans. Si Mahomet avait créé sa religion à notre époque, toute la presse se serait déchaînée contre lui en l’accusant d’être un affreux gourou pédophile… 

228

 

Le christianisme a associé le plaisir sexuel au péché et prôné l’idéal de chasteté dont Jésus était le modèle, le Coran promet aux croyants un paradis de délices charnels. Contrairement à la pudeur judéo-chrétienne, l’Islam ne rejette pas les joies du sexe pour le croyant tué au combat. Arrivé au paradis en effet, le combattant musulman se voit accordé de nombreuses vierges célestes, pour son plaisir. De tels fantasmes imprègnent l’esprit des terroristes islamistes qui enveloppent soigneusement leurs parties génitales avant de s’exploser…

229

 

 

Entre les deux civilisations, les malentendus sont nombreux, particulièrement en matière de morale sexuelle. Les chrétiens monogames ont été choqués par la vision des harems, l’institution de la polygamie, les nombreux mariages du Prophète Mahomet et plus encore par la promesse coranique d’un paradis sexué. De leur côté, les musulmans, pour qui le mariage est un devoir, critiquent le monachisme chrétien et le célibat des prêtres. À leurs yeux, les catholiques sont des refoulés voire des castrés. Au Moyen-âge, les musulmans doutaient de la virilité des Croisés qui ne manifestaient aucune jalousie à l’égard des amitiés masculines de leur femme.

230

 

Aujourd’hui, entre l’Occident laïque féministe et le monde musulman qui a conservé son code de la famille traditionnel, l’incompréhension est devenue totale sur la question du statut de la femme. Les Occidentaux considèrent le voile islamique comme un signe de soumission de la femme, tandis que les musulmans interprètent comme une marque d’irrespect envers la femme la libération des mœurs que revendiquent les Occidentaux.